SÉNATUS-CONSULTE ORGANIQUE DU 28 FLORÉAL
AN XII
(18 mai 1804)
TITRE I
Article 1. - Le Gouvernement de la République est confié
à un Empereur, qui prend le titre d'Empereur des Français.
- La justice se rend, au nom de l'Empereur, par les officiers qu'il institue.
Article 2. - Napoléon Bonaparte, Premier consul actuel de la République,
est Empereur des Français.
TITRE II - De l'hérédité
Article 3. - La dignité impériale est héréditaire
dans la descendance directe, naturelle et légitime de Napoléon
Bonaparte, de mâle en mâle, par ordre de primogéniture,
et à l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.
Article 4. - Napoléon Bonaparte peut adopter les enfants ou petits-enfants
de ses frères, pourvu qu'ils aient atteint l'âge de dix-huit
ans accomplis, et que lui-même n'ait point d'enfants mâles
au moment de l'adoption. - Ses fils adoptifs entrent dans la ligne de
sa descendance directe. - Si, postérieurement à l'adoption,
il lui survient des enfants mâles, ses fils adoptifs ne peuvent
être appelés qu'après les descendants naturels et
légitimes. - L'adoption est interdite aux successeurs de Napoléon
Bonaparte et à leurs descendants.
Article 5. - A défaut d'héritier naturel et légitime
ou d'héritier adoptif de Napoléon Bonaparte, la dignité
impériale est dévolue et déférée à
Joseph Bonaparte et à ses descendants naturels et légitimes,
par ordre de primogéniture, et de mâle en mâle, à
l'exclusion perpétuelle des femmes et de leur descendance.
Article 6. - A défaut de Joseph Bonaparte et de ses descendants
mâles, la dignité impériale est dévolue et
déférée à Louis Bonaparte et à
ses descendants naturels et légitimes, par ordre de primogéniture,
et de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle
des femmes et de leur descendance.
Article 7. - A défaut d'héritier naturel et légitime
et d'héritier adoptif de Napoléon Bonaparte ; - A défaut
d'héritiers naturels et légitimes de Joseph Bonaparte
et de ses descendants mâles ; - De Louis Bonaparte et
de ses descendants mâles ; - Un sénatus-consulte organique,
proposé au Sénat par les titulaires des grandes dignités
de l'Empire, et soumis à l'acceptation du peuple, nomme l'Empereur,
et règle dans sa famille l'ordre de l'hérédité,
de mâle en mâle, à l'exclusion perpétuelle des
femmes et de leur descendance.
Article 8. - Jusqu'au moment où l'élection du nouvel Empereur
est consommée, les affaires de l'État sont gouvernées
par les ministres, qui se forment en conseil de gouvernement, et qui délibèrent
à la majorité des voix. Le secrétaire d'État
tient le registre des délibérations.
TITRE III - De la famille impériale
Article 9. - Les membres de la famille impériale, dans l'ordre
de l'hérédité, portent le titre de Princes français.
- Le fils aîné de l'Empereur porte celui de Prince impérial.
Article 10. - Un sénatus-consulte règle le mode de l'éducation
des princes français.
Article 11. - Ils sont membres du Sénat et du Conseil d'État,
lorsqu'ils ont atteint leur dix-huitième année.
Article 12. - Ils ne peuvent se marier sans l'autorisation de l'Empereur.
- Le mariage d'un prince Français, fait sans l'autorisation de
l'Empereur, emporte privation de tout droit à l'hérédité,
tant pour celui qui l'a contracté que pour ses descendants. - Néanmoins,
s'il n'existe point d'enfant de ce mariage, et qu'il vienne à se
dissoudre, le prince qui l'avait contracté recouvre ses droits
à l'hérédité.
Article 13. - Les actes qui constatent la naissance, les mariages et
les décès des membres de la famille impériale, sont
transmis sur un ordre de l'Empereur, au Sénat, qui en ordonne la
transcription sur ses registres et le dépôt dans ses archives.
Article 14. - Napoléon Bonaparte établit par des statuts
auxquels ses successeurs sont tenus de se conformer, - 1° Les devoirs
des individus de tout sexe, membres de la famille impériale, envers
l'Empereur ; - 2° Une organisation du palais impérial
conforme à la dignité du trône et à la grandeur
de la nation.
Article 15. - La liste civile reste réglée ainsi qu'elle
l'a été par les articles 1 et 4 du décret du 16
mai 1791. - Les princes français Joseph et Louis
Bonaparte, et à l'avenir les fils puînés naturels
et légitimes de l'Empereur, seront traités conformément
aux articles 1, 10, 11, 12 et 13 du décret du 21 décembre 1790.
- L'Empereur pourra fixer le douaire de l'impératrice et l'assigner
sur la liste civile ; ses successeurs ne pourront rien changer aux
dispositions qu'il aura faites à cet égard.
Article 16. - L'Empereur visite les départements : en conséquence,
des palais impériaux sont établis aux quatre points principaux
de l'Empire. - Ces palais sont désignés et leurs dépendances
déterminées par une loi.
TITRE IV - De la régence
Article 17. - L'Empereur est mineur jusqu'à l'âge de dix-huit
ans accomplis ; pendant sa minorité, il y a un régent
de l'Empire.
Article 18. - Le régent doit être âgé au moins
de vingt-cinq ans accompli. - Les femmes sont exclues de la régence.
Article 19. - l'Empereur désigne le régent parmi les princes
français, avant l'âge exigé par l'article précédent ;
et à leur défaut, parmi les titulaires des grandes dignités
de l'Empire.
Article 20. - A défaut de désignation de la part de l'Empereur,
la régence est déférée au prince le plus proche
en degré, dans l'ordre de l'hérédité, ayant
vingt-cinq ans accomplis.
Article 21. - Si, l'Empereur n'ayant pas désigné le régent,
aucun des princes français n'est âgé de vingt-cinq
ans accomplis, le Sénat élit le régent parmi les
titulaires des grandes dignités de l'Empire.
Article 22. - Si, à raison de la minorité d'âge du
prince appelé à la régence dans l'ordre de l'hérédité,
elle a été déférée à un parent
plus éloigné, ou à l'un des titulaires des grandes
dignités de l'Empire, le régent entré en exercice
continue ses fonctions jusqu'à la majorité de l'Empereur.
