LA
CONSTITUTION DU 14 JANVIER 1852
ET
SES MODIFICATIONS
Proclamation
du 14 janvier 1852
Louis Napoléon, Président
de la République, au Peuple Français :
FRANÇAIS
!
Lorsque, dans ma proclamation
du 2 décembre, je vous exprimai loyalement quelles étaient,
à mon sens, les conditions vitales du Pouvoir en France, je n'avais
pas la prétention, si commune de nos jours, de substituer une théorie
personnelle à l'expérience des siècles. J'ai cherché,
au contraire, quels étaient dans le passé les exemples les
meilleurs à suivre, quels hommes les avaient donnés, et
quel bien en était résulté.
Dès lors, j'ai cru
logique de préférer les préceptes du génie
aux doctrines spécieuses d'hommes à idées abstraites.
J'ai pris comme modèle les institutions politiques qui déjà,
au commencement de ce siècle, dans des circonstances analogues,
ont raffermi la société ébranlée et élevé
la France à un haut degré de prospérité et
de grandeur.
J'ai pris comme modèle
les institutions qui, au lieu de disparaître au premier souffle
des agitations populaires, n'ont été renversées que
par l'Europe entière coalisée contre nous.
En un mot, je me suis dit :
puisque la France ne marche depuis cinquante ans qu'en vertu de l'organisation
administrative, militaire, judiciaire, religieuse, financière,
du Consulat et de l'Empire, pourquoi n'adopterions-nous pas aussi les
institutions politiques de cette époque ? Créées
par la même pensée, elles doivent porter en elles le même
caractère de nationalité et d'utilité pratique.
En effet, ainsi que je l'ai
rappelé dans ma proclamation, notre société actuelle,
il est essentiel de le constater, n'est pas autre chose que la France
régénérée par la Révolution de 89 et
organisée par l'Empereur. Il ne reste plus rien de l'Ancien Régime
que de grands souvenirs et de grands bienfaits. Mais tout ce qui alors
était organisé a été détruit par la
Révolution, et tout ce qui a été organisé
depuis la Révolution et qui existe encore l'a été
par Napoléon.
Nous n'avons plus ni provinces,
ni pays d'État, ni parlements, ni intendants, ni fermiers généraux,
ni coutumes diverses, ni droits féodaux, ni classes privilégiées
en possession exclusive des emplois civils et militaires, ni juridictions
religieuses différentes.
A tant de choses incompatibles
avec elle, la Révolution avait fait subir une réforme radicale,
mais elle n'avait rien fondé de définitif. Seul, le Premier
consul rétablit l'unité, la hiérarchie et les véritables
principes du gouvernement. Ils sont encore en vigueur.
Ainsi, l'administration de
la France confiée à des préfets, à des sous-préfets,
à des maires, qui substituaient l'unité aux commissions
directoriales ; la décision des affaires, au contraire, donnée
à des conseils, depuis la commune jusqu'au département.
Ainsi, la magistrature affermie par l'inamovibilité des juges,
par la hiérarchie des tribunaux ; la justice rendue plus facile
par la délimitation des attributions, depuis la justice de paix
jusqu'à la Cour de cassation. Tout cela est encore debout.
De même, notre admirable
système financier, la Banque de France, l'établissement
des budgets, la Cour des comptes, l'organisation de la police, nos règlements
militaires datent de cette époque.
Depuis cinquante ans, c'est
le Code Napoléon qui règle les intérêts des
citoyens entre eux ; c'est encore le Concordat qui règle les
rapports de l'État avec l'Eglise.
Enfin la plupart des mesures
qui concernent les progrès de l'industrie, du commerce, des lettres,
des sciences, des arts, depuis les règlements du Théâtre-Français
jusqu'à ceux de l'Institut, depuis l'institution des prud'hommes
jusqu'à la création de la Légion d'honneur, ont été
fixées par les décrets de ce temps.
On peut donc l'affirmer, la
charpente de notre édifice social est l'oeuvre de l'Empereur, et
elle a résisté à sa chute et à trois révolutions.
Pourquoi, avec la même
origine, les institutions politiques n'auraient-elles pas les mêmes
chances de durée ?
Ma conviction était
formée depuis longtemps, et c'est pour cela que j'ai soumis à
votre jugement les bases principales d'une constitution empruntée
à celle de l'an VIII. Approuvées par vous, elles vont devenir
le fondement de notre Constitution politique.
Examinons quel en est l'esprit :
Dans notre pays, monarchique
depuis huit cents ans, le pouvoir central a toujours été
en s'augmentant. La royauté a détruit les grands vassaux ;
les révolutions elles-mêmes ont fait disparaître les
obstacles qui s'opposaient à l'exercice rapide et uniforme de l'autorité.
Dans ce pays de centralisation, l'opinion publique a sans cesse tout rapporté
au chef du gouvernement, le bien comme le mal. Aussi, écrire en
tête d'une charte que ce chef est irresponsable, c'est mentir au
sentiment public, c'est vouloir établir une fonction qui s'est
trois fois évanouie au bruit des révolutions.
La Constitution actuelle proclame,
au contraire, que le chef que vous avez élu est responsable devant
vous ; qu'il a toujours le droit de faire appel à votre jugement
souverain, afin que, dans les circonstances solennelles, vous puissiez
lui continuer ou lui retirer votre confiance.
Etant responsable, il faut
que son action soit libre et sans entraves. De là l'obligation
d'avoir des ministres qui soient les auxiliaires honorés et puissants
de sa pensée, mais qui ne forment plus un Conseil responsable,
composé de membres solidaires, obstacle journalier à l'impulsion
particulière du chef de l'État, expression d'une politique émanée
des Chambres, et par là même exposée à des
changements fréquents, qui empêchent tout esprit de suite,
toute application d'un système régulier.
Néanmoins, plus un
homme est haut placé, plus il est indépendant, plus la confiance
que le Peuple a mise en lui est grande, plus il a besoin de conseils éclairés,
consciencieux. De là la création d'un Conseil d'État, désormais
véritable Conseil du gouvernement, premier rouage de notre organisation
nouvelle, réunion d'hommes pratiques élaborant les projets
de loi dans des commission spéciales, les discutant à huis
clos, sans ostentation oratoire, en assemblée générale,
et les présentant ensuite à l'acceptation du Corps législatif.
Ainsi le pouvoir est libre
dans ses mouvements, éclairé dans sa marche.
Quel sera maintenant le contrôle
exercé par les Assemblées ?
Une Chambre, qui prend le
titre de Corps législatif, vote les lois et l'impôt. Elle
est élue par le suffrage universel, sans scrutin de liste. Le Peuple,
choisissant isolément chaque candidat, peut plus facilement apprécier
le mérite de chacun d'eux.
La Chambre n'est plus composée
que d'environ deux cent soixante membres. C'est là une première
garantie du calme des délibérations, car trop souvent on
a vu dans les Assemblées la mobilité et l'ardeur des passions
croître en raison du nombre.
Le compte rendu des séances
qui doit instruire la Nation n'est plus livré, comme autrefois,
à l'esprit de parti de chaque journal ; une publication officielle,
rédigée par les soins du président de la Chambre,
en est seule permise.
Le Corps législatif
discute librement la loi, l'adopte ou la repousse ; mais il n'y introduit
pas à l'improviste de ces amendements qui dérangent souvent
toute l'économie d'un système et l'ensemble du projet primitif.
A plus forte raison n'a-t-il pas cette initiative parlementaire qui était
la source de si graves abus, et qui permettrait à chaque député
de se substituer à tout propos au Gouvernement en présentant
les projets les moins étudiés, les moins approfondis.
La Chambre n'étant
plus en présence des ministres, et les projets de loi étant
soutenus par les orateurs du Conseil d'État, le temps ne se perd pas en
vaines interpellations, en accusations frivoles, en luttes passionnées
dont l'unique but était de renverser les ministres pour les remplacer.
Ainsi donc, les délibérations
du Corps législatif seront indépendantes ; mais les
causes d'agitations stériles auront été supprimées,
des lenteurs salutaires apportées à toute modification de
la loi. Les mandataires de la Nation feront mûrement les choses
sérieuses.
Une autre Assemblée
prend le nom de Sénat. Elle sera composée des éléments
qui, dans tout pays, créent les influences légitimes :
le nom illustre, la fortune, le talent et les services rendus.
