PETIT DICTIONNAIRE
DU
PATOIS NORMAND
EN USAGE
DANS L'ARRONDISSEMENT
DE PONT- AUDEMER.
Par
L. F. VASNIER
1862
PRÉFACE
La première pensée de ce Dictionnaire
remonte à une époque déjà éloignée. A chaque voyage que VASNIER faisait dans sa
ville natale, il notait avec soin les mots patois qu'il saisissait au passage
dans ses excursions à travers champs, et son projet, bien arrêté dès lors, était
de continuer sa collection et de la livrer un jour à la presse, avec tous les
développements dont un pareil sujet pouvait être susceptible. Mais lorsque sonna
pour lui l'heure d'utiliser, au profit de ses goûts pour l'étude, les loisirs
qu'il avait eu le mérite de se faire, sa santé subissait une funeste atteinte,
et il lui devint impossible de s'occuper désormais, aussi sérieusement qu'il l'aurait
voulu, de ce projet de publication, et de plusieurs autres dont il avait également
ébauché quelques parties.
Quoi qu'il en soit, averti par
des accidents successifs qu'il n'avait pas à compter sur l'avenir, VASNIER se
hâta de réunir, telles qu'on les trouvera dans cette brochure, les notes qu'il
avait antérieurement recueillies et qu’il complétait de jour en jour ; mais il
ne lui fut pas donné de présider lui-même à leur impression. En les publiant aujourd'hui,
d'accord avec sa famille, je m'acquitte d'une mission que l'amitié m'avait confiée.
N'ai-je pas aussi le devoir de
consacrer quelques lignes à la mémoire de l'ami qui n'est plus ?
Louis-François VASNIER naquit
à Pont-Audemer, en 1802. Sa famille n'avait pu lui donner qu'une éducation assez
restreinte ; mais il suppléa lui-même à ce qu'elle avait d'insuffisant, grâce
à son ardeur pour l'étude, puissamment secondée d'ailleurs par une intelligence
peu commune. Il avait d'autant plus la passion de s'instruire, qu'il se sentait
dès lors entraîné par une sorte de vocation littéraire. En 1824, il faisait représenter,
dans sa ville natale, un vaudeville qui obtint du succès, et, deux ans après,
l'inauguration d'une nouvelle salle de spectacle et un incident de théâtre lui
fournissaient l'occasion de quelques pièces de vers qui ne furent pas moins bien
reçues. C'était ainsi qu'il cherchait à se distraire de ses arides travaux d'employé
à la Recette particulière.
Comme tous les jeunes gens qui
se croient prédestinés pour la carrière des lettres, VASNIER rêva un jour, que
Paris pourrait lui donner gloire et fortune. Il quitta donc Pont-Audemer ; mais
les amères déceptions ne se firent pas attendre. Après cinq ou six années de rudes
épreuves, il finit toutefois, à force d'énergie, par s'ouvrir une voie. La position
qu'il parvint à se faire fut celle de greffier des bâtiments. Son avenir était
assuré désormais ; car chez lui aptitude et probité marchaient de compagnie.
Décoré de la médaille de juillet
1830, partisan des idées démocratiques, VASNIER prit une part active aux luttes
légales contre le gouvernement de Louis-Philippe. Aussi fut-il successivement
nommé lieutenant et capitaine dans la quatrième légion de la garde nationale de
Paris, et à la révolution de 1848, chef de bataillon dans la même légion. En cette
dernière qualité il a été mentionné honorablement pour sa conduite dans les déplorables
affaires de juin.
Tout en consacrant ses soins aux
affaires d'intérêt matériel, VASNIER était loin d'avoir renoncé à ses goûts littéraires.
Dans ses heures de repos, il a composé bon nombre de fables, de chansons et plusieurs
pièces de théâtre. La littérature légère n'occupait pas, au reste, exclusivement
ses loisirs. VASNIER a fourni au National quelques articles sérieux sur
différents sujets, entre autres, une critique du livre de Jules Janin sur la Normandie,
et Abel Hugo lui a été redevable de notes pour la partie de sa France pittoresque
relative à la même province.
L'Institut de France (Académie
des sciences morales et politiques) avait mis au concours, pour 1838, des études
sur cette partie de la population qui forme, dans les grandes villes, une classe
dangereuse par ses vices, son ignorance et sa misère. Un pareil sujet était en
complète harmonie avec les tendances philanthropiques de VASNIER, qui entreprit
de répondre aux questions posées. Son mémoire, quoiqu'il y manquât divers documents
nécessaires, dont la communication avait été refusée dans plusieurs administrations
publiques, n'en reçut pas moins un accueil honorable de la part de l'Académie.
Sur le rapport de M. Mignet, il obtint le second prix, c'est-à-dire une somme
de 1,000 francs.