Article 23. - Aucun sénatus-consulte organique ne peut être
rendu pendant la régence, ni avant la fin de la troisième
année qui suit la majorité.
Article 24. - Le régent exerce Jusqu'à la majorité
de l'Empereur toutes les attributions de la dignité impériale.
- Néanmoins il ne peut nommer ni aux grandes dignités de
l'Empire, ni aux places de grands officiers qui se trouveraient vacantes
à l'époque de la régence, ou qui viendraient à
vaquer pendant la minorité, ni user de la prérogative réservée
à l'Empereur d'élever des citoyens au rang de sénateur.
- Il ne peut révoquer ni le grand-juge, ni le secrétaire
d'État.
Article 25. - Il n'est pas personnellement responsable des actes de son
administration.
Article 26. - Tous les actes de la régence sont au nom de l'Empereur
mineur.
Article 27. - Le régent ne propose aucun projet de loi ou de sénatus-consulte,
et n'adopte aucun règlement d'administration publique, qu'après
avoir pris l'avis du conseil de régence, composé des titulaires
des grandes dignités de l'Empire. - Il ne peut déclarer
la guerre, ni signer des traités de paix, d'alliance ou de commerce,
qu'après en avoir délibéré dans le conseil
de régence, dont les membres, pour ce seul cas, ont voix délibérative.
La délibération a lieu à la majorité des voix ;
et s'il y a partage, elle passe à l'avis du régent. - Le
ministre des Relations extérieures prend séance au conseil
de régence, lorsque ce conseil délibère sur des objets
relatifs à son département. - Le grand-juge, ministre de
la justice, y peut être appelé par l'ordre du régent.
- Le secrétaire d'État tient le registre des délibérations.
Article 28. - La régence ne confère aucun droit sur la
personne de l'Empereur mineur.
Article 29. - Le traitement du régent est fixé au quart
du montant de la liste civile.
Article 30. - La garde de l'Empereur mineur est confiée à
sa mère et à son défaut au prince désigné
à cet effet par le prédécesseur de l'Empereur mineur.
- A défaut de la mère de l'Empereur mineur, et d'un prince
désigné par l'Empereur, le Sénat confie la garde
de l'Empereur mineur à l'un des titulaires des grandes dignités
de l'Empire. - Ne peuvent être élus pour la garde de l'Empereur
mineur, ni le régent et ses descendants, ni les femmes.
Article 31. - Dans le cas où Napoléon Bonaparte usera de
la faculté qui lui est conférée par l'article 4,
titre II, l'acte d'adoption sera fait en présence des titulaires
des grandes dignités de l'Empire, reçu par le secrétaire
d'État, et transmis aussitôt au Sénat pour être
transcrit sur ses registres et déposé dans ses archives.
- Lorsque l'Empereur désigne, soit un régent pour la minorité,
soit un prince pour la garde d'un Empereur mineur, les mêmes formalités
sont observées. - Les actes de désignation, soit d'un régent
pour la minorité, soit d'un prince pour la garde d'un Empereur
mineur, sont révocables à volonté par l'Empereur.
- Tout acte d'adoption, de désignation, ou de révocation
de désignation, qui n'aura pas été transcrit sur
les registres du Sénat avant le décès de l'Empereur,
sera nul et de nul effet.
TITRE V - Des grandes dignités de l'Empire
Article 32. - Les grandes dignités de l'Empire sont celles, -
De grand-électeur, - D'archichancelier de l'Empire, - D'archichancelier
d'État, - D'architrésorier, - De connétable, - De
grand-amiral.
Article 33. - Les titulaires des grandes dignités de l'Empire
sont nommés par l'Empereur. - Ils jouissent des mêmes honneurs
que les princes français, et prennent rang immédiatement
après eux. - L'époque de leur réception détermine
le rang qu'ils occupent respectivement.
Article 34. - Les grandes dignités de l'Empire sont inamovibles.
Article 35. - Les titulaires des grandes dignités de l'Empire
sont sénateurs et conseillers d'État.
Article 36. - Ils forment le grand conseil de l'Empereur ; - Ils
sont membres du conseil privé ; - Ils composent le grand conseil
de la Légion d'honneur. - Les membres actuels du grand conseil
de la Légion d'honneur conservent, pour la durée de leur
vie, leurs titres, fonctions et prérogatives.
Article 37. - Le Sénat et le Conseil d'État sont présidés
par l'Empereur. - Lorsque l'Empereur ne préside pas le Sénat
ou le Conseil d'État, il désigne celui des titulaires des
grandes dignités de l'Empire qui doit présider.
Article 38. - Tous les actes du Sénat et du Corps législatif
sont rendus au nom de l'Empereur, et promulgués ou publiés
sous le sceau impérial.
Article 39. - Le grand-électeur fait les fonctions de chancelier
:
- 1° Pour la convocation du Corps législatif, des collèges
électoraux et des assemblées de canton ;
2° pour la promulgation des sénatus-consultes portant dissolution,
soit du Corps législatif, soit des collèges électoraux.
- Le grand-électeur préside en l'absence de l'Empereur,
lorsque le Sénat procède aux nominations des sénateurs,
des législateurs et des tribuns. - Il peut résider au palais
du Sénat. - Il porte à la connaissance de l'Empereur les
réclamations formées par les collèges électoraux
ou par les assemblées de canton pour la conservation de leurs prérogatives.
- Lorsqu'un membre d'un collège électoral est dénoncé,
conformément à l'article 21 du sénatus-consulte organique
du 16 thermidor an X, comme s'étant permis quelque acte contraire
à l'honneur ou à la patrie, le grand-électeur invite
le collège à manifester son voeu. Il porte le voeu du collège
à la connaissance de l'Empereur. - Le grand-électeur présente
les membres du Sénat, du Conseil d'État, du Corps législatif
et du Tribunat, au serment qu'ils prêtent entre les mains de l'Empereur.
- Il reçoit le serment des présidents des collèges
électoraux de département et des assemblées de canton.
- Il présente les députations solennelles du Sénat,
du Conseil d'État, du Corps législatif, du Tribunat et des
collèges électoraux, lorsqu'elles sont admises à
l'audience de l'Empereur.
Article 40. - L'archichancelier de l'Empire fait les fonctions de chancelier
pour la promulgation des sénatus-consultes organiques et des lois.