Le Sénat n'est plus,
comme la Chambre des pairs, le pâle reflet de la Chambre des députés,
répétant, à quelques jours d'intervalle, les mêmes
discussions sur un autre ton. Il est le dépositaire du pacte fondamental
et des libertés compatibles avec la Constitution ; et c'est
uniquement sous le rapport des grands principes sur lesquels repose notre
société, qu'il examine toutes les lois et qu'il en propose
de nouvelles au pouvoir exécutif. Il intervient, soit pour résoudre
toute difficulté grave qui pourrait s'élever pendant l'absence
du Corps législatif, soit pour expliquer le texte de la Constitution
et assurer ce qui est nécessaire à sa marche. Il a le droit
d'annuler tout acte arbitraire et illégal, et, jouissant ainsi
de cette considération qui s'attache à un corps exclusivement
occupé de l'examen de grands intérêts ou de l'application
de grands principes, il remplit dans l'État le rôle indépendant,
salutaire, conservateur, des anciens parlements.
Le Sénat ne sera pas,
comme la Chambre des pairs, transformé en Cour de justice :
il conservera son caractère de modérateur suprême,
car la défaveur atteint toujours les corps politiques lorsque le
sanctuaire des législateurs devient un tribunal criminel. L'impartialité
du juge est trop souvent mise en doute, et il perd son prestige devant
l'opinion, qui va quelquefois jusqu'à l'accuser d'être l'instrument
de la passion ou de la haine.
Une Haute Cour de justice,
choisie dans la haute magistrature, ayant pour jurés des membres
des conseils généraux de toute la France, réprimera
seule les attentats contre le chef de l'État et la sûreté
publique.
L'Empereur disait au Conseil
d'État : " Une Constitution est l'oeuvre du temps ;
on ne saurait laisser une trop large voie aux améliorations.
" Aussi la Constitution présente n'a-t-elle fixé que
ce qu'il était impossible de laisser incertain. Elle n'a pas enfermé
dans un cercle infranchissable les destinées d'un grand peuple,
elle a laissé aux changements une assez large voie pour qu'il y
ait, dans les grandes crises, d'autres moyens de salut que l'expédient
désastreux des révolutions.
Le Sénat peut, de concert
avec le gouvernement, modifier tout ce qui n'est pas fondamental dans
la Constitution ; mais quant aux modifications à apporter
aux bases premières, sanctionnées par vos suffrages, elles
ne peuvent devenir définitives qu'après avoir reçu
votre ratification.
Ainsi, le Peuple reste toujours
maître de sa destinée. Rien de fondamental ne se fait en
dehors de sa volonté.
Telles sont les idées,
tels sont les principes dont vous m'avez autorisé à faire
l'application. Puisse cette constitution donner à notre patrie
des jours calmes et prospères ! Puisse-t-elle prévenir
le retour de ces luttes intestines où la victoire, quelque légitime
qu'elle soit, est toujours chèrement achetée ! Puisse
la sanction que vous avez donnée à mes efforts être
bénie du ciel ! Alors la paix sera assurée au-dedans
et au-dehors, mes voeux seront comblés, ma mission sera accomplis.
Constitution
du 14 janvier 1852
(faite en
vertu des pouvoirs délégués par le peuple français
à Louis Napoléon Bonaparte par le vote des 20 et 21 décembre 1851.)
Le Président de la
République, considérant que le Peuple français a
été appelé à se prononcer sur la résolution
suivante :
" Le peuple veut
le maintien de l'autorité de Louis Napoléon Bonaparte,
et lui donne les pouvoirs nécessaires pour faire une Constitution
d'après les bases établies dans sa proclamation du 2 décembre " ;
Considérant que les
bases proposées à l'acceptation du Peuple étaient :
" 1° Un chef
responsable nommé pour dix ans ;
" 2° Des ministres
dépendant du pouvoir exécutif seul ;
" 3° Un Conseil
d'État formé des hommes les plus distingués, préparant
les lois et en soutenant la discussion devant le Corps législatif ;
" 4° Un Corps
législatif discutant et votant les lois, nommé par le suffrage
Universel sans scrutin de liste qui fausse l'élection ;
" 5° Une seconde
Assemblée formée de toutes les illustrations du pays, pouvoir
pondérateur, gardien du pacte fondamental et des libertés
publiques. "
Considérant que le
Peuple a répondu affirmativement par sept millions cinq cent mille
suffrages.
promulgue la Constitution
dont la teneur suit :
TITRE PREMIER
Article 1. - La Constitution
reconnaît, confirme et garantit les grands principes proclamés
en 1789, et qui sont la base du droit public des Français.
TITRE II -
Formes du gouvernement de la République
Article 2. - Le Gouvernement
de la République française est confié pour dix ans
au prince Louis Napoléon Bonaparte, président actuel
de la République.
Article 3. - Le président
de la République gouverne au moyen des ministres, du Conseil d'État,
du Sénat et du Corps législatif.
Article 4. - La puissance
législative s'exerce collectivement par le président de
la République, le Sénat et le Corps législatif.
TITRE III
- Du président de la République
Article 5. - Le président
de la République est responsable devant le Peuple français,
auquel il a toujours le droit de faire appel.
Article 6. - Le président
de la République est le chef de l'État ; il commande les forces
de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités
de paix, d'alliance et de commerce, nomme à tous les emplois, fait
les règlements et décrets nécessaires pour l'exécution
des lois.
Article 7. - La justice se
rend en son nom.
Article 8. - Il a seul l'initiative
des lois.
Article 9. - Il a le droit
de faire grâce.
Article 10. - Il sanctionne
et promulgue les lois et les sénatus-consultes.
Article 11. - Il présente,
tous les ans, au Sénat et au Corps législatif, par un message,
l'état des affaires de la République.
Article 12. - Il a le droit
de déclarer l'état de siège dans un ou plusieurs
départements, sauf à en référer au Sénat
dans le plus bref délai. - Les conséquences de l'état
de siège sont réglées par la loi.
Article 13. - Les ministres
ne dépendent que du chef de l'État ; ils ne sont responsables
que, chacun en ce qui le concerne, des actes du gouvernement ; il
n'y a point de solidarité entre eux ; ils ne peuvent être
mis en accusation que par le Sénat.
Article 14. - Les ministres,
les membres du Sénat, du Corps législatif et du Conseil
d'État, les officiers de terre et de mer, les magistrats et les fonctionnaires
publics prêtent le serment ainsi conçu : " Je
jure obéissance à la Constitution et fidélité
au président. "
Article 15. - Un sénatus-consulte
fixe la somme allouée annuellement au président de la République
pour toute la durée de ses fonctions.
Article 16. - Si le président
de la République meurt avant l'expiration de son mandat, le Sénat
convoque la Nation pour procéder à une nouvelle élection.
Article 17. - Le chef de l'État
a le droit, par un acte secret et déposé aux archives du
Sénat, de désigner le nom du citoyen qu'il recommande, dans
l'intérêt de la France, à la confiance du Peuple et
à ses suffrages.
Article 18. - Jusqu'à
l'élection du nouveau président de la République,
le président du Sénat gouverne avec le concours des ministres
en fonctions, qui se forment en Conseil de gouvernement, et délibèrent
à la majorité des voix.
TITRE IV -
Du Sénat
Article 19. - Le nombre des
sénateurs ne pourra excéder cent cinquante : il est
fixé pour la première année, à quatre-vingts.
Article 20. - Le Sénat
se compose :
1° Des cardinaux, des maréchaux, des amiraux ;
2° Des citoyens que le président de la République juge
convenable d'élever à la dignité de sénateur.
Article 21. - Les sénateurs
sont inamovibles et à vie.
Article 22. - Les fonctions
de sénateur sont gratuites ; néanmoins le président
de la République pourra accorder à des sénateurs,
en raison de services rendus et de leur position de fortune, une dotation
personnelle, qui ne pourra excéder trente mille francs par an.
Article 23. - Le président
et les vice-présidents du Sénat sont nommés par le
président de la République et choisis parmi les sénateurs.
- Ils sont nommés pour un an. - Le traitement du président
du Sénat est fixé par un décret.
Article 24. - Le président
de la République convoque et proroge le Sénat. Il fixe la
durée de ses sessions par un décret. - Les séances
du Sénat ne sont pas publiques.
Article 25. - Le Sénat
est le gardien du pacte fondamental et des libertés publiques.
Aucune loi ne peut être promulguée avant de lui avoir été
soumise.