Retiré des affaires en 1858, VASNIER
est venu se fixer, aux abords de Pont-Audemer, dans une confortable retraite qu'il
s'était plu à créer quelques années auparavant. C'est là qu'il a cessé de vivre
le 4 juin 1861.
A. CANEL
INTRODUCTION
Le Ministre de l'intérieur adressait,
en 1807, une circulaire aux préfets de l'Empire pour leur recommander de faire
recueillir et de lui envoyer ce qu'il serait possible de rassembler de mots patois
conservés dans leurs départements.
Une inspiration spontanée ne dicta
point cette mesure, elle ne fut que la réalisation des voeux émis à diverses époques
par les hommes éminents qui s'occupaient de linguistique française, tels que les
bénédictins de Saint-Maur, Leibnitz, Ménage et autres.
« Il semble, disait Leibnitz,
que toutes les langues ne sont que des variations, souvent bien embrouillées,
des mêmes racines, mais qu'il est difficile de reconnaître, à moins de comparer
beaucoup de langues ensemble, sans négliger les jargons dont il serait bon que
les savants de chaque pays prissent la peine de recueillir les mots particuliers
(Oeuvres complètes, t. 6.). »
De son côté, Ménage s'exprimait
ainsi : « Il faudrait savoir tous les divers idiomes de nos provinces et le
langage de nos paysans, parmi lesquels les langues se conservent plus longuement
(Origine de la langue française.). »
Pour répondre au désir de la circulaire
ministérielle, il eût fallu se trouver au milieu d'une époque de calme, dont les
profonds loisirs eussent permis aux hommes studieux de se livrer aux recherches
que devait nécessiter un travail aussi patient ; mais, alors, le premier Empire
était dans une de ses phases les plus brillantes ; toutes les idées étaient tournées
vers la guerre ; on s'occupait très-peu de littérature, beaucoup de gloire militaire,
et le mouvement intellectuel, qui a dirigé la pensée vers les explorations et
la reconstitution du passé, n'était pas commencé ; aussi, cette circulaire, produit
d'une excellente initiative, demeura-t-elle sans résultat.
Il fallut les quinze années de repos
de la Restauration pour faire naître l'étude de l'histoire et de l'archéologie
appliquée plus spécialement au moyen-âge ; mais aussi la semence jetée à cette
époque fut féconde, car ces études sont devenues le partage de tous les esprits
sérieux, et elles ont pris un développement tellement étendu que Voltaire serait
aujourd'hui fort mal reçu s'il répétait qu'une curiosité grossière et sans
goût peut seule rechercher avec avidité les décombres du moyen-âge.
Roquefort prétend que c'est particulièrement
de la Normandie que vinrent les premiers écrits en langue romane (État
de la poésie aux 12e et 13e siècles.), et Charles Nodier ajoute : « Je
pose en fait que l'étude des patois de la langue française, bien plus voisins
des étymologies, bien plus fidèles à l'orthographe et à la prononciation antiques,
est une introduction nécessaire à la connaissance de ses radicaux; et que la clef
de tous ces radicaux et de tous les langages y est implicitement renfermée. Le
patois, c'est la langue native, la langue primitive, vivante et nue. » (Éléments
de linguistique.) Et, pour corroborer cette opinion, il écrivait : « Si, par
malheur, les patois étaient perdus, il faudrait vite créer une académie spéciale
pour les retrouver. »
De semblables idées émises par les
meilleurs linguistes devaient provoquer, dans les diverses provinces, des recherches
sur les idiomes encore existants, ou ceux près de disparaître ; et l'impulsion
donnée produisit, pour notre province, le Dictionnaire du patois normand,
par M.M. Edelestand et Alfred Duméril, le Glossaire du patois normand de
M. Louis Dubois, les ouvrages de l'abbé Decorde et autres.
Ces oeuvres, pour la plupart très-étendues,
remplies d'érudition et d'investigations arides, sont venues, non pas combler
une lacune existante, mais jeter les fondations de la linguistique normande. Leurs
auteurs pressentaient bien tout ce que ce travail aurait d'inachevé ; car MM.
Duméril ne manquent pas de dire que, malgré le concours qui leur a été prêté,
leur glossaire n'en est pas moins incomplet (Introduction
au Dictionnaire du patois normand.).
M. Julien Travers, qui a édité et
augmenté le Glossaire de M. Louis Dubois, disait : Je sens bien, quoi qu'on
fasse, qu'on n'arrivera jamais au complet dans ce genre de nomenclature (Préface
du Glossaire normand.).