- Il fait également celles de chancelier du palais impérial.
- Il est présent au travail annuel dans lequel le grand-juge ministre
de la Justice rend compte à l'Empereur, des abus qui peuvent s'être
introduits dans l'administration de la justice soit civile, soit criminelle.
- Il préside la Haute Cour impériale. - Il préside
les sections réunies du Conseil d'État et du Tribunat conformément
à l'article 95, titre XI. - Il est présent à la célébration
des mariages et à la naissance des princes ; au couronnement
et aux obsèques de l'Empereur. Il signe le procès-verbal
que dresse le secrétaire d'État. - Il présente les
titulaires des grandes dignités de l'Empire, les ministres et le
secrétaire d'État, les grands officiers civils de la couronne
et le premier président de la Cour de cassation, au serment qu'ils
prêtent entre les mains de l'Empereur. - Il reçoit le serment
des membres et du parquet de la Cour de cassation, des présidents
et procureurs généraux des cours d'appel et des cours criminelles.
- Il présente les députations solennelles et les membres
des cours de justice admis à l'audience de l'Empereur. - Il signe
et scelle les commissions et brevets des membres des cours de justice
et des officiers ministériels ; il scelle les commissions
et brevets des fonctions civiles administratives et les autres actes qui
seront désignés dans le règlement portant organisation
du sceau.
Article 41. - L'archichancelier d'État fait les fonctions de chancelier
pour la promulgation des traités de paix et d'alliance et pour
les déclarations de guerre. - Il présente à l'Empereur
et signe les lettres de créance et la correspondance d'étiquette
avec les différentes cours de l'Europe, rédigées
suivant les formes du protocole impérial, dont il est le gardien.
- Il est présent au travail annuel dans lequel le ministre des
Relations extérieures rend compte à l'Empereur de la situation
politique de l'État. - Il présente les ambassadeurs et ministres
de l'Empereur dans les cours étrangères, au serment qu'ils
prêtent entre les mains de sa Majesté impériale. -
Il reçoit le serment des résidents, chargés d'affaires,
secrétaires d'ambassade et de légation et des commissaires
généraux et commissaires des relations commerciales. - Il
présente les ambassades extraordinaires et les ambassadeurs et
ministres français et étrangers.
Article 42. - L'architrésorier est présent au travail annuel
dans lequel les ministres des Finances et du Trésor public rendent
à l'Empereur les comptes des recettes et des dépenses de
L'État, et exposent leurs vues sur les besoins des finances de
l'Empire. - Les comptes des recettes et des dépenses annuelles,
avant d'être présentés à l'Empereur, sont revêtus
de son visa. - Il reçoit, tous les trois mois, le compte des travaux
de la comptabilité nationale, et tous les ans le résultat
général et les vues de réforme et d'amélioration
dans les différentes parties de la comptabilité ; il
les porte à la connaissance de l'Empereur. - Il arrête, tous
les ans, le grand-livre de la dette publique. - Il signe les brevets des
pensions civiles. - Il préside les sections réunies du Conseil
d'État et du Tribunat, conformément à l'article 95,
titre XI. - Il reçoit le serment des membres de la comptabilité
nationale, des administrations de finances, et des principaux agents du
trésor public. - Il présente les députations de la
comptabilité nationale et des administrations de finances admises
à l'audience de l'Empereur.
Article 43. - Le connétable est présent au travail annuel
dans lequel le ministre de la Guerre et le directeur de l'administration
de la guerre rendent compte à l'Empereur, des dispositions à
prendre pour compléter le système de défense des
frontières, l'entretien, la réparation et l'approvisionnement
des places. - Il pose la première pierre des places fortes dont
la construction est ordonnée. - Il est gouverneur des écoles
militaires. - Lorsque l'Empereur ne remet pas en personne les drapeaux
aux corps de l'armée, ils leur sont remis en son nom par le connétable.
- En l'absence de l'Empereur, le connétable passe les grandes revues
de la garde impériale. - Lorsqu'un général d'armée
est prévenu d'un délit spécifié au code pénal
militaire, le connétable peut présider le conseil de guerre
qui doit juger. - Il présente les maréchaux de l'Empire,
les colonels généraux, les inspecteurs généraux,
les officiers généraux et les colonels de toutes les armes,
au serment qu'ils prêtent entre les mains de l'Empereur. - Il reçoit
le serment des majors, chefs de bataillon et d'escadron de toutes armes.
- Il installe les maréchaux de l'Empire. - Il présente les
officiers généraux et les colonels, majors, chefs de bataillon
et d'escadron de toutes les armes, lorsqu'ils sont admis à l'audience
de l'Empereur. Il signe les brevets de l'armée et ceux des militaires
pensionnaires de l'État.
Article 44. - Le grand-amiral est présent au travail annuel dans
lequel le ministre de la marine rend compte à l'Empereur, de l'état
des constructions navales, des arsenaux et des approvisionnements. - Il
reçoit annuellement et présente à l'Empereur les
comptes de la caisse des invalides de la marine. - Lorsqu'un amiral, vice-amiral
ou contre-amiral commandant en chef une armée navale, est prévenu
d'un délit spécifié au code pénal maritime,
le grand-amiral peut présider la cour martiale qui doit juger.
- Il présente les amiraux, les vice-amiraux, les contre-amiraux
et les capitaines de vaisseau, au serment qu'ils prêtent entre les
mains de l'Empereur. - Il reçoit le serment des membres du conseil
des prises et des capitaines de frégate. - Il présente les
amiraux, les vice-amiraux, les contre-amiraux, les capitaines de vaisseau
et de frégate, et les membres du conseil des prises, lorsqu'ils
sont admis à l'audience de l'Empereur. - Il signe les brevets des
officiers de l'armée navale et ceux des marins pensionnaires de
L'État.
Article 45. - Chaque titulaire des grandes dignités de l'Empire
préside un collège électoral de département.
- Le collège électoral séant à Bruxelles est
présidé par le grand-électeur. - Le collège
électoral séant à Bordeaux est présidé
par l'archichancelier de l'Empire. - Le collège électoral
séant à Nantes est présidé par l'archichancelier
d'État. - Le collège électoral séant à
Lyon est présidé par l'architrésorier de l'Empire.
- Le collège électoral séant à Turin est présidé
par le connétable. - Le collège électoral séant
à Marseille est présidé par le grand-amiral.