Article 26. - Le Sénat
s'oppose à la promulgation. -
1° Des lois qui seraient contraires ou qui porteraient atteinte à
la Constitution, à la religion, à la morale, à la
liberté des cultes, à la liberté individuelle, à
l'égalité des citoyens devant la loi, à l'inviolabilité
de la propriété et au principe de l'inamovibilité
de la magistrature ;
2° De celles qui pourraient compromettre la défense du territoire.
Article 27. - Le Sénat
règle par un sénatus-consulte :
1° La constitution des colonies et de l'Algérie ;
2° Tout ce qui n'a pas été prévu par la Constitution
et qui est nécessaire à sa marche ;
3° Le sens des articles de la Constitution qui donnent lieu à
différentes interprétations.
Article 28. - Ces sénatus-consultes
seront soumis à la sanction du président de la République
et promulgués par lui.
Article 29. - Le Sénat
maintient ou annule tous les actes qui lui sont déférés
comme inconstitutionnels par le gouvernement, ou dénoncés,
pour la même cause, par les pétitions des citoyens.
Article 30. - Le Sénat
peut, dans un rapport adressé au président de la République,
poser les bases de projets de loi d'un grand intérêt national.
Article 31. - Il peut également
proposer des modifications à la Constitution. Si la proposition
est adoptée par le pouvoir exécutif, il y est statué
par un sénatus-consulte.
Article 32. - Néanmoins,
sera soumise au suffrage universel toute modification aux bases fondamentales
de la Constitution, telles qu'elles ont été posées
dans la proclamation du 2 décembre et adoptées par le Peuple
français.
Article 33. - En cas de dissolution
du Corps législatif, et jusqu'à une nouvelle convocation,
le Sénat, sur la proposition du président de la République,
pourvoit, par des mesures d'urgence, à tout ce qui est nécessaire
à la marche du gouvernement.
TITRE V -
Du Corps législatif
Article 34. - L'élection
a pour base la population.
Article 35. - Il y aura un
député au Corps législatif à raison de trente-cinq
mille électeurs.
Article 36. - Les députés
sont élus par le suffrage universel, sans scrutin de liste.
Article 37. - Ils ne reçoivent
aucun traitement.
Article 38. - Ils sont nommés
pour six ans.
Article 39. - Le Corps législatif
discute et vote les projets de loi et l'impôt.
Article 40. - Tout amendement
adopté par la commission chargée d'examiner un projet de
loi sera renvoyé, sans discussion, au Conseil d'État par le président
du Corps législatif. - Si l'amendement n'est pas adopté
par le Conseil d'État, il ne pourra pas être soumis à la
délibération du Corps législatif.
Article 41. - Les sessions
ordinaires du Corps législatif durent trois mois ; ses séances
sont publiques, mais la demande de cinq membres suffit pour qu'il se forme
en Comité secret.
Article 42. - Le compte rendu
des séances du Corps législatif par les journaux ou tout
autre moyen de publication, ne consistera que dans la reproduction du
procès-verbal, dressé, à l'issue de chaque séance,
par les soins du président du Corps législatif.
Article 43. - Le président
et les vice-présidents du Corps législatif sont nommés
par le président de la République pour un an ; ils
sont choisis parmi les députés. Le traitement du président
du Corps législatif est fixé par un décret.
Article 44. - Les ministres
ne peuvent être membres du Corps législatif.
Article 45. - Le droit de
pétition s'exerce auprès du Sénat. Aucune pétition
ne peut être adressée au Corps législatif.
Article 46. - Le président
de la République convoque, ajourne, proroge et dissout le Corps
législatif. En cas de dissolution, le président de la République
doit en convoquer un nouveau dans le délai de six mois.
TITRE VI -
Du Conseil d'État
ART 47. - Le nombre des conseillers
d'État en service ordinaire est de quarante à cinquante.
Article 48. - Les conseillers
d'État sont nommés par le président de la République,
et révocables par lui.
Article 49. - Le Conseil d'État
est présidé par le président de la République,
et, en son absence, par la personne qu'il désigne comme vice-président
du Conseil d'État.
Article 50. - Le Conseil d'État
est chargé, sous la direction du président de la République,
de rédiger les projets de loi et les règlements d'administration
publique, et de résoudre les difficultés qui s'élèvent
en matière d'administration.
Article 51. - Il soutient
au nom du gouvernement, la discussion des projets de loi devant le Sénat
et le Corps législatif. - Les conseillers d'État chargés
de porter la parole au nom du gouvernement sont désignés
par le président de la République.
Article 52. - Le traitement
de chaque conseiller d'État est de vingt-cinq mille francs.
Article 53. - Les ministres
ont rang, séance et voix délibérative au Conseil
d'État.
TITRE VII
- De la Haute Cour de justice
Article 54. - Une Haute Cour
de justice juge, sans appel ni recours en cassation, toutes personnes
qui ont été renvoyées devant elle comme prévenues
de crimes, attentats ou complots contre le président de la République
et contre la sûreté intérieure ou extérieure
de l'État. - Elle ne peut être saisie qu'en vertu d'un décret
du président de la République.
Article 55. - Un sénatus-consulte
déterminera l'organisation de cette Haute Cour.
TITRE VIII
- Dispositions générales et transitoires
Article 56. - Les dispositions
des codes, lois et règlements existants, qui ne sont pas contraires
à la présente Constitution, restent en vigueur jusqu'à
ce qu'il y soit légalement dérogé.
Article 57. - Une loi déterminera
l'organisation municipale. Les maires seront nommés par le pouvoir
exécutif, et pourront être pris hors du conseil municipal.
Article 58. - La présente
Constitution sera en vigueur à dater du jour où les grands
Corps de l'État qu'elle organise seront constitués. - Les décrets
rendus par le président de la République, à partir
du 2 décembre jusqu'à cette époque, auront force
de loi.
Sénatus-consulte
du 7 novembre 1852,
portant modification
à la Constitution.
Article 1. - La dignité
impériale est rétablie. - Louis Napoléon Bonaparte
est Empereur des Français, sous le nom de Napoléon III.
Article 2. - La dignité
impériale est héréditaire dans la descendance directe
et légitime de Louis Napoléon Bonaparte, de mâle
en mâle, par ordre de primogéniture, et à l'exclusion
perpétuelle des femmes et de leur descendance.
Article 3. - Louis Napoléon
Bonaparte, s'il n'a pas d'enfants mâles, peut adopter les enfants
et descendants légitimes, dans la ligne masculine des frères
de l'Empereur Napoléon Ier.
- Les formes de l'adoption sont réglées par un sénatus-consulte.
- Si, postérieurement à l'adoption, il survient à
Louis Napoléon des enfants mâles, ses fils adoptifs
ne pourront être appelés à lui succéder qu'après
ses descendants légitimes.
- L'adoption est interdite aux successeurs de Louis Napoléon
et à leur descendance.
Article 4. - Louis Napoléon
Bonaparte règle, par un décret organique adressé
au Sénat et déposé dans ses archives, l'ordre de
succession au trône dans la famille Bonaparte, pour le cas
où il ne laisserait aucun héritier direct, légitime
ou adoptif.
Article 5. - A défaut
d'héritier légitime ou d'héritier adoptif de Louis
Napoléon Bonaparte, et des successeurs en ligne collatérale
qui prendront leur droit dans le décret organique sus-mentionné,
un sénatus-consulte proposé au Sénat par les ministres
formés en Conseil de gouvernement, avec l'adjonction des présidents
en exercice du Sénat, du Corps législatif et du Conseil
d'État, et soumis à l'acceptation du Peuple, nomme l'Empereur et
règle dans sa famille l'ordre héréditaire de mâle
en mâle, à l'exclusion perpétuelle des femmes et de
leur descendance.
- Jusqu'au moment où l'élection du nouvel empereur est consommée,
les affaires de l'État sont gouvernées par les ministres en fonctions,
qui se forment en Conseil de gouvernement et délibèrent
à la majorité des voix.
Article 6. - Les membres de
la famille de Louis Napoléon Bonaparte appelés éventuellement
à l'hérédité, et leur descendance des deux
sexes, font partie de la famille impériale. Un sénatus-consulte
règle leur position. Ils ne peuvent se marier sans l'autorisation
de l'Empereur. Leur mariage fait sans cette autorisation emporte privation
de tout droit à l'hérédité, tant pour celui
qui l'a contracté que pour ses descendants.