Nous avons remarqué, en effet, que
les savantes investigations des auteurs que nous venons de citer, quoiqu'embrassant
toute la province, s'étaient plus spécialement occupés du patois de la Basse-Normandie,
et avaient donné peu de renseignements sur ceux du Lieuvin, du Roumois, du pays
de Caux, du pays de Bray, du Vexin-Normand, de l'Evrechin et du pays d'Ouche qui
composent la Haute-Normandie ; et nous avons à signaler, pour notre compte, quatre
ou cinq cents mots particuliers à l'arrondissement de Pont-Audemer, qui ne se
trouvent dans aucune nomenclature : mais, ainsi que l'observe M. Duméril , il
est peu de villages qui n'aient des expressions entièrement inconnues aux autres
(Introduction précitée. ).
C'est donc un dictionnaire par arrondissement
qu'il faudrait établir si l'on voulait présenter quelque chose d'à peu près complet
sur un thème aussi complexe.
Sous l'influence de ces diverses
considérations, nous avons été amené à dresser un Dictionnaire des mots patois
en usage dans l'arrondissement de Pont-Audemer. C'est une pierre que nous
apportons à l'édifice qui s'élève, et pour lequel de nombreux matériaux ont été
offerts par nos devanciers.
Il est quelques uns de ces mots
qui se trouvent dans les dictionnaires français, mais ils n'y figurent qu'à l'état
de vieux mot, ou mot hors d'usage, tandis qu'ils sont encore fréquemment
employés dans le langage de nos arrondissements.
Le philologue Genin écrivait : L'étude
du vieux français mène â reconnaître ce phénomène étrange qu'une langue â son
origine est régulière, logique, dans toutes ses parties ; et, à son point de perfection,
pleine d'inconséquences et d'irrégularités (Variations du
langage français. ).
Sans adopter entièrement l'opinion
paradoxale de Genin , qui taxe la langue française actuelle d'inconséquence
et d'irrégularité, tandis qu'elle a plus de correction, et se prête à moins
d'équivoques qu'aucune autre langue, puisque, par sa clarté et sa concision, elle
est la seule employée dans la diplomatie européenne, nous conviendrons, cependant,
que les modifications qu'on y a introduites l'ont plus souvent altérée qu'éclaircie
; et que si le langage que nos pères parlaient aux 12e et 13e siècles paraît suranné,
c'est grâce aux transformations que lui ont fait subir les linguistes. En outre,
ils ont fait disparaître une foule de vieux mots très-expressifs, qui n'ont pas
d'équivalent dans la langue moderne.
M. A. Chéruel, d'accord en cela
avec Ch. Nodier, s'exprime ainsi : La prononciation normande rappelle l'ancienne
orthographe et les formes de la langue du 12e siècle, telle que l'employèrent
les trouvères normands ; et c'est dans les campagnes que l'idiome primitif des
poètes normands s'est conservé presqu'intact (Villes de France,
tome 5.).
Cette opinion est vraie, et nous
l'appuierons par de nombreuses citations prises dans les auteurs anciens ; mais,
pour éviter de grossir ce recueil d'un grand nombre de mots altérés par la prononciation
en usage, nous tracerons quelques unes des règles qui régissent le langage actuel,
car, bien que non écrites, ces règles sont presqu'invariables.
C doux se change en ch dans les
mots cinq, ceinture, commencer, maçon, façon, etc., qui se prononce encore aujourd'hui,
comme au douzième siècle :
Payé pour chinq
ous (oeufs).
(Cartulaire du prieuré
de St-Vigor, 1290.)
... Grêles par la
cheinture.
Por ço lie contre li la guerre comencha.
Merchi, ço dist Willame.
Recheu fut à joie et à procession.
Noef chenz et seisante et six ans acomplis èrent.
Bien ressemble à son père de moeurs et de fachon.
A Rome envéia as Normanz un garchon.
(Wace, roman de Rou.)
Le soupechon
est de tout voïable.
(L'advocacie, note
dernière, 1326.)
Sire, merchi,
dit la duchoisse.
(Roman de Robert-le-Diable.)
Payé aux machons
et arbitres-juges ...
Pour la fachon de 43 aunes de teile.
(Comptes de l'hôpital
de Bayeux, 1466.)
Par contre, ch est remplacé
par c dur, k ou q, dans échapper, chandelle, charretée, vache,
chien, chat, etc. :
Il n'escapera
mie devant le fruit meur.
(Wace ; roman de Rou.)
Et chambres pleines
de candelles.
(Froissart.)
Pour quatre carretées
de sablon.
(Compte de l'hôpital
de Bayeux, 1466.)
Esse vaque,
mouque ou escarbot.
(Vieille farce de
Pathelin.)
Ch se change en g
doux dans cheval, acheter, etc., qu'on prononce geval, ageter.
E fermé se change en ai,
dans les mots autorité, bonté, député, dégoûté, etc., qui se prononcent, autoritai
, bontai, députai, dégoûtai.