Article 46. - Chaque titulaire des grandes dignités de l'Empire
reçoit annuellement, à titre de traitement fixe, le tiers
de la somme affectée aux princes, conformément au décret
du 21 décembre 1790.
Article 47. - Un statut de l'Empereur règle les fonctions des
titulaires des grandes dignités de l'Empire auprès de l'Empereur,
et détermine leur costume dans les grandes cérémonies.
Les successeurs de l'Empereur ne peuvent déroger à ce statut
que par un sénatus-consulte.
TITRE VI - Des grands officiers de l'Empire
Article 48. - Les grands officiers de l'Empire sont - 1° Des maréchaux
de l'Empire, choisis parmi les généraux les plus distingués.
- Leur nombre n'excède pas celui de seize. - Ne font point partie
de ce nombre les maréchaux de l'Empire qui sont sénateurs.
- 2° Huit inspecteurs et colonels généraux de l'artillerie
et du génie, des troupes à cheval et de la marine. - 3°
Des grands officiers civils de la couronne, tels qu'ils seront institués
par les statuts de l'Empereur.
Article 49. - Les places des grands officiers sont inamovibles.
Article 50. - Chacun des grands officiers de l'Empire préside
un collège électoral qui lui est spécialement affecté
au moment de sa nomination.
Article 51. - Si, par un ordre de l'Empereur, ou par toute autre cause
que ce puisse être, un titulaire d'une grande dignité de
l'Empire ou un grand officier vient à cesser ses fonctions, il
conserve son titre, son rang, ses prérogatives, et la moitié
de son traitement : il ne les perd que par un jugement de la Haute
Cour impériale.
TITRE VII - Des serments
Article 52. - Dans les deux ans qui suivent son avènement, ou
sa majorité, l'Empereur, accompagné - Des titulaires des
grandes dignités de l'Empire, - Des ministres, - Des grands officiers
de l'Empire, - Prête serment au peuple français sur l'Evangile,
et en présence - Du Sénat, - Du Conseil d'État, -
Du Corps législatif, - Du Tribunat, - De la Cour de cassation,
- Des archevêques, - Des évêques, - Des grands officiers
de la Légion d'honneur, - De la comptabilité nationale,
- Des présidents des cours d'appel, - Des présidents des
collèges électoraux, - Des présidents des consistoires,
- Et des maires des trente-six principales villes de l'Empire. - Le secrétaire
d'État dresse procès-verbal de la prestation du serment.
Article 53. - Le serment de l'Empereur est ainsi conçu :
- " Je jure de maintenir l'intégrité du territoire
de la République, de respecter et de faire respecter les lois du
concordat et la liberté des cultes ; de respecter et faire
respecter l'égalité des droits, la liberté politique
et civile, l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux ;
de ne lever aucun impôt, de n'établir aucune taxe qu'en vertu
de la loi ; de maintenir l'institution de la Légion d'honneur ;
de gouverner dans la seule vue de l'intérêt, du bonheur et
de la gloire du peuple français. "
Article 54. - Avant de commencer l'exercice de ses fonctions, le régent
accompagné - Des titulaires des grandes dignités de l'Empire,
- Des ministres, - Des grands officiers de l'Empire, - Prête serment
sur l'Evangile, et en présence - Du Sénat, - Du Conseil
d'État, - Du président et des questeurs du Corps législatif,
- Du président et des questeurs du Tribunat, - Et des grands officiers
de la Légion d'honneur. - Le secrétaire d'État dresse
procès-verbal de la prestation du serment.
Article 55. - Le serment du régent est conçu en ces termes :
" Je jure d'administrer les affaires de l'État, conformément
aux constitutions de l'Empire, aux sénatus-consultes et aux lois ;
de maintenir dans toute leur intégrité le territoire de
la République, les droits de la nation et ceux de la dignité
impériale, et de remettre fidèlement à l'Empereur,
au moment de sa majorité, le pouvoir dont l'exercice m'est confié. "
Article 56. - Les titulaires des grandes dignités de l'Empire,
les ministres et le secrétaire d'État, les grands officiers,
les membres du Sénat, du Conseil d'État, du Corps législatif,
du Tribunat, des collèges électoraux et des assemblées
de canton, prêtent serment en ces termes : - " Je
jure obéissance aux constitutions de l'Empire et fidélité
à l'Empereur. " - Les fonctionnaires publics civils et
judiciaires, et les officiers et les soldats de l'armée de terre
et de mer, prêtent le même serment.
TITRE VIII - Du Sénat
Article 57. - Le Sénat se compose, - 1° Des princes français
ayant atteint leur dix-huitième année ; - 2° Des
titulaires des grandes dignités de l'Empire ; - 3° Des
quatre-vingts membres nommés sur la présentation de candidats
choisis par l'Empereur sur les listes formées par les collèges
électoraux de département ; - 4° Des citoyens que
l'Empereur juge convenable d'élever à la dignité
de sénateur. - Dans le cas où le nombre de sénateurs
excédera celui qui a été fixé par l'article
63 du sénatus-consulte organique du 16 thermidor an X, il
sera, à cet égard, pourvu par une loi à l'exécution
de l'article 17 du sénatus-consulte du 14 nivôse an XI.
Article 58. - Le président du Sénat est nommé par
l'Empereur, et choisi parmi les sénateurs. - Ses fonctions durent
un an.
Article 59. - Il convoque le Sénat sur un ordre du propre mouvement
de l'Empereur, et sur la demande, ou des commissions dont il sera parlé
ci-après, articles 60 et 64, ou d'un sénateur conformément
aux dispositions de l'article 70, ou d'un officier du Sénat, pour
les affaires intérieures du corps. - Il rend compte à l'Empereur
des convocations faites sur la demande des commissions ou d'un sénateur,
de leur objet, et des résultats des délibérations
du Sénat.
Article 60. - Une commission de sept membres nommés par le Sénat,
et choisis dans son sein, prend connaissance, sur la communication qui
lui en est donnée par les ministres, des arrestations effectuées
conformément à l'article 46 de la Constitution lorsque les
personnes arrêtées n'ont pas été traduites
devant les tribunaux dans les dix jours de leur arrestation. - Cette commission
est appelée commission sénatoriale de la liberté
individuelle.