- Néanmoins, s'il n'existe pas d'enfants de ce mariage, en cas
de dissolution pour cause de décès, le prince qui l'aurait
contracté recouvre ses droits à l'hérédité.
- Louis Napoléon Bonaparte fixe les titres et la condition
des autres membres de sa famille. - L'empereur a pleine autorité
sur tous les membres de sa famille ; il règle leurs devoirs
et leurs obligations par des statuts qui ont force de loi.
Article 7. - La Constitution
du 14 janvier 1852 est maintenue dans toutes celles de ses dispositions
qui ne sont pas contraires au présent sénatus-consulte ;
il ne pourra y être apporté de modifications que dans les
formes et par les moyens qu'elle a prévus.
Article 8. - La proposition
suivante sera présentée à l'acceptation du Peuple
français dans les formes déterminées par les décrets
des 2 et 4 décembre 1851 :
" Le Peuple français
veut le rétablissement de la dignité impériale dans
la personne de Louis Napoléon Bonaparte, avec hérédité
dans sa descendance directe, légitime ou adoptive, et lui donne
le droit de régler l'ordre de succession au trône dans la
famille Bonaparte, ainsi qu'il est prévu par le sénatus-consulte
du 7 novembre 1852. "
Décret
impérial du 2 décembre 1852,
qui promulgue
et déclare Loi de l'État
le sénatus-consulte du 7 novembre 1852,
ratifié par le plébiscite des 21 et 22 novembre.
Vu le sénatus-consulte,
en date du 7 novembre 1852, qui soumet au peuple le plébiscite
dont la teneur suit :
" Le peuple veut
le rétablissement de la dignité impériale dans la
personne de Louis Napoléon Bonaparte, avec hérédité
dans sa descendance directe, légitime ou adoptive, et lui donne
le droit de régler l'ordre de succession au trône dans la
famille Bonaparte, ainsi qu'il est prévu par le sénatus-consulte
du 7 novembre 1852. "
Vu la déclaration du
Corps législatif qui constate :
Que les opérations
du vote ont été partout librement et régulièrement
accomplies ;
Que le recensement général
des suffrages émis sur le projet de plébiscite a donné
sept millions huit cent vingt-quatre mille cent quatre-vingt-neuf (7 824 189)
bulletins portant le mot oui ;
Deux cent cinquante-trois
mille cent quarante-cinq (253 145) bulletins portant le mot non ;
Soixante-trois mille trois
cent vingt-six (63 326) bulletins nuls ; - Avons décrété
et décrétons ce qui suit :
Article 1. - Le sénatus-consulte
du 7 novembre 1852, ratifié par le plébiscite
des 21 et 22 novembre, est promulgué et devient loi de l'État.
Article 2. - Louis Napoléon
Bonaparte est Empereur des Français sous le nom de Napoléon
III.
Sénatus-consulte
du 12 décembre 1852,
sur la liste
civile et la dotation de la couronne.
TITRE PREMIER
Section première. -
De la liste civile de l'empereur et de la dotation de la couronne.
Article 1. - La liste civile
de l'empereur est fixée, à partir du 1er décembre 1852,
pour toute la durée du règne, conformément à
l'article 15 du sénatus-consulte du 28 floréal an XII.
Article 2. - La dotation immobilière
de la couronne comprend les palais, châteaux, maisons, domaines
et manufactures énumérés dans le tableau annexé
au présent sénatus-consulte.
Article 3. - Les biens particuliers
appartenant à l'empereur au moment de son avènement au trône
sont, de plein droit, réunis au domaine de l'État, et font partie
de la dotation de la couronne.
Article 4. - La dotation mobilière
comprend les diamants, perles, pierreries, statues, tableaux, pierres
gravées, musées, bibliothèques et autres monuments
des arts, ainsi que les meubles meublants contenue dans l'hôtel
du Garde-meuble et les divers palais et établissements impériaux.
Article 5. - Il est dressé
par récolement, aux frais du trésor, un état et des
plans des immeubles, ainsi qu'un inventaire descriptif de tous les meubles ;
ceux de ces meubles susceptibles de se détériorer par l'usage
seront estimés. Des doubles de ces actes seront déposés
dans les archives du Sénat.
Article 6. - Les monuments
et objets d'art qui seront placés dans les maisons impériales,
soit aux frais de l'État, soit aux frais de la couronne, seront et demeureront,
dès ce moment, propriété de la couronne.
Section 2. - Conditions
de la jouissance des biens formant la dotation de la couronne.
Article 7. - Les biens meubles
et immeubles de la couronne sont inaliénables et imprescriptibles.
- Ils ne peuvent être donnés, vendus, engagés ni grevés
d'hypothèques. - Néanmoins, les objets inventoriés
avec estimation aux termes de l'article 5, peuvent être aliénés
moyennant remplacement.
Article 8. - L'échange
de biens composant la dotation de la couronne ne peut être autorisé
que par un sénatus-consulte.
Article 9 Les biens de la
couronne et le trésor public ne sont jamais grevés des dettes
de l'empereur ou des pensions par lui accordées.
Article 10. - La durée
des baux, à moins qu'un sénatus-consulte ne l'autorise,
ne peut pas excéder vingt et un ans ; ils ne peuvent être
renouvelés plus de trois ans avant leur expiration.
Article 11. - Les forêts
de la couronne sont soumises aux dispositions du Code forestier, en ce
qui les concerne
- elles sont assujetties à un aménagement régulier.
- Il ne peut y être fait aucune coupe extraordinaire quelconque,
ni aucune coupe des quarts en réserve ou de massifs réservés
par l'aménagement pour croître en futaie, si ce n'est en
vertu d'un sénatus-consulte.
- Les dispositions des articles 2 et 3 du sénatus-consulte du 3 juillet 1852
sont applicables aux biens de la couronne.
Article 12. - Les propriétés
de la couronne ne sont pas soumises à l'impôt ; elles
supportent néanmoins toutes les charges communales et départementales.
- Afin de fixer leurs portions contributives dans ces charges, elles sont
portées sur les rôles, et pour leurs revenus estimatifs,
de la même manière que les propriétés privées.
Article 13. - L'empereur peut
faire aux palais, bâtiments et domaines de la couronne, tous les
changements, additions et démolitions qu'il juge utiles à
leur conservation ou à leur embellissement.
Article 14. - L'entretien
et les réparations de toute nature de meubles et immeubles de la
couronne sont à la charge de la liste civile.
Article 15. - Sauf les conditions
qui précèdent, et l'obligation de fournir caution dont l'empereur
est affranchi, toutes les autres règles du droit civil régissent
les propriétés de la couronne.
TITRE II -
Du douaire de l'impératrice et de la dotation des princes de la
famille impériale
Article 16. - Le douaire de
l'impératrice est fixé par un sénatus-consulte, lors
du mariage de l'empereur.
Article 17. - Une dotation
annuelle de quinze cent mille francs est affectée aux princes et
princesses de la famille impériale. La répartition de cette
dotation est faite par décret de l'empereur.
TITRE III
- Du domaine privé
Article 18. - Le domaine privé
de l'empereur se compose des biens qu'il acquiert à titre gratuit
ou onéreux pendant son règne.
Article 19. - L'empereur peut
disposer de son domaine privé sans être assujetti aux règles
du Code Napoléon sur la quotité disponible.
- S'il n'en a pas disposé, les propriétés du domaine
privé font retour au domaine de l'État et font partie de
la dotation de la couronne.
Article 20. - Les propriétés
du domaine privé sont, sauf l'exception portée en l'article
précédent, soumises à toutes les règles du
Code Napoléon ; elles sont imposées et cadastrées.
TITRE IV -
Des droits des créanciers et des actes judiciaires
Article 21. - Demeurent toujours
réservés sur le domaine privé délaissé
par l'empereur, les droits de ses créanciers et les droits des
employés de sa maison à qui des pensions de retraite ont
été accordées ou sont dues par imputation sur un
fonds de retenues faites sur leurs appointements.
Article 22. - Les actions
concernant la dotation de la couronne et le domaine privé sont
dirigées par ou contre l'administrateur de ce domaine.
- Les unes et les autres sont d'ailleurs instruites et jugées dans
les formes ordinaires, sauf la présente dérogation à
l'article 69 du Code de procédure civile.
Article 23. - Les titres sont
exécutoires seulement sur tous les biens meubles et immeubles composant
le domaine privé.