Eau se change en iau,
dans bateau, beau, carreau, château, qu'on prononce, batiau, biau, carriau, châtiau
Nés et batialx
venir chargés devers la mer.
(Wace ; roman de Rou.)
Biax et très-doux
père glorious.
(La Court du Paradis,
fabliau.)
Eau se change aussi en et
dans couteau, chapeau, devanteau, etc., qui deviennent: coutet, capet, devantet.
Eur et oir se changent
en eux dans abatteur, menteur, faucheur, battoir, mouchoir, miroir, etc.,
qui se prononcent : abatteux, menteux , fauqueux , batteux , moucheux, mireux.
J se change en G dur,
dans geai, jatte, jambe, jarretière, etc.
Gambes ont
longes et dreites.
(Roman de Rou.)
Le gay en
furie martiale rompit sa cage.
(Rabelais ; Pantagruel.)
Elle n'a pas de gartières
à ses cauches.
(D. Ferrand ; Muse
normande.)
Nous et vous, se prononcent
nos, et vos :
Prendrons ici le
bien qui nos arrive.
(Thibault de Marly.)
La diphthongue oi se prononce
ai ou é, comme dans poirier, poisson, voisin, avoir, moitié, etc.
Sous Louis XIV, cette orthographe et cette prononciation étaient encore en vigueur,
et, comme le dit Ed. Fournier, on écrivait et on prononçait : je crais,
quoiqu'il en sait, qu'il fait fraid dans cet endrait ( Essai
sur l'histoire de l'orthographe. ). M. Paulin Paris pense que ai
employé pour oi vient des Italiens et des Normands.
Es vivers prendre
li pessuns.
Gambes ont longes é dreites.
Noef chenz et seisante ans.
Roem envéia as Normanz.
Mieulx la voldreit veir niée u estranglée.
Ne te chaut, dit li Dus, tais-tei.
Ne son parent ne son veizin.
(Wace ; roman de
Rou).
. . . . Sire compainz,
ço crei.
Pur son seignor deit homme suffrir destreiz.
Paiens unt tort, chrestiens unt dreit.
Malvaise essample ne sera ja de mei.
(Thérould ; chanson
de Roland.)
Sa cupe à batre é
sa peitrine.
(Benoist de Sainte-More.)
Il det aveir
sa livraison.
(Cartulaire du prieuré
de St-Vigor, 1290.)
La meitié
à Noël, et l'autre meitié à la Saint-Jean.
(Statuts de la corporation
des bouchers de Bayeux, 1431.)
Tr se prononce ter,
comme dans truie, truite, etc... qui se changent en téruie, téruite.
Il est d'autres locutions qui sont
d'un usage fréquent dans la campagne, et dont les auteurs anciens offrent de nombreux
exemples :
Av'ous, pour avez-vous :
Av'ous mal
aux dents, maître Pierre ?
(Vieille farce de
Pathelin.)
Manju, pour mangez
:
Et tos les autres
qui manjussent o li.
(Mort de Garin.)
Quer point il ne
menjut ni ne pooit parler.
(Wace ; roman de
Rou.)
Trestous ou tertous
pour tous :
Par trestoutes
les villes où Berthe trépassait.
(Berthe aux grans
piés.)
Que je m'en voige, pour que
je m'en aille :
Dictes, afin que
je m'en voise.
(Vieille farce de
Pathelin.)
Nous ne devons pas omettre une altération
très-commune que subissent les verbes en er, et qui est connue sous le
nom de boîte aux i :
J'y allis, je le rencontris,
il me montrit de l'amitié, et je l'épousis.
L'an suivant que
l'on dit
Langevin me restaurit.
(Inscription sur le
couvent des cordeliers à Vire.)
On le voit, par ces divers exemples,
et par ceux que nous citerons dans le dictionnaire, ce sont les formes du langage
des 12e, 13e et 14e siècles dont nos paysans ont conservé la tradition ; ils parlaient
comme on écrivait alors. Si tout a été modifié depuis, si certaines lettres ont
été supprimées pour rendre la langue plus douce, plus facile et plus correcte,
si de nouvelles règles ont été établies par les grammairiens, et des entraves
imposées par les académiciens pour fixer définitivement la langue française,
en supposant qu'il puisse y avoir quelque chose de définitif sur ce
point comme sur beaucoup d'autres, les gens de campagne, qui demeuraient
étrangers à ces changements, sont restés fidèles au langage primitif.
Les proverbes populaires se rattachent
si intimement à notre thème principal, que nous ne pouvions pas les négliger entièrement.
Nous avons donc ajouté a ce dictionnaire un certain nombre des locutions proverbiales
les plus remarquables en usage dans notre arrondissement.