Article 61. - Toutes les personnes arrêtées et non mises
en jugement après les dix jours de leur arrestation, peuvent recourir
directement, par elles, leurs parents ou leurs représentants, et
par voie de pétition, à la commission sénatoriale
de la liberté individuelle.
Article 62. - Lorsque la commission estime que la détention prolongée
au-delà des dix jours de l'arrestation n'est pas justifiée
par l'intérêt de L'État, elle invite le ministre qui
a ordonné l'arrestation à faire mettre en liberté
la personne détenue, ou à la renvoyer devant les tribunaux
ordinaires.
Article 63. - Si, après trois invitations consécutives,
renouvelées dans l'espace d'un mois, la personne détenue
n'est pas mise en liberté ou renvoyée devant les tribunaux
ordinaires, la commission demande une assemblée du Sénat,
qui est convoqué par le président, et qui rend, s'il y a
lieu, la déclaration suivante : - " Il y a de fortes
présomptions que N. est détenu arbitrairement. "
- On procède ensuite conformément aux dispositions de l'article
112, titre XIII, de la Haute Cour impériale.
Article 64. - Une commission de sept membres nommés par le Sénat
et choisis dans son sein, est chargée de veiller à la liberté
de la presse. - Ne sont point compris dans son attribution les ouvrages
qui s'impriment et se distribuent par abonnement et à des époques
périodiques. - Cette commission est appelée commission
sénatoriale de la liberté de la presse.
Article 65. - Les auteurs, imprimeurs ou libraires qui se croient fondés
à se plaindre d'empêchements mis à l'impression ou
à la circulation d'un ouvrage, peuvent recourir directement et
par voie de pétition à la commission sénatoriale
de la liberté de la presse.
Article 66. - Lorsque la commission estime que les empêchements
ne sont pas justifiés par l'intérêt de l'État,
elle invite le ministre qui a donné l'ordre à le révoquer.
Article 67. - Si, après trois invitations consécutives,
renouvelées dans l'espace d'un mois, les empêchements subsistent,
la commission demande une assemblée du Sénat, qui est convoqué
par le président, et qui rend, s'il y a lieu, la déclaration
suivante : - " Il y a de fortes présomptions que
la liberté de la presse a été violée. "
- On procède ensuite conformément à la disposition
de l'article 112, titre XIII, de la Haute Cour impériale.
Article 68. - Un membre de chacune des commissions sénatoriales
cesse ses fonctions tous les quatre mois.
Article 69. - Les projets de loi décrétés par le
Corps législatif sont transmis, le jour même de leur adoption,
au Sénat, et déposés dans ses archives.
Article 70. - Tout décret rendu par le Corps législatif
peut être dénoncé au Sénat par un sénateur,
1° comme tendant au rétablissement du régime féodal ;
2° comme contraire à l'irrévocabilité des ventes
des domaines nationaux ; 3° comme n'ayant pas été
délibéré dans les formes prescrites par les constitutions
de l'Empire, les règlements et les lois ; 4° comme portant
atteinte aux prérogatives de la dignité impériale
et à celles du Sénat : sans préjudice de l'exécution
des articles 21 et 37 de l'acte des constitutions de l'Empire, en date
du 22 frimaire an VIII.
Article 71. - Le Sénat, dans les six jours qui suivent l'adoption
du projet de loi, délibérant sur le rapport d'une commission
spéciale, et après avoir entendu trois lectures du décret
dans trois séances tenues à des jours différents,
peut exprimer l'opinion qu'il n'y a pas lieu à promulguer la
loi. - Le président porte à l'Empereur la délibération
motivée du Sénat.
Article 72. - L'Empereur, après avoir entendu le Conseil d'État,
ou déclare par un décret son adhésion à la
délibération du Sénat, ou fait promulguer la loi.
Article 73. - Toute loi dont la promulgation, dans cette circonstance,
n'a pas été faite avant l'expiration du délai de
dix jours, ne peut plus être promulguée si elle n'a été
de nouveau délibérée et adoptée par le Corps
législatif.
Article 74. - Les opérations entières d'un collège
électoral, et les opérations partielles qui sont relatives
à la présentation des candidats au Sénat, au Corps
législatif et au Tribunat ne peuvent être annulées
pour cause d'inconstitutionnalité, que par un sénatus-consulte.
TITRE IX - Du Conseil d'État
Article 75. - Lorsque le Conseil d'État délibère
sur les projets de lois ou sur les règlements d'administration
publique, les deux tiers des membres du Conseil en service ordinaire doivent
être présents. - Le nombre des conseillers d'État
présents ne peut être moindre de vingt-cinq.
Article 76. - Le Conseil d'État se divise en six sections ;
savoir : - Section de la législation, - Section de l'intérieur,
Section des finances, - Section de la guerre, - Section de la marine,
- Et section du commerce.
Article 77. - Lorsqu'un membre du Conseil d'État a été
porté pendant cinq années sur la liste des membres du Conseil
en service ordinaire, il reçoit un brevet de conseiller d'État
à vie. - Lorsqu'il cesse d'être porté sur la liste
du Conseil d'État en service ordinaire ou extraordinaire, il n'a
droit qu'au tiers du traitement de conseiller d'État. - Il ne perd
son titre et ses droits que par un jugement de la Haute Cour impériale,
emportant peine afflictive ou infamante.
TITRE X - Du Corps législatif
Article 78. - Les membres sortants du Corps législatif peuvent
être réélus sans intervalle.
Article 79. - Les projets de lois présentés au Corps législatif
sont renvoyés aux trois sections du Tribunat.
Article 8o. - Les séances du Corps législatif se distinguent
en séances ordinaires et en comités généraux.
Article 81. - Les séances ordinaires sont composées des
membres du Corps législatif, des orateurs du Conseil d'État,
des orateurs des trois sections du Tribunat. - Les comités généraux
ne sont composés que des membres du Corps législatif. -
Le président du Corps législatif préside les séances
ordinaires et les comités généraux.
Article 82. - En séance ordinaire, le Corps législatif
entend les orateurs du Conseil d'État et ceux des trois sections
du Tribunat, et vote sur le projet de loi. - En comité général,
les membres du Corps législatif discutent entre eux les avantages
et les inconvénients du projet de loi.