- Ils ne le sont jamais sur les effets mobiliers renfermés dans
les palais, manufactures et maisons impériales, ni les deniers
de la liste civile.
[Suit le tableau
des immeubles affectés à la dotation de la couronne]
Sénatus-consulte
du 25 décembre 1852,
portant interprétation
et modification de la Constitution du 14 janvier 1852.
Article 1. - L'empereur a
le droit de faire grâce et d'accorder des amnisties.
Article 2. - L'empereur préside,
quand il le juge convenable, le Sénat et le Conseil d'État.
Article 3. - Les traités
de commerce faits en vertu de l'article 6 de la Constitution ont force
de loi pour les modification de tarif qui y sont stipulées.
Article 4. - Tous les travaux
d'utilité publique, notamment ceux désignés par l'article
10 de la loi du 21 avril 1832 et l'article 3 de la loi du 3 mai 1841,
toutes les entreprises d'intérêt général, sont
ordonnés ou autorisés par décrets de l'Empereur.
- Ces décrets sont rendus dans les formes prescrites pour les règlements
d'administration publique.
- Néanmoins, si ces travaux et entreprises ont pour condition des
engagements ou des subsides du Trésor, le crédit devra être
accordé ou l'engagement ratifié par une loi avant la mise
à exécution.
- Lorsqu'il s'agit de travaux exécutés pour le compte de
l'État, et qui ne sont pas de nature à devenir l'objet de concessions,
les crédits peuvent être ouverts, en cas d'urgence, suivant
les formes prescrites pour les crédits extraordinaires : ces
crédits seront soumis au Corps législatif dans sa plus prochaine
session.
Article 5. - Les dispositions
du décret organique du 22 mars 1852 peuvent être
modifiées par des décrets de l'empereur.
Article 6. - Les membres de
la famille impériale appelés éventuellement à
l'hérédité et leurs descendants, portent le nom de
princes français.
- Le fils aîné de l'empereur porte le titre de prince
impérial.
Article 7. - Les princes français
sont membres du Sénat et du Conseil d'État quand ils ont atteint
l'âge de dix-huit ans accomplis. - Ils ne peuvent y siéger
qu'avec l'agrément de l'empereur.
Article 8. - Les actes de
l'état civil de la famille impériale sont reçus par
le ministre d'État, et transmis, sur un ordre de l'empereur, au Sénat,
qui en ordonne la transcription sur ses registres et le dépôt
dans ses archives.
Article 9. - La dotation de
la couronne et la liste civile de l'empereur sont réglées,
pour la durée de chaque règne, par un sénatus-consulte
spécial.
Article 10. - Le nombre de
sénateurs nommés directement par l'empereur ne peut excéder
cent cinquante.
Article 11. - Une dotation
annuelle et viagère de trente mille francs est affectée
à la dignité de sénateur.
Article 12. - Le budget des
dépenses est présenté au Corps législatif
avec ses subdivisions administratives, par chapitres et par articles.
- Il est voté par ministère.
- La répartition par chapitres du crédit accordé
pour chaque ministère est réglée par décret
de l'empereur, rendu en Conseil d'État.
- Des décrets spéciaux, rendus dans la même forme,
peuvent autoriser des virements d'un chapitre à un autre. Cette
disposition est applicable au budget de l'année 1853.
Article 13. - Le compte rendu
prescrit par l'article 42 de la Constitution est soumis, avant sa publication,
à une commission composée du président du Corps législatif
et des présidents de chaque bureau. En cas de partage d'opinions,
la voix du président du Corps législatif est prépondérante.
- Le procès-verbal de la séance, lu à l'Assemblée,
constate seulement les opérations et les votes du Corps législatif.
Article 14. - Les députés
au Corps législatif reçoivent une indemnité qui est
fixée à deux mille cinq cents francs par mois pendant la
durée de chaque session ordinaire ou extraordinaire.
Article 15. - Les officiers
généraux placés dans le cadre de réserve peuvent
être membres du Corps législatif. Ils sont réputés
démissionnaires, s'ils sont employés activement, conformément
à l'article 5 du décret du 1er décembre 1852,
et à l'article 3 de la loi du 4 août 1839.
Article 16. - Le serment prescrit
par l'article 14 de la Constitution est ainsi conçu : " Je
jure obéissance à la Constitution et fidélité
à l'empereur. "
Article 17. - Les articles
2, 9, 11, 15, 16, 17, 18, 19, 22 et 37 de la Constitution du 14 janvier 1852
sont abrogés.
Sénatus-consulte
du 23 avril 1856,
interprétatif
de l'article 22
du sénatus-consulte du 12 décembre 1852,
sur la liste civile et la dotation de la couronne.
Article unique. - L'administrateur
de la dotation de la couronne a seul qualité pour procéder
en justice, soit en demandant, soit en défendant, dans les instances
relatives à la propriété des biens faisant partie
de cette dotation ou du domaine privé.
- Il a seul qualité pour préparer et consentir les actes
relatifs aux échanges du domaine de la couronne, et tous autres
actes conformes aux prescriptions du sénatus-consulte du 12 décembre 1852.
- Il a pareillement qualité, dans les cas prévus par les
articles 13 et 26 de la loi du 3 mai 1841, pour consentir seul
les expropriations et recevoir les indemnités, sous la condition
de faire emploi desdites indemnités, soit en immeubles, soit en
rentes sur l'État, sans toutefois que le débiteur soit tenu de
surveiller le remploi.
Sénatus-consulte
du 17 juillet 1856,
sur la régence
de l'Empire.
TITRE I -
De la régence
Article 1. - L'empereur est
mineur jusqu'à l'âge de dix-huit ans accomplis.
Article 2. - Si l'empereur
monte sur le trône sans que l'empereur son père ait disposé,
par acte rendu public avant son décès, de la régence
de l'Empire, l'impératrice mère est régente et a
la garde de son fils mineur.
Article 3. - L'impératrice-régente
qui convole à de secondes noces perd de plein droit la régence
et la garde de son fils mineur.
Article 4. - A défaut
de l'impératrice, qu'elle ait ou non exercé la régence,
et si l'empereur n'en a autrement disposé par acte rendu public
ou secret, la régence appartient au premier prince français,
et, à son défaut, à l'un des autres princes français
dans l'ordre de l'hérédité de la couronne.
- L'empereur peut, par acte public ou secret, pourvoir aux vacances qui
pourraient se produire dans l'exercice de la régence pendant la
minorité.
Article 5. - S'il n'existe
aucun prince français habile à exercer la régence,
les ministres en fonctions se forment en Conseil et gouvernent les affaires
de l'État jusqu'au moment où le régent est nommé.
- Ils délibèrent à la majorité des voix.
- Immédiatement après la mort de l'empereur, le Sénat
est convoqué par le Conseil de régence.
- Sur la proposition du Conseil de régence, le Sénat élit
le régent parmi les candidats qui lui sont présentés.
- Dans le cas où le Conseil de régence n'aurait pas été
nommé par l'empereur, la convocation et la proposition sont faites
par les ministres formés en Conseil, avec l'adjonction des présidents
en exercice du Sénat, du Corps législatif et du Conseil
d'État.
Article 6. - Le régent
et les membres du Conseil de régence doivent être français
et âgés de vingt et un ans accomplis.
Article 7. - Les actes par
lesquels l'empereur dispose de la régence ou nomme les membres
du Conseil de régence sont adressés au Sénat et déposés
dans ses archives. - Si l'empereur a disposé de la régence
ou nommé les membres du Conseil de régence par un acte secret,
l'ouverture de cet acte est faite immédiatement après la
mort de l'empereur, au Sénat, par le président du Sénat,
en présence des sénateurs qui auront pu répondre
à la convocation, et en présence des ministres et des présidents
du Corps législatif et du Conseil d'État dûment appelés.
Article 8. - Tous les actes
de la régence sont au nom de l'empereur mineur.
Article 9. - Jusqu'à
la majorité de l'empereur, l'impératrice-régente
ou le régent exerce pour l'empereur mineur l'autorité impériale
dans toute sa plénitude, sauf les droits attribués au Conseil
de régence.
- Toutes dispositions législatives qui protègent la personne
de l'empereur sont applicables à l'impératrice-régente
et au régent.
Article 10. - Les fonctions
de l'impératrice-régente ou du régent commencent
au moment du décès de l'empereur.