Il n'était pas inutile, non plus,
de montrer le patois local en action, s'il est permis de s'exprimer ainsi.
C'est dans ce but que nous terminons
cette notice par une paraphrase, en style vernaculaire, de la parabole de l'Enfant
prodigue.
Nous devons à l'obligeance inépuisable
de M. Alfred CANEL de nombreux renseignements qui ont facilité et complété nos
recherches. Aussi, tout en lui témoignant notre vive gratitude, serions-nous tenté
de lui reporter le mérite de notre travail, si toutefois cet ouvrage en avait
quelqu'un, et si, d'ailleurs, M. CANEL n'était déjà assez riche de son propre
fonds.
VASNIER.
ABAMIR .v. a.
affadir, donner du dégoût ; au propre et au figuré. Je suis tout
abâmi ; cela m'abâmit le coeur.
ABITER .v. a.
toucher. VoyezBiter.
ABRIER .v. a.
abriter.
ACCAMAILLER .v. a.
prendre au collet, lutter corps à corps. Pour exprimer qu'on a terrassé quelqu'un,
on dit : « Je l'ai accamaillé sous moi. »
ACCOUPLE, ou ACCOUPLURE
.s. f.
menus linges accouplés ou disposés en faisceau pour la lessive.
ACCOUVER (s')v. pron.
s'accroupir comme l'oiseau qui couve ses neufs.
ACRE .s. f.
ancienne mesure agraire, qui se divise envergées et enperches.
ADIRER . .v. a.
égarer. Il a adiré son livre. On dit aussi s'adirer.
AFFAITEMENT .s. m.
assaisonnement.
AFFAITER .v. a.
assaisonner, mettre un vase neuf en état de servir.
AFFUTIAUX .s. m.
menus objets de parure.
AGONIR .v. a.
accabler d'injures. Ils m'ont agoni ; ou bien aussi : ils m'ont agoni d'injures.
AHAN .s. m.
travail pénible, respiration gênée.
AHANER .v. n.
faire un travail pénible, respirer avec précipitation à la suite de violents efforts.
Pour se donner beaucoup de peine, voltaire a dit : suer d'ahan.
AIGUCHER .v. a.
aiguiser. Je vais aigucher man coutiau ; Aiguchez- vous l'appétit.
AILETTES .s. f.
ailes de rouet à filer le lin, garnies de petites dents en fer et servant à diriger
le fil sur le fuseau.
AITEAUX .s. m.
aileteaux, ailes naissantes. Ces poussins n'ont encore que des aiteaux.
Ce mot sert également pour désigner toutes les plumes qui commencent
à sortir de la peau des oiseaux.
AÎTRE .s. m.
du latinatrium ; compartiment d'une maison. Ce bâtiment consiste en cinq aîtres.
ALAUSER .v. a.
donner des louanges. Du latinlaus oulaudare. Kar bien
éteit alosée. (Wace ; roman de Rou.)
ALLOU .s. m. travail à forfait,
pour un prix convenu.
ALLOUERv. a.
prendre ou donner du travail à forfait.
ALLOUVI .adj.
affamé. Il mange comme un allouvi. Je suis affamé et allouvi de
bien faire. (Rabelais ; Pantagruel).
ALLUMELLE .s. f.
lame de couteau.
ALLURE .s. f.
marche d'un cheval qui n'est ni le trot ni l'amble. L'allure fait entendre quatre
batteries. « Ce genre de locomotion, fort usité au moyen- âge, s'est conservé
plus long- temps en Normandie qu'ailleurs, et parait même être spécial à cette
contrée. » (Ephrem, Houel, inspecteur des haras.) Un cheval
d'allure.
AMONTER .v. a.
monter, gravir. Amonteir sus au grand mostier. (Guillaume de Saint-
Pair, roman du Mont- Saint- Michel.)
AMORAUQUE .s. f.
camomille romaine.
AMOUILLANT
adjectif qui s'applique aux vaches dans l'état de gestation.
Une vache amouillante est, à proprement parler, une vache dont
la mamelle devient plus garnie de lait.
Aux Préaux, une source est appelée le Pot- Amouillant.
AMOURETTE .s. f.
réséda.
ANDIER .s. m.
landier. Dans la basse latinitéanderius. « Une payelle et ung andier.
» (Cartulaire de Corbie.)
ANGOISSER .v. a.
donner de l'angoisse, de la douleur, chagriner. « Malade fut
et angoissous. » (Roman du Mont- Saint- Michel.) Il ne faut
pas vous engoisser si fort.
ANNOUILLER
adjectif qui s'applique aux vaches qui n'ont' pas conçu et que l'on destine à
la boucherie. Une vache annouillère.