Article 83. - Le Corps législatif se forme en comité général,
- 1° Sur l'invitation du président pour les affaires intérieures
du corps ; - 2° Sur une demande faite au président et
signée par cinquante membres présents ; - Dans ces
deux cas, le comité général est secret, et les discussions
ne doivent être ni imprimées ni divulguées ;
- 3° Sur la demande des orateurs du Conseil d'État, spécialement
autorisés à cet effet, - Dans ce cas, le comité général
est nécessairement public. - Aucune délibération
ne peut être prise dans les comités généraux.
Article 84. - Lorsque la discussion en comité général
est fermée, la délibération est ajournée au
lendemain en séance ordinaire.
Article 85. - Le Corps législatif, le jour où il doit voter
sur le projet de loi, entend, dans la même séance, le résumé
que font les orateurs du Conseil d'État.
Article 86. - La délibération d'un projet de loi ne peut,
dans aucun cas, être différée de plus de trois jours
au-delà de celui qui avait été fixé pour la
clôture de la discussion.
Article 87. - Les sections du Tribunat constituent les seules commissions
du Corps législatif, qui ne peut en former d'autres que dans le
cas énoncé article 113, titre XIII, de la Haute Cour
impériale.
TITRE XI - Du Tribunat
Article 88. - Les fonctions des membres du Tribunat durent dix ans.
Article 89. - Le Tribunat est renouvelé par moitié tous
les cinq ans. - Le premier renouvellement aura lieu, pour la session de
l'an XVII, conformément au sénatus-consulte organique du
16 thermidor an X.
Article 90. - Le président du Tribunat est nommé par l'Empereur,
sur une présentation de trois candidats faite par le Tribunat au
scrutin secret et à la majorité absolue.
Article 91. - Les fonctions du président du Tribunat durent deux
ans.
Article 92. - Le Tribunat a deux questeurs. - Ils sont nommés
par l'Empereur, sur une liste triple de candidats choisis par le Tribunat
au scrutin secret et à la majorité absolue. - Leurs fonctions
sont les mêmes que celles attribuées aux questeurs du Corps
législatif, par les articles 19, 20, 21, 22, 23, 24 et 25 du sénatus-consulte
organique du 28 frimaire an XII. - Un des questeurs est renouvelé
chaque année.
Article 93. - Le Tribunat est divisé en trois sections ;
savoir : - Section de la législation, - Section de l'intérieur,
- Section des finances.
Article 94. - Chaque section forme une liste de trois de ses membres,
parmi lesquels le président du Tribunat désigne le président
de la section. - Les fonctions de président de section durent un
an.
Article 95. - Lorsque les sections respectives du Conseil d'État
et du Tribunat demandent à se réunir, les conférences
ont lieu sous la présidence de l'archichancelier de l'Empire ou
de l'architrésorier, suivant la nature des objets à examiner.
Article 96. - Chaque section discute séparément et en assemblée
de section, les projets de lois qui lui sont transmis par le Corps législatif
- Deux orateurs de chacune des trois sections portent au Corps législatif
le voeu de leur section, et en développement les motifs.
Article 97. - En aucun cas les projets de lois ne peuvent être
discutés par le Tribunat en assemblée générale.
- Il se réunit en assemblée générale, sous
la présidence de son président, pour l'exercice de ses autres
attributions.
TITRE XII - Des collèges électoraux
Article 98. - Toutes les fois qu'un collège électoral de
département est réuni pour la formation de la liste des
candidats au Corps législatif, les listes de candidats pour le
Sénat sont renouvelées. - Chaque renouvellement rend les
présentations antérieures de nul effet.
Article 99. - Les grands officiers, les commandants et les officiers
de la Légion d'honneur sont membres du collège électoral
du département dans lequel ils ont leur domicile, ou de l'un des
départements de la cohorte à laquelle ils appartiennent.
- Les légionnaires sont membres du collège électoral
de leur arrondissement. - Les membres de la Légion d'honneur sont
admis au collège électoral dont ils doivent faire partie,
sur la présentation d'un brevet qui leur est délivré
à cet effet par le grand-électeur.
Article 100. - Les préfets et les commandants militaires des départements
ne peuvent être élus candidats au Sénat par les collèges
électoraux des départements dans lesquels ils exercent leurs
fonctions.
TITRE XIII - De la Haute Cour impériale
Article 101. - Une Haute Cour impériale connaît,
- 1° Des délits personnels commis par des membres de la famille
impériale, par des titulaires des grandes dignités de l'Empire,
par des ministres et par le secrétaire d'État, par de grands
officiers, par des sénateurs, par des conseillers d'État ;
- 2° Des crimes, attentats et complots contre la sûreté
intérieure et extérieure de l'État, la personne de
l'Empereur et celle de l'héritier présomptif de l'Empire ;
- 3° Des délits de responsabilité d'office commis
par les ministres et les conseillers d'État chargés spécialement
d'une partie d'administration publique ;
- 4° Des prévarications et abus de pouvoir, commis, soit par
des capitaines généraux des colonies, des préfets
coloniaux et des commandants des établissements français
hors du continent, soit par des administrateurs généraux
employés extraordinairement, soit par des généraux
de terre ou de mer ; sans préjudice, à l'égard
de ceux-ci, des poursuites de la juridiction militaire, dans les cas déterminés
par les lois ;
- 5° Du fait de désobéissance des généraux
de terre ou de mer qui contreviennent à leurs instructions ;
- 6° Des concussions et dilapidations dont les préfets de l'intérieur
se rendent coupables dans l'exercice de leurs fonctions ;
- 7° Des forfaitures ou prises à partie qui peuvent être
encourues par une cour d'appel, ou par une cour de justice criminelle,
ou par des membres de la Cour de cassation ;
- 8° Des dénonciations pour cause de détention arbitraire
et de violation de la liberté de la presse.
Article 102. - Le siège de la Haute Cour impériale est
dans le Sénat.
Article 103. - Elle est présidée par L'archichancelier
de l'Empire. - S'il est malade, absent ou légitimement empêché,
elle est présidée par un autre titulaire d'une grande dignité
de l'Empire.
Article 104. - La Haute Cour impériale est composée des
princes, des titulaires des grandes dignités et grands officiers
de l'Empire, du grand-juge ministre de la Justice, de soixante sénateurs,
des six présidents des sections du Conseil d'État, de quatorze
conseillers d'État et de vingt membres de la Cour de cassation.