- Mais si un acte secret concernant la régence a été
adressé au Sénat et déposé dans ses archives,
les fonctions du régent ne commencent qu'après l'ouverture
de cet acte. Jusqu'à ce qu'il y ait été procédé,
le gouvernement des affaires de l'État reste entre les mains des ministres
en fonctions, conformément à l'article 5.
Article 11. - Si l'empereur
mineur décède, laissant un frère héritier
du trône, la régence de l'impératrice ou celle du
régent continue sans aucune formalité nouvelle.
Article 12. - La régence
de l'impératrice cesse si l'ordre d'hérédité
appelle au trône un prince mineur qui ne soit pas son fils. Il est
pourvu dans ce cas, à la régence, conformément à
l'article 4 ou à l'article 5 du présent sénatus-consulte.
Article 13. - Si l'empereur
mineur décède, laissant la couronne à un empereur
mineur d'une autre branche, le régent reste en fonctions jusqu'à
la majorité du nouvel empereur.
Article 14. - Lorsque le prince
français désigné par le présent sénatus-consulte
s'est trouvé empêché par défaut d'âge
ou par toute autre cause légale, d'exercer la régence, au
moment du décès de l'empereur, le régent en exercice
conservera la régence jusqu'à la majorité de l'empereur.
Article 15. - La régence,
autre que celle de l'impératrice, ne confère aucun droit
sur la personne de l'empereur mineur.
- La garde de l'empereur mineur, la surintendance de sa maison, la surveillance
de son éducation sont confiés, à sa mère.
- A défaut de la mère ou d'une personne désignée
par l'empereur, la garde de l'empereur mineur est confiée à
la personne nommée par le Conseil de régence.
- Ne peuvent être nommés ou désignés, ni le
régent, ni ses descendants.
Article 16. - Si l'impératrice-régente
ou le régent n'ont pas prêté serment du vivant de
l'empereur pour l'exercice de la régence, ils le prêtent,
sur l'Évangile, à l'empereur mineur assis sur le trône,
assisté des princes français des membres du Conseil de régence,
des ministres, des grands officiers de la couronne et des grands-croix
de la Légion d'honneur, en présence du Sénat, du
Corps législatif et du Conseil d'État.
- Le serment peut aussi être prêté à l'empereur
mineur en présence des membres du Conseil de régence, des
ministres et des présidents du Sénat, du Corps législatif
et du Conseil d'État.
- Dans ce cas, la prestation de serment est rendue publique par une proclamation
de l'impératrice-régente ou du régent.
Article 17. - Le serment prêté
par l'impératrice-régente ou le régent est conçu
en ces termes :
- " Je jure fidélité à l'empereur ;
je jure de gouverner conformément à la Constitution, aux
sénatus-consultes et aux lois de l'Empire ; de maintenir dans
leur intégrité les droits de la nation et ceux de la dignité
impériale ; de ne consulter, dans l'emploi de mon autorité,
que mon dévouement pour l'empereur et pour la France, et de remettre
fidèlement à l'empereur, au moment de sa majorité,
le pouvoir dont l'exercice m'est confié " Procès-verbal
de cette prestation de serment est dressé par le ministre d'État.
Ce procès-verbal est adressé au Sénat et déposé
dans ses archives.
- L'acte est signé par l'impératrice-régente ou le
régent, par les princes de la famille impériale, par les
membres du Conseil de régence, par les ministres et par les présidents
du Sénat, du Corps législatif et du Conseil d'État.
TITRE II -
Du Conseil de régence
Article 18. - Un Conseil de
Régence est constitué pour toute la durée de la minorité
de l'empereur.
- Il se compose :
- 1° Des princes français désignés par l'empereur ;
- A défaut de désignation par l'empereur, des deux princes
français les plus proches dans l'ordre d'hérédité ;
- 2° Des personnes que l'empereur a désignées par acte
public ou secret.
- Si l'empereur n'a fait aucune désignation, le Sénat nomme
cinq personnes pour faire partie du Conseil de régence.
- En cas de mort ou de démission d'un ou plusieurs membres du Conseil
de régence, autres que les princes français, le Sénat
pourvoit à leur remplacement.
Article 19. - Aucun membre
du Conseil de régence ne peut être éloigné
de ses fonctions par l'impératrice-régente ou le régent.
Article 20. - Le Conseil de
régence est convoqué et présidé par l'impératrice-régente
ou le régent. - L'impératrice-régente ou le régent
peuvent déléguer, pour présider à leur place,
l'un des princes français faisant partie du Conseil de régence
ou l'un des autres membres de ce Conseil.
Article 21. - Le Conseil de
régence délibère nécessairement, et à
la majorité absolue des voix :
- 1° Sur le mariage de l'empereur ;
- 2° Sur les déclarations de guerre, la signature des traités
de paix, d'alliance ou de commerce ;
- 3° Sur les projets de sénatus-consultes organiques.
- En cas de partage, la voix de l'impératrice-régente ou
du régent est prépondérante. Si la présidence
est exercée par délégation, l'impératrice-régente
ou le régent décident.
Article 22. - Le Conseil de
régence a seulement voix consultative sur toutes les autres questions
qui lui sont soumises par l'impératrice-régente ou le régent.
TITRE III
- Dispositions diverses
Article 23. - Durant la régence,
l'administration de la dotation de la couronne continue selon les règles
établies.
- L'emploi des revenus est déterminé dans les formes accoutumées,
sous l'autorité de l'impératrice-régente ou du régent.
Article 24. - Les dépenses
personnelles de l'impératrice-régente ou du régent
et l'entretien de leur maison font partie du budget de la couronne. La
quotité en est fixée par le Conseil de régence.
Article 25. - En cas d'absence
du régent au commencement d'une minorité, sans qu'il y ait
été pourvu par l'empereur avant son décès,
les affaires de l'État sont gouvernées, jusqu'à l'arrivée
du régent, conformément aux dispositions de l'article 5
du présent sénatus-consulte.
Sénatus-consulte
du 2 février 1861,
qui modifie
l'article 42 de la Constitution
L'article 42 de la Constitution
est modifié ainsi qu'il suit :
Les débats des séances
du Sénat et du Corps législatif sont reproduits par la sténographie
et insérés in extenso dans le Journal officiel du
lendemain. - En outre, les comptes rendus de ces séances, rédigés
par des secrétaires-rédacteurs placés sous l'autorité
du président de chaque Assemblée, sont mis, chaque soir,
à la disposition de tous les journaux.
- Le compte rendu des séances du Sénat et du Corps législatif
par les journaux, ou tout autre moyen de publication, ne consistera que
dans la reproduction des débats insérés in extenso
dans le Journal officiel, ou du compte rendu rédigé sous
l'autorité du président, conformément aux paragraphes
précédents.
- Néanmoins, lorsque plusieurs projets ou pétitions auront
été discutés dans une séance, il sera permis
de ne reproduire que les débats relatifs à un seul de ces
projets ou à une seule de ces pétitions. Dans ce cas, si
la discussion se prolonge pendant plusieurs séances, la publication
devra être continuée jusqu'au vote et y compris le vote.
- Le Sénat, sur la demande de cinq membres, pourra décider
qu'il se forme en comité secret.
- L'article 13 du sénatus-consulte du 25 décembre 1852
est abrogé en ce qu'il a de contraire au présent sénatus-consulte.
Sénatus-consulte
du 18 juillet 1866,
qui modifie
la Constitution et notamment les articles 40 et 41.
Article 1. La Constitution
ne peut être discutée par aucun pouvoir public autre que
le Sénat procédant dans les formes qu'elle détermine.
- Une pétition ayant pour objet une modification quelconque ou
une interprétation de la Constitution ne peut être rapportée
en séance générale que si l'examen en a été
autorisé par trois au moins des cinq bureaux du Sénat.
Article 2. - Est interdite
toute discussion ayant pour objet la critique ou la modification de la
Constitution, et publiée ou reproduite soit par la presse périodique,
soit par des affiches, soit par des écrits non périodiques
des dimensions déterminées par le paragraphe 1er de l'article
9 du décret du 17 février 1852.
- Les pétitions ayant pour objet une modification ou une interprétation
de la Constitution ne peuvent être rendues publiques que par la
publication du compte rendu officiel de la séance dans laquelle
elles ont été rapportées.
- Toute infraction aux prescriptions du présent article constitue
une contravention punie d'une amende de cinq cents à dix mille
francs.