ANNUIT .adv. de temps
aujourd'hui. Ce mot est- il conservé de l'ancien usage des Celtes qui comptaient
par nuits et non par jours ? Les trouvères normands Wace, Benoit
et Guillaume de Saint- Pair écriventanuit, ennuit ; Marot écrit : anuict.
N'est- ce pas plutôt la traduction du latinhodie, et ne conviendrait- il pas
d'écrire anhui ? Hui est l'ancienne traduction d'hodie et on la
retrouve dans le mot aujourd'hui.
A QUANT ET .adv.
avec, en même temps que.
« Mais allant quant et ly jusques à Notre- Dame. » (D.
Ferrand, Muse normande.)
« Les marques du déplaisir que j'emporte quant et moy.
» (Testam. de Gautier- Gaiguille), etc.
AQUEUTER .v. a.
épuiser, abattre. Il aqueute ses gens à force de travail. Je ne
veux pas m'aqueuter faute de nourriture.
Ce verbe paraît avoir été appliqué principalement aux animaux qui,
épuisés par la faim, la fatigue ou la maladie, ne peuvent se redresser et qu'on
soulève par la queue pour leur venir en aide.
ARGANCHER .v. a.
tracasser, tourmenter.
ARIAS .s. m.
embarras, ennui, tracas.- « Pur li grant arias kil reciet. » (Wace, roman
de Rou. )
ARURE .s. f.
parcelle de terre labourée, traits de charrue.
ASSEGRIR .v. n.
rester calme, se tenir en repos. Il n'assegrit point.
ASSOT .s. m.
ennui, tourment. On dit aussi assotement.
ASSOTER . .v. a.
ennuyer quelqu'un au point de le rendre sot.
Que voulez- vous que je vous die,
Jeunes assotés amoureux. (Ch. d'Orléans.)
ATIGNOLE .s. f.
boulettes de viande hachée que font les charcutiers.
ATOT .s.m.
un sot, Un endormi. On dit aussi : Atot begin, ou beguin.
ATTENDIS ou A L'ATTENDIS
.conj.
en attendant.
ATTRAITER .v. a.
dresser, former, instruire. Attraiter un cheval. On ne l'emploie
guère que dans ce cas.
AUGE .s. f.
outre ses significations ordinaires, on l'emploie pour pétrin.
AVA .prep.
à travers, le long. Ava la campagne.
Aval est le contraire d'amont, qui, cependant, signifie aussi à
travers, le long. L'aval indique la descente ; l'amont indique la montée. Si un
homme suit le cours de l'eau, il se dirige ava la vallée ; s'il en remonte le
cours, il marche amont la vallée.
Amont et ava s'emploient aussi sans régime : il est allé amont,
il est descendu ava. Le vent d'amont est celui qui souffle des terres
; le vent d'ava est celui qui vient de la mer.
AVEINDRE .v. a. et . .v.
n.
bien faire une chose, parvenir, réussir. Je n'y aveindrai pas ;
voilà du linge qui est mal aveint, c.- a- d. mal blanchie…..
AVEINERIE .s. f.
terre ensemencée en avoine.
AVOUER .v. a.
consommer. Elle m'a avoué deux morceaux de savon.
AVOUE- TOUT .s. m.
bobèche disposée de manière à consommer entièrement les bouts de chandelle.
AV'OUS, contraction, pour
: avez- vous.
BAFRER .v. n.
manger avec avidité. – « Y no faut sans baufrer par fois trousser nos quilles.
» (Muse normande.)
BAGNOLE .s. f.
charrette, voiture délabrée.
BAGOULIER .s. m.
qui fait du bagout.
BAGOUT .s. m.
loquacité, paroles stériles.
BAILLER .v. a.
donner. Souvent le futur de ce verbe se contracte ; au lieu de : Je baillerai,
on dit : Je bârai, etc.
BALLER .v. n.
pendre, être pendant. Les bras lui ballent ; il a les bras ballants
« J'avois de biaux gartiers… qui me balloient ava les gambes.
» (Vieilles chansons normandes)
BANNAU .s. m.
tombereau. Au XVe siècle, on disait : Bennel ; plus tard, Bannel.
(Archives de Pont- Audemer).
BANQUE, BANQUÉE .s. f.
terre relevée, sur le bord d'une gueule de fossé, pour servir de clôture.
BAR .s. m.
établi incliné sur lequel on pose les troncs d'arbres destinés à être débités
en planches.
BARRE .s. f.
barrière. Un villageois poli reconduit les visiteurs jusqu'à sa
barre.
BARRRT .s. m.
porte à claire voie que l'on place, comme supplément de fermeture, à l'entrée
de la cuisine d'une maison rurale, pour empêcher l'invasion de la volaille.
BATS-TA-LESSIVE, BAT-A-LESSIVE,
BATTE-LESSIVE .s. f.
nom vulgaire donné à l'oiseau nommé hochequeue, bergeronnette ou lavandière.