- Les sénateurs, conseillers d'État et les membres de la
Cour de cassation sont appelés par ordre d'ancienneté.
Article 105. - Il y a auprès de la Haute Cour impériale
un procureur général, nommé à vie par l'Empereur.
- Il exerce le ministère public, étant assisté de
trois tribuns, nommés chaque année par le Corps législatif,
sur une liste de neuf candidats présentés par le Tribunat,
et de trois magistrats que l'Empereur nomme aussi, chaque année,
parmi les officiers des cours d'appel ou de justice criminelle.
Article 106. - Il y a auprès de la Haute Cour impériale
un greffier en chef nommé à vie par l'Empereur.
Article 107. - Le président de la Haute Cour impériale
ne peut jamais être récusé ; il peut s'abstenir
pour des causes légitimes.
Article 108. - La Haute Cour impériale ne peut agir que sur les
poursuites du ministère public, dans les délits commis par
ceux que leur qualité rend justiciables de la Cour impériale ;
s'il y a un plaignant, le ministère public devient nécessairement
partie jointe et poursuivante et procède ainsi qu'il est réglé
ci-après. Le ministère public est également partie
jointe et poursuivante dans les cas de forfaiture ou de prise à
partie.
Article 109. - Les magistrats de sûreté et les directeurs
de jury sont tenus de s'arrêter, et de renvoyer, dans le délai
de huitaine, au procureur général près la Haute Cour
impériale, toutes les pièces de la procédure, lorsque,
dans les délits dont ils poursuivent la réparation, il résulte,
soit de la qualité des personnes, soit du titre de l'accusation,
soit des circonstances, que le fait est de la compétence de la
Haute Cour impériale. - Néanmoins les magistrats de sûreté
continuent à recueillir les preuves et les traces du délit.
Article 110. - Les ministres ou les conseillers d'État chargés
d'une partie quelconque d'administration publique, peuvent être
dénoncés par le Corps législatif, s'ils ont donné
des ordres contraires aux constitutions et aux lois de l'Empire.
Article 111. - Peuvent être également dénoncés
par le Corps législatif, - Les capitaines généraux
des colonies, les préfets coloniaux, les commandants des établissements
français hors du continent, les administrateurs généraux,
lorsqu'ils ont prévariqué ou abusé de leur pouvoir ;
- Les généraux de terre ou de mer qui ont désobéi
à leurs instructions ; - Les préfets de l'intérieur
qui se sont rendus coupables de dilapidation ou de concussion.
Article 112. - Le Corps législatif dénonce pareillement
les ministres ou agents de l'autorité, lorsqu'il y a eu, de la
part du Sénat, déclaration de fortes présomptions
de détention arbitraire ou de violation de la liberté de
la presse.
Article 113. - La dénonciation du Corps législatif ne peut
être arrêtée que sur la demande du Tribunat, ou sur
la réclamation de cinquante membres du Corps législatif,
qui requièrent un comité secret à l'effet de faire
désigner, par la vole du scrutin, dix d'entre eux pour rédiger
le projet de dénonciation.
Article 114. - Dans l'un et l'autre cas, la demande ou la réclamation
doit être faite par écrit, signée par le président
et les secrétaires du Tribunat, ou par les dix membres du Corps
législatif. - Si elle est dirigée contre un ministre ou
contre un conseiller d'État chargé d'une partie d'administration
publique, elle leur est communiquée dans le délai d'un mois.
Article 115. - Le ministre ou le conseiller d'État dénoncé
ne comparaît point pour y répondre. - L'Empereur nomme trois
conseillers d'État pour se rendre au Corps législatif le
jour qui est indiqué, et donner des éclaircissements sur
les faits de la dénonciation.
Article 116. - Le Corps législatif discute en comité secret
les faits compris dans la demande ou dans la réclamation, et il
délibère par la voie du scrutin.
Article 117. - L'acte de dénonciation doit être circonstancié,
signé par le président et par les secrétaires du
Corps législatif. - Il est adressé par un message à
l'archichancelier de l'Empire, qui le transmet au procureur général
près la Haute Cour impériale.
Article 118. - Les prévarications ou abus de pouvoir des capitaines
généraux des colonies, des préfets coloniaux, des
commandants des établissements hors du continent, des administrateurs
généraux, les faits de désobéissance de la
part des généraux de terre ou de mer aux instructions qui
leur ont été données, les dilapidations et concussions
des préfets, sont aussi dénoncés par les ministres,
chacun dans ses attributions, aux officiers chargés du ministère
public. - Si la dénonciation est faite par le grand-juge ministre
de la justice, il ne peut point assister ni prendre part aux jugements
qui interviennent sur sa dénonciation.
Article 119. - Dans les cas déterminée par les articles
110, 111, 112 et 118, le procureur général informe sous
trois jours l'archichancelier de l'Empire, qu'il y a lieu de réunir
la Haute Cour impériale. - L'archichancelier, après avoir
pris les ordres de l'Empereur, fixe dans la huitaine l'ouverture des séances.
Article 120. - Dans la première séance de la Haute Cour
impériale, elle doit juger sa compétence.
Article 121. - Lorsqu'il y a dénonciation ou plainte, le procureur
général, de concert avec les tribuns et les trois magistrats
officiers du parquet, examine s'il y a lieu à poursuites. - La
décision lui appartient ; l'un des magistrats du parquet,
peut être chargé par le procureur général,
de diriger les poursuites. - Si le ministère public estime que
la plainte ou la dénonciation ne doit pas être admise, il
motive les conclusions sur lesquelles la Haute Cour impériale prononce,
après avoir entendu le magistrat chargé du rapport.
Article 122. - Lorsque les conclusions sont adoptées, la Haute
Cour impériale termine l'affaire par un jugement définitif
- Lorsqu'elles sont rejetées, le ministère public est tenu
de continuer les poursuites.
Article 123. - Dans le second des cas prévus par l'article précédent,
et aussi lorsque le ministère public estime que la plainte ou la
dénonciation doit être admise, il est tenu de dresser l'acte
d'accusation dans la huitaine, et de le communiquer au commissaire et
au suppléant que l'archichancelier de l'Empire nomme parmi les
juges de la Cour de cassation qui sont membres de la Haute Cour impériale.