Article 3. - L'article 40
de la Constitution du 14 janvier 1852 est modifié ainsi
qu'il suit :
- Art. 40. Les amendements adoptés par la commission chargée
d'examiner un projet de loi sont renvoyés au Conseil d'État
par le président du Corps législatif.
- Les amendements non adoptés par la commission ou par le Conseil
d'État, peuvent être pris en considération par le Corps législatif
et renvoyés à un nouvel examen de la commission.
- Si la commission ne propose pas de rédaction nouvelle, ou si
celle qu'elle propose n'est pas adoptée par le Conseil d'État,
le texte primitif du projet est seul mis en délibération.
Article 4. - La disposition
de l'article 41 de la Constitution du 14 janvier 1852, qui limite
à trois mois la durée des sessions ordinaires du Corps législatif,
est abrogée. Un décret de l'Empereur prononce la clôture
de la session.
- L'indemnité attribuée aux députés au Corps
législatif est fixée à douze mille cinq cents francs
pour chaque session ordinaire, quelle qu'en soit la durée.
- En cas de session extraordinaire, l'indemnité continue à
être réglée conformément à l'article
14 du sénatus-consulte du 25 décembre 1852.
Sénatus-consulte
du 14 mars 1867,
qui modifie
l'article 26 de la Constitution.
L'article 26
de la Constitution est modifié de la manière suivante :
Article 26. - Le Sénat
s'oppose à la promulgation :
- 1° Des lois qui seraient contraires ou qui porteraient atteinte
à la Constitution, à la religion, à la morale, à
la liberté des cultes, à la liberté individuelle,
à l'égalité des citoyens devant la loi, à
l'inviolabilité de la propriété et au principe de
l'inamovibilité de la magistrature ;
- 2° De celles qui pourraient compromettre la défense du territoire.
- Le Sénat peut en outre avant de se prononcer sur la promulgation
d'une loi, décider, par une résolution motivée, que
cette loi sera soumise à une nouvelle délibération
du Corps législatif.
- Cette nouvelle délibération n'aura lieu que dans une session
suivante, à moins que le Sénat n'ait reconnu qu'il y a urgence.
- Lorsque, dans une seconde délibération, le Corps législatif
a adopté la loi sans changements, le Sénat, saisi de nouveau,
délibère uniquement sur la question de savoir s'il s'oppose
ou non à la promulgation de la loi conformément aux nos
1 et 2 du présent article.
Sénatus-consulte
du 8 septembre 1869,
qui modifie
divers articles de la Constitution,
les articles 3 et 5 du sénatus-consulte du 22 décembre 1852
et l'article 1er du sénatus-consulte du 31 décembre 1861.
Article 1. - L'empereur et
le Corps législatif ont l'initiative des lois.
Article 2. - Les ministres
ne dépendent que de l'empereur.
- Ils délibèrent en Conseil sous sa présidence.
- Ils sont responsables.
- Ils ne peuvent être mis en accusation que par le Sénat.
Article 3. - Les ministres
peuvent être membres du Sénat ou du Corps législatif.
- Ils ont entrée dans l'une et l'autre assemblées, et doivent
être entendus toutes les fois qu'ils le demandent.
Article 4. - Les séances
du Sénat sont publiques. La demande de cinq membres suffit pour
qu'il se forme en comité secret.
Article 5. - Le Sénat
peut, en indiquant les modifications dont une loi lui paraît susceptible,
décider qu'elle sera renvoyée à une nouvelle délibération
du Corps législatif. - Il peut, dans tous les cas, s'opposer à
la promulgation de la loi.
- La loi à la promulgation de laquelle le Sénat s'est opposé
ne peut être présentée de nouveau au Corps législatif
dans la même session.
Article 6. - A l'ouverture
de chaque session, le Corps législatif nomme son président,
ses vice-présidents et ses secrétaires.
- Il nomme ses questeurs.
Article 7. - Tout membre du
Sénat ou du Corps législatif a le droit d'adresser une interpellation
au gouvernement.
- Des ordres du jour motivés peuvent être adoptés.
- Le renvoi aux bureaux de l'ordre du jour motivé est de droit
quand il est demandé par le gouvernement.
- Les bureaux nomment une commission sur le rapport sommaire de laquelle
l'Assemblée prononce.
Article 8. - Aucun amendement
ne peut être mis en délibération s'il n'a été
envoyé à la commission chargée d'examiner le projet
de loi et communiqué au gouvernement.
- Lorsque le gouvernement et la commission ne sont pas d'accord, le Conseil
d'État donne son avis et le Corps législatif prononce.
Article 9. - Le budget des
dépenses est présenté au Corps législatif
par chapitres et articles.
- Le budget de chaque ministère est voté par chapitres,
conformément à la nomenclature annexée au présent
sénatus-consulte.
Article 10. - Les modifications
apportées à l'avenir à des tarifs de douanes ou de
postes par des traités internationaux ne seront obligatoires qu'en
vertu d'une loi.
Article 11. Les rapports constitutionnels
actuellement établis entre le gouvernement de l'empereur, le Sénat
et le Corps législatif ne peuvent être modifiés que
par un sénatus-consulte.
- Les rapports réglementaires entre ces pouvoirs sont établis
par décret impérial.
- Le Sénat et le Corps législatif font leur règlement
intérieur.
Article 12. - Sont abrogées
toutes dispositions contraires au présent sénatus-consulte,
et notamment les articles 8 et 13, le deuxième paragraphe de l'article
24, les articles 26 et 40, le cinquième paragraphe de l'article
42, le premier paragraphe de l'article 43, l'article 44 de la Constitution,
les articles 3 et 5 du sénatus-consulte du 25 décembre 1852
et l'article 1er du sénatus-consulte du 31 décembre 1861.
[Suit
la nomenclature annoncée par l'article 9 § 2]
Sénatus-consulte
du 21 mai 1870,
fixant la
Constitution de l'Empire.
Napoléon, par la grâce
de Dieu et la volonté nationale, Empereur des Français,
à tous présents et à venir, salut.
Vu notre décret du
23 avril dernier, qui convoque le Peuple français dans ses
comices pour accepter ou rejeter le projet de plébiscite suivant :
- " Le Peuple approuve
les réformes libérales opérées dans la Constitution
depuis 1860, par l'empereur, avec le concours des grands Corps de l'État,
et ratifie le sénatus-consulte du 20 avril 1870 " ;
- Vu la déclaration
du Corps législatif qui constate :
- Que les opérations du vote ont été régulièrement
accomplies ;
- Que le recensement général des suffrages émis sur
le projet de plébiscite a donné :
- Sept millions trois cent cinquante mille cent quarante-deux (7 350 142)
bulletins portant le mot oui ;
- Quinze cent trente-huit mille huit cent vingt-cinq (1 538 825)
bulletins portant le mot non ;
- Cent douze mille neuf cent soixante-quinze (112 975) bulletins
nuls.
- Avons sanctionné et sanctionnons, promulgué et promulguons
comme loi de l'État le sénatus-consulte adopté par le Sénat,
le 20 avril 1870, et dont la teneur suit :
Sénatus-consulte
fixant la Constitution de l'Empire
TITRE PREMIER
Article 1. - La Constitution
reconnaît, confirme et garantit les grands principes proclamés
en 1789, et qui sont la base du droit public des Français.
TITRE II -
De la dignité impériale et de la régence
Article 2. - La dignité
impériale, rétablie dans la personne de Napoléon
III par le plébiscite des 21-22 novembre 1852, est héréditaire
dans la descendance directe et légitime de Louis Napoléon
Bonaparte, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture,
et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.
Article 3. - Napoléon
III, s'il n'a pas d'enfant mâle, peut adopter les enfants et descendants
légitimes dans la ligne masculine des frères de l'empereur
Napoléon 1er.
- Les formes de l'adoption sont réglées par une loi. - Si,
postérieurement à l'adoption, il survient à Napoléon
III des enfants mâles, ses fils adoptifs ne pourront être
appelés à lui succéder qu'après ses descendants
légitimes.
- L'adoption est interdite aux successeurs de Napoléon III et à
leur descendance.
Article 4. - A défaut
d'héritier légitime direct ou adoptif, sont appelés
au trône le prince Napoléon (Joseph Charles Paul)
et sa descendance directe et légitime, de mâle en mâle,
par ordre de primogéniture, et à l'exclusion perpétuelle
des femmes et de leur descendance.