BAUDET .s. m.
lit de sangle.
BAVERETTE, ou BAVETTE
.s. f.
pièce d'estomac qui surmonte le tablier des paysannes.
BAVEUSE .s. f.
tablier montant qu'on met aux enfants pour garantir leurs vêtements.
BÉATILLES .s. f.
abats, fressures.
BÉCOT .s. m.
baiser.
BÉCOTER .v. a.
donner des baisers.
BÉDACHON .s. m.
le dernier éclos d'une couvée de poussins. Par extension, l'enfant dernier né.
BEDAN .s. m.
nom d'une variété de pommes à cidre.
BÉDIÈRE .s. f.
lit. En anglais, bed signifie lit.
BÉGUER .v. n.
bégayer.
BEIGNE, ou BIGNE
.s. f.
bosse dans les chairs, provenant d'une contusion.
BEINDER .v. n.
tirer au sort pour savoir qui jouera le premier.
BENNE, ou BINE .s.
f.
réservoir en paille, ayant la forme d'un grand baril, et destiné à conserver le
grain. On dit proverbialement : sas (saoul) comme une bine.
BER .s. m.
berceau. « Et maint enfez petis en ber envelupé. » (Roman
de Rou.).- « Ce qui s'apprend au ber ne s'oublie qu'au ver. » (Pro.v.
normand.).
BÈRE, ou plutôt BEIRE
.s. m.
cidre. Du verbe boire, qui se prononce beire.
BESER .v. n.
courir ça et là, être toujours hors de chez soi.
BESOT .s. m.
même signification que bédachon.
BÉTOURE, ou BÉTOIRE
.s. f.
puisard ou perte d'eaux qu'on établit dans un champ. Au figuré,
un ivrogne.
BIBE .s. f.
petit bouton ou tumeur à la peau.
BIBET .s. m.
moucheron
« L'araigne qui
tous les ans
Faisoit son nid au dedans,
Avec mouches et bibets
Qu'elle prenoit dans ses rets. »
(Vieilles chansons normandes.)
BISC- EN- COIN (DE)
de travers, en diagonale.
BITER .v. a.
toucher. « De moi je n'y bite tant que l'on m'assaille.
» (Farce des Pates Ointes.)- Voyezabiter.
BLAÎTE, ou BLÊTE
.s. f.
pelotte de neige, morceau de terre.
BLAÎTER, ou BLÊTER
.v. a.
jeter des blaîtes.
BLÈQUE .adj.
blette, mou. Une poire blèque. D'un homme sans énergie,
on dit proverbialement : il est mos comme une peire blèque.
BLÉRIE .s. f.
terre ensemencée en blé. « Une belle campagne de blaerie
». (De Bras, antiquités de la Normandie.)
BLESSE, ou BLÈCHE
.s. f.
mal intérieur provenu à la suite d'une chute. « Le médecin à
l'urine déclara que l'enfant avait une blesse. » (Canel ; notice sur l'abbé
Baston.)
BLIN .s. m.
bélier « La toison du belin, en lieu de manteau Sébelin.
» (Roman de la Rose.)
BLINGUER .v. n.
regarder en clignant les paupières, prendre ses mesures pour toucher un but.
BLOT .s. m.
lourdaud qu'on ne peut faire changer de place.
BLUETTE .s. f.
petite plante des bois, nommée vaccinium myrtillus.
BOISE .s f.
morceau de bois.
« La boise de Saint- Nicaise de Rouen était une poutre immense
scellée avec des barres de fer dans le cimetière de l'église et qui servait de
siège magistral. » (Floquet ; Revue de Rouen 1836.)
BOISETTE .s. f.
petite boise.
BOQUETTE (Noix)
noisette des bois.
BOTTE .s. f.
tonneau de la contenance de 500 pots, plus court et plus ventru que ceux de l'arrondissement
de Pont- Audemer, qui mesurent 600. La botte est plus spécialement en usage à
Rouen.
BOUFFER .v. n.
manger avidement, à pleine bouche. Unbouffe- la- balle est un gourmand.
BOURGUELÉE .s. f.
feu de joie.
BOURRE .s. f.
femelle du canard.
BOURRET .s. m.
canard. Il est goulu ment un bourret.
BOURRETTE .s. f.
petite bourre.
BOUSIN .s. m.
bruit, tumulte, et, par extension, un mauvais lieu.
BOUSTIFAILLE .s. f.
grande chère.
BOUTER .v. a.
mettre. « Boute- les toujours chinc à chinc. » (Farce des
Quiolards).
BRANGÉ .adj., que l'on emploie
pour qualifier les bêtes bovines, dont le poil est nuancé en bandes verticales.