Les fonctions de ce commissaire, et, à son défaut, du suppléant,
consistent à faire l'instruction et le rapport.
Article 124. - Le rapporteur ou son suppléant soumet l'acte d'accusation
à douze commissaires de la Haute Cour impériale choisis
par l'archichancelier de l'Empire, six parmi les sénateurs ;
et six parmi les autres membres de la Haute Cour impériale. Les
membres choisis ne concourent point au jugement de la Haute Cour impériale.
Article 125. - Si les douze commissaires jugent qu'il y a lieu à
accusation, le commissaire rapporteur rend une ordonnance conforme, décerne
les mandats d'arrêt, et procède à l'instruction.
Article 126. - Si les commissaires estiment au contraire qu'il n'y a
pas lieu à accusation, il en est référé par
le rapporteur à la Haute Cour impériale, qui prononce définitivement.
Article 127. - La Haute Cour impériale ne peut juger à
moins de soixante membres. Dix de la totalité des membres qui sont
appelés à la composer, peuvent être récusés
sans motifs déterminés par l'accusé, et dix par la
partie publique. L'arrêt est rendu à la majorité absolue
des voix.
Article 128. - Les débats et le jugement ont lieu en public.
Article 129. - Les accusés ont des défenseurs ; s'ils
n'en présentent point, l'archichancelier de l'Empire leur en donne
d'office.
Article 130. - La Haute Cour impériale ne peut prononcer que des
peines portées par le code pénal. - Elle prononce, s'il
y a lieu, la condamnation aux dommages et intérêts civils.
Article 131. - Lorsqu'elle acquitte, elle peut mettre ceux qui sont absous,
sous la surveillance ou à la disposition de la haute police de
l'État, pour le temps qu'elle détermine.
Article 132. - Les arrêts rendus par la Haute Cour impériale
ne sont soumis à aucun recours ; - Ceux qui prononcent une
condamnation à une peine afflictive ou infamante, ne peuvent être
exécutés que lorsqu'ils ont été signés
par l'Empereur.
Article 133. - Un sénatus-consulte particulier contient le surplus
des dispositions relatives à l'organisation et à l'action
de la Haute Cour impériale.
TITRE XIV - De l'ordre judiciaire
Article 134. - Les jugements des cours de justice sont intitulés
arrêts.
Article 135. - Les présidents de la Cour de cassation, des cours
d'appel et de justice criminelle, sont nommés à vie par
l'Empereur, et peuvent être choisis hors des cours qu'ils doivent
présider.
Article 136. - Le Tribunal de cassation prend la dénomination
de Cour de cassation. - Les tribunaux d'appel prennent celle de
cours d'appel. - Les tribunaux criminels, celle de cours de
justice criminelle. - Le président de la Cour de cassation
et celui des cours d'appel divisées en section, prennent le titre
de premier président. - Les vice-présidents prennent
celui de présidents. - Les commissaires du gouvernement
près de la Cour de cassation, des cours d'appel et des cours de
justice criminelle, prennent le titre de procureurs généraux
impériaux. - Les commissaires du gouvernement auprès
des autres tribunaux, prennent le titre de procureurs impériaux.
TITRE XV - De la promulgation
Article 137. - L'Empereur fait sceller et fait promulguer les sénatus-consultes
organiques, - Les sénatus-consultes, - Les actes du Sénat,
- Les lois. - Les sénatus-consultes organiques, les sénatus-consultes,
les actes du Sénat, sont promulgués au plus tard le dixième
jour qui suit leur émission.
Article 138. - Il est fait deux expéditions originales de chacun
des actes mentionnés en l'article précédent. - Toutes
deux sont signées par l'Empereur, visées par l'un des titulaires
des grandes dignités, chacun suivant leurs droits et leurs attributions,
contresignées par le secrétaire d'État et le ministre
de la justice, et scellées du grand sceau de L'État.
Article 139. - L'une de ces expéditions est déposée
aux archives du sceau, et l'autre est remise aux archives de l'autorité
publique de laquelle l'acte est émané.
Article 140. - La promulgation est ainsi conçue :
" N. (le prénom de l'Empereur), par la grâce
de Dieu et les constitutions de la République, Empereur des Français,
à tous présents et à venir, SALUT. - Le Sénat,
après avoir entendu les orateurs du Conseil d'État, a décrété
ou arrêté, et nous ordonnons ce qui suit : - (Et
s'il s'agit d'une loi) Le Corps législatif a rendu, le ...
(la date), le décret suivant, conformément à
la proposition faite au nom de l'Empereur, et après avoir entendu
les orateurs du Conseil d'État et des sections du Tribunat, le ...
- Mandons et ordonnons que les présentes, revêtues des sceaux
de l'État, insérées au Bulletin des lois, soient
adressées aux cours, aux tribunaux et aux autorités administratives,
pour qu'ils les inscrivent dans leurs registres, les observent et les
fassent observer, et le grand-juge, ministre de la justice, est chargé
d'en surveiller la publication. "
Article 141. - Les expéditions exécutoires des jugements
sont rédigées ainsi qu'il suit :
" N. (le prénom de l'Empereur), par la grâce
de Dieu et les constitutions de la République, Empereur des Français,
à tous présents et à venir, Salut. - La cour de...
ou le tribunal de... (si c'est un tribunal de Première
Instance) a rendu le jugement suivant : (Ici copier l'arrêt
ou le jugement). Mandons et ordonnons à tous huissiers sur
ce requis, de mettre ledit jugement à exécution ; à
nos procureurs généraux, et à nos procureurs près
les tribunaux de première instance, d'y tenir la main ; à
tous commandants et officiers de la force publique, de prêter main-forte
lorsqu'ils en seront légalement requis. - En foi de quoi le présent
jugement a été signé par le président de la
cour ou du tribunal, et par le greffier. "
TITRE XVI ET DERNIER
Article 142. - La proposition suivante sera présentée à
l'acceptation du peuple, dans les formes déterminées par
l'arrêté du 20 floréal an X : - " Le
peuple veut l'hérédité de la dignité impériale
dans la descendance directe, naturelle, légitime et adoptive de
Napoléon Bonaparte, et dans la descendance directe, naturelle et
légitime de Joseph Bonaparte et de Louis Bonaparte,
ainsi qu'il est réglé par le sénatus-consulte organique
de ce jour. "
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