Article 5. - A défaut
d'héritier légitime ou d'héritier adoptif de Napoléon
III et des successeurs en ligne collatérale qui prennent leurs
droits dans l'article précédent, le Peuple nomme l'empereur
et règle, dans sa famille, l'ordre héréditaire, de
mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des
femmes et de leur descendance.
- Le projet de plébiscite est successivement délibéré
par le Sénat et par le Corps législatif, sur la proposition
des ministres formés en Conseil de gouvernement.
- Jusqu'au moment où l'élection du nouvel empereur est consommée,
les affaires de l'État sont gouvernées par les ministres
en fonctions, qui se forment en Conseil de gouvernement et délibèrent
à la majorité des voix.
Article 6. - Les membres de
la famille de Napoléon III appelés éventuellement
à l'hérédité et leur descendance des deux
sexes font partie de la famille impériale.
- Ils ne peuvent se marier sans l'autorisation de l'empereur. Le mariage
fait sans cette autorisation emporte privation de tout droit à
l'hérédité, tant pour celui qui l'a contracté
que pour ses descendants.
- Néanmoins, s'il n'existe pas d'enfants de ce mariage, en cas
de dissolution pour cause de décès, le prince qui l'aurait
contracté recouvre ses droits à l'hérédité.
- L'empereur fixe les titres et les conditions des autres membres de sa
famille.
- Il a pleine autorité sur eux ; il règle leurs devoirs
et leurs droits par des statuts qui ont force de loi.
Article 7. - La régence
de l'Empire est réglée par le sénatus-consulte du
17 juillet 1856.
Article 8. - Les membres de
la famille impériale appelés éventuellement à
l'hérédité prennent le titre de princes français.
- Le fils aîné de l'empereur porte le titre de prince impérial
Article 9. - Les princes français
sont membres du Sénat et du Conseil d'État quand ils ont atteint
l'âge de dix-huit ans accomplis. Ils ne peuvent y siéger
qu'avec l'agrément de l'empereur.
TITRE III
- Formes du gouvernement de l'empereur
Article 10. - L'empereur gouverne
avec le concours des ministres, du Sénat, du Corps législatif
et du Conseil d'État.
ART. 11. - La
puissance législative s'exerce collectivement par l'empereur, le
Sénat et le Corps législatif.
Article 12. - L'initiative
des lois appartient à l'empereur, au Sénat et au Corps législatif.
- Les projets de loi émanés de l'initiative de l'empereur
peuvent, à son choix, être portés, soit au Sénat,
soit au Corps législatif
- Néanmoins, toute loi d'impôt doit être d'abord votée
par le Corps législatif.
TITRE IV -
De l'empereur
Article 13. - L'empereur est
responsable devant le Peuple français, auquel il a toujours le
droit de faire appel.
Article 14. - L'empereur est
le chef de l'État. Il commande les forces de terre et de mer, déclare
la guerre, fait les traités de paix, d'alliance et de commerce,
nomme à tous les emplois, fait les règlements et décrets
nécessaires pour l'exécution des lois.
Article 15. - La justice se
rend en son nom. - L'inamovibilité de la magistrature est maintenue.
Article 16. - L'empereur a
le droit de faire grâce et d'accorder des amnisties.
Article 17. - Il sanctionne
et promulgue les lois.
Article 18. - Les modifications
apportées à l'avenir à des tarifs de douanes ou de
poste par des traités internationaux ne seront obligatoires qu'en
vertu d'une loi.
Article 19. - L'empereur nomme
et révoque les ministres. - Les ministres délibèrent
en conseil sous la présidence de l'empereur. - Ils sont responsables.
Article 20. - Les ministres
peuvent être membre du Sénat et du Corps législatif.
- Ils ont entrée dans l'une et dans l'autre assemblée, et
doivent être entendus toutes les fois qu'ils le demandent.
Article 21. - Les ministres,
les membres du Sénat, du Corps législatif et du Conseil
d'État, les officiers de terre et de mer, les magistrats et les fonctionnaires
publics prêtent le serment ainsi conçu : " Je
jure obéissance à la Constitution et fidélité
à l'empereur. "
Article 22. - Les sénatus-consultes,
sur la dotation de la couronne et la liste civile, des 12 décembre 1852
et 23 avril 1856, demeurent en vigueur. - Toutefois, il sera
statué par une loi dans les cas prévus par les articles
8, 11 et 16 du sénatus-consulte du 12 décembre 1852.
- A l'avenir, la dotation de la couronne et la liste civile seront fixées,
pour toute la durée du règne, par la législature
qui se réunira après l'avènement de l'empereur.
TITRE V -
Du Sénat
Article 23. - Le Sénat
se compose : - 1° Des cardinaux, des maréchaux, des amiraux ;
- 2° Des citoyens que l'empereur élève à la dignité
de sénateur.
Article 24. - Les décrets
de nomination des sénateurs sont individuels. Ils mentionnent les
services et indiquent les titres sur lesquels la nomination est fondée.
- Aucune autre condition ne peut être imposée au choix de
l'empereur.
Article 25. - Les sénateurs
sont inamovibles et à vie.
Article 26. - Le nombre des
sénateurs peut être porté aux deux tiers de celui
des membres du Corps législatif, y compris les sénateurs
de droit.
- L'empereur ne peut nommer plus de 20 sénateurs par an.
Article 27. - Le président
et les vice-présidents du Sénat sont nommés par l'empereur
et choisis parmi les sénateurs. - Ils sont nommés pour un
an.
Article 28. - L'empereur convoque
et proroge le Sénat. - Il prononce la clôture des sessions.
Article 29. - Les séances
du Sénat sont publiques.
- Néanmoins, le Sénat pourra se former en comité
secret dans les cas et suivant les conditions déterminées
par son règlement.
Article 30. - Le Sénat
discute et vote les projets de lois.
TITRE VI -
Du Corps législatif
Article 31. - Les députés
sont élus par le suffrage universel, sans scrutin de liste.
Article 32. - Ils sont nommés
pour une durée qui ne peut être moindre de six ans.
Article 33. - Le Corps législatif
discute et vote les projets de lois.
Article 34. - Le Corps législatif
élit, à l'ouverture de chaque session, les membres qui composent
son bureau.
Article 35. - L'empereur convoque,
ajourne, proroge et dissout le Corps législatif
- En cas de dissolution, l'empereur doit en convoquer un nouveau dans
un délai de six mois.
- L'empereur prononce la clôture des sessions du Corps législatif.
Article 36. - Les séances
du Corps législatif sont publiques.
- Néanmoins, le Corps législatif pourra se former en comité
secret dans les cas et suivant les conditions déterminées
par son règlement.
TITRE VII
- Du Conseil d'État
Article 37. - Le Conseil d'État
est chargé, sous la direction de l'empereur, de rédiger
les projets de lois et les règlements d'administration publique,
et de résoudre les difficultés qui s'élèvent
en matière d'administration.
Article 38. - Le Conseil soutient,
au nom du gouvernement, la discussion des projets de loi devant le Sénat
et le Corps législatif.
Article 39. - Les conseillers
d'État sont nommés par l'empereur et révocables par lui.
Article 40. - Les ministres
ont rang, séance et voix délibérative au Conseil
d'État.
TITRE VIII
- Dispositions générales
Article 41. - Le droit de
pétition s'exerce auprès du Sénat et du Corps législatif.
Article 42. - Sont abrogés
les articles 19, 25, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33 de la Constitution du
14 janvier 1852 ; l'article 2 du sénatus-consulte
du 25 décembre 1852 ; les articles 5 et 8 du sénatus-consulte
du 8 septembre 1869, et toutes les dispositions contraires à
la présente Constitution.
Article 43. - Les dispositions
de la Constitution du 14 janvier 1852 et celles des sénatus-consultes
promulgués depuis cette époque qui ne sont pas comprises
dans la présente Constitution et qui ne sont pas abrogées
par l'article précédent ont force de loi.
Article 44. - La Constitution
ne peut être modifiée que par le Peuple, sur la proposition
de l'empereur.
Article 45. - Les changements
et additions apportés au plébiscite des 20 et 21 décembre 1851,
par la présente Constitution, seront soumis à l'approbation
du Peuple, dans les formes déterminées par les décrets
des 2 et 4 décembre 1851 et 7 novembre 1852.
- Toutefois, le scrutin ne durera qu'un seul jour.
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