Le 11 Avril 2010
François Scellier
1/ Quel bilan dressez-vous sur l'objectif premier de la loi Scellier sur
2009, à savoir le maintien du marché de l'immobilier neuf dans la crise ?
Avec la crise, il devenait plus important encore qu'antérieurement de relancer
le dispositif d'aide à l'investissement locatif dont l'attractivité s'était
affaiblie avec le temps. Il fallait par la même occasion le rendre plus lisible,
plus juste, ce qui a été fait en remplaçant la technique fiscale de l'amortissement
par une réduction d'impôt dépendant non pas du niveau d'imposition à l'impôt
sur le revenu mais seulement du montant de l'investissement. Par ailleurs, il
convenait de réserver le bénéfice de la mesure à des opérations réalisées
sur des territoires où existe un marché locatif fort.
2/ Le législateur a instauré le régime Sceller Bâtiment Basse Consommation
à partir du 1er janvier 2011. Devons-nous comprendre que la crise du logement
devient secondaire par rapport aux préoccupations environnementales ?
Non, notre objectif principal est toujours de nous permettre de construire
plus dans toutes les catégories de logement et au cas particulier dans le logement
privé. Car la crise du logement, différente pour chacun des territoires, ne
sera résolue que lorsque le parc sera suffisant pour permettre à chacun de se
loger qu'il soit propriétaire ou qu'il soit locataire. Que parallèlement soit
favorisée la construction de logements
BBC est une bonne chose pour l'environnement d'une manière générale, mais
aussi pour l'occupant propriétaire ou locataire qui verra ses charges en fluide
et en chauffage diminuées en conséquence.
3/ Le dispositif
Scellier semble échapper aux dérives qui ont entaché le dispositif De Robien,
principalement des constructions dans des secteurs à faible demande locative.
Jugez-vous le zonage du dispositif Scellier pertinent ?
Le zonage
devrait permettre d'éviter effectivement des erreurs constatées dans le passé
(avec le dispositif Robien notamment) conduisant à la construction de logements
neufs sur des territoires où la demande locative était faible voire même inexistante.
Toutefois, le seul classement d'un territoire en zone éligible n'est pas une
garantie absolue. Il faut que l'investisseur fasse de lui-même les choix pertinents
en évaluant non seulement le marché locatif de l'instant mais son évolution
dans le temps.
C'est la raison pour laquelle les pouvoirs publics doivent se donner aussi la
possibilité de le faire évoluer et de le modifier.
4/ Les dérogations données au cas par cas par agrément ministériel dans
les communes de la zone C ont-elles été nombreuses ?
Pour l'instant, aucune dérogation ministérielle n'a pu être donnée, dans
la mesure où nous sommes toujours en attente du décret d'application en cours
de concrétisation.
5/ Une autre dérive a entaché les dispositifs Robien/Borloo : l'absence
totale d'information et de conseil de certains vendeurs des risques des investissements
en défiscalisation immobilière (impayés de loyers, absence de locataire, possibilités
de perdre l'avantage fiscal,etc.). Des mesures ont-elles été prises par le législateur
pour endiguer ces pratiques ?
Il est difficile pour le législateur de prévoir toutes les dérives susceptibles
d'entacher la bonne application du dispositif.
Lorsqu'il y a arnaque proprement dite, il appartient à la justice d'intervenir
pour protéger la victime et lui donner réparation.
Par contre, il faut aussi que l'investisseur soit suffisamment averti et ne fasse
pas preuve de naïveté en espérant un produit miracle qui lui fasse gagner de
l'argent sans risque.
Un investissement immobilier est toujours quelque chose d'important: il faut bien
choisir le produit, reconnaître les lieux, apprécier son environnement, s'informer
sur les possibilités de location et sur le montant de celle-ci. Il faut aussi
renoncer à acheter dans des opérations exclusivement dédiées à l'investissement
locatif. En un mot, il ne faut pas être naïf et succomber à l'attrait de « trop
belles opérations » où la commercialisation vous promettrait de devenir
propriétaire sans que cela ne vous coûte rien. La naïveté peut coûter très
cher.
6/ Les rares dérives de la loi Scellier semblent provenir d'Internet avec
certains sites commerciaux qui présentent un aspect institutionnel en plagiant
le graphisme d'un site gouvernemental pour créer la confusion dans l'esprit des
utilisateurs. Des mesures sont-elles prévues pour endiguer ces abus de confiance
?
Dans notre pays où la liberté est la règle, il n'y a que la Justice qui
puisse vraiment sanctionner les abus lorsqu'ils vont jusqu'Ã l'escroquerie.
7/ Le dispositif Scellier ancien pâtit d'une faible exposition. A quoi
attribueriez-vous ce maigre retentissement ?
Il peut être effectivement très intéressant d'utiliser le dispositif pour
« produire du logement » à partir de bâtiments commerciaux ou individuels
ou même d'habitat dégradé et sans confort. Le fait qu'il s'agisse le plus souvent
d'opération à l'unité ou avec un nombre réduit de logements explique sûrement
pour l'instant leur succès limité dès lors qu'elles ne sont pas réalisées
par des promoteurs-constructeurs importants.
Toutefois, on peut citer une opération très intéressante, éligible au dispositif,
réalisée à Poitiers.
8/ Outre la loi Scellier BBC, quels sont les modifications du dispositif
Scellier en cours d'élaboration ?
Actuellement, il n'est pas question de modifier de manière importante le dispositif.
Il est nécessaire en effet, et c'est vrai d'une manière générale et encore
plus dans l'immobilier, qu'il existe une certaine stabilité des règles et des
mesures.... et surtout de l'environnement fiscal.
9/ Après la loi Scellier et Scellier BBC, quel sera le dispositif de défiscalisation
immobilière de demain ?
Il me semble que le dispositif devrait être pérennisé au-delà du 31 décembre
2012 (limite de son existence aujourd'hui) mais peut-être en le rendant territorialement
plus flexible pour construire là où on doit et pas ailleurs.
On peut aussi concevoir que l'avantage fiscal important consenti à l'investisseur
soit gagé par une contrainte plus forte au niveau du loyer de sortie pour diversifier
davantage les produits offerts aux locataires, en permettant au plus grand nombre
de se loger en-dehors d'un logement qualifié de « logement social ».
L’équipe de défiscalisationderobien.com remercie Monsieur le député
François Scellier de nous avoir accordé cette interview exclusive.