BRAUDÉ .adj.
barbouillé, sali.
BRAUDÉE .s. f.
femme de mauvaise vie.
BRAUDER .v. a.
Il est braudé jusqu'aux oreilles.
BRÉE .s. f.
l'oiseau appelé rouge- gorge.
BRÈQUE-DENT .s. m. et f.
une personne qui a des dents de moins.
BREUILLE .s. f.
ventre, entrailles.
BREUILLU .adj.
qui a un gros ventre.
BRICHET .s. m.
pain que l'on fait pour les bergers.
BRIGNOTTER .v. n.
manger du bout des dents, mangeotter, comme on dit vulgairement.
BRIN .s. m. et ad.v.
peu. Le brin de bien que j'ai. Avec une négation,
il signifie nullement : il ne lui en est brin resté.
BRINCHE ou BRINGE
.s. f.
menu branchage pour allumer le feu.
BROU .s. m.
le gui (viscum album), plante parasite qui pousse sur les pommiers et autres
arbres.
BROUS ou BRODÉE .s.
f.
mousse ou écume qui se développe à la bouche des chevaux, à la gueule des chiens
enragés, etc.
BRUINERv. impers.
brouillasser.
BRUISSOUR .s. f.
« Un enfant s'esbattoit par soy d'un petit moulinet fait d'une
noix. » (Rabelais.) Ce moulinet est fait dans notre contrée avec un noyau
d'abricot et il a pris son nom du bruit sourd qu'on en tire.
BRUMENT .s. m.
nouveau marié, le mari de la bru.
BUHOT .s. m.
corne dans laquelle les faucheurs tiennent et humectent leur pierre à aiguiser.
BUNETTE .s. f.
fauvette d'hiver.
BUSOQUER .v. n.
s'occuper de peu de chose, passer son temps à des riens.
BUTER .v. n.
chopper.
BUTTE .s. f.
jeu qui se joue avec un bouchon sur lequel on empile des monnaies et que l'on
vise à renverser avec d'autres monnaies.
CABINE .s. f.
ravin profond, trou creusé par l'eau.
CACHE .s. f.
c'est tout simplement le mot chasse. On l'emploie avec diverses significations
; ainsi : du cidre qui a de la cache est du cidre qui a de la force ;
une vache qui est en cache est celle quibése, c'est- à- dire qui court dans
le pré avec une sorte de frénésie, ce qui arrive notamment à l'époque du rut.
CACHETTE .s. f.
mèche de fouet. En rectifiant la prononciation, ce mot donne : chassette.
CADŒIL ou CADŒUIL
.adv.
louche, qui regarde de travers.
CAÏEU .s. m.
moule, coquillage bivalve.
CAIMAND Voy. QUAIMAND.
CALEUX .adj.
indolent, paresseux, qui n'a pas de courage. En style familier,
caler ou caller la voile signifie baisser le ton, se soumettre. C'est de là quecaleux
doit venir.
CALIMOULETTES (A)
à califourchon. On dit aussi, tout simplement : à moulettes.
CALLOUET .s. m.
petit caillou.
CAMBRETTE .s. f.
Ce mot, qui signifie petite chambre, est employé généralement pour désigner
la laiterie, l'endroit où l'on dépose le lait.
CANE .s. f.
cruche en fer blanc pour le lait, ou en terre cuite pour d'autres usages.
CANIR .v. a. et pron.
chancir, moisir.
CANIVIEUX .s. m.
chènevis.
CAPET- TEIGNEUX .s. m.
la grande bardane.
CAPOGNER .v. a.
froisser, pétrir, déchirer avec les mains. Ils se sont rudement
capognés l'un et l'autre.
CAPUFOS ou CAPIFOS
.s. in.
colin- maillard. ...
jeu grec, selon Hesychius. « - Vous eussiez cru qu'ils fussent gens jouant
au chapifou. ».(Rabelais.)
CARPELEUSE ou CHARPELEUSE
.s. f.
chenille. Charpeleuse signifie littéralement chair velue.
CASSELOGNE .s. f.
couverture servant à envelopper les enfants.
CASTABROUI .adj.
à moitié ivre, entre deux vins.
CASTAFOUINE .s. f.
matière fécale.
CATON (A) .adv.
en cachette, comme on dit ailleurs à catimini.
CATONNET .s. m.
fleur du saule et du coudrier.
CAUFFAILLE .s. f.
bruyères, joncs-marins, genêts ou broussailles mis en fagot pour chauffer le four.
CAUMÉE .s. f.
portion de la tige du blé d'abord laissée sur pied, au moment de la moisson, et
recueillie ensuite séparément avec l'herbe pour la nourriture des bestiaux.
La véritable orthographe est chaumée.
CENSÉMENT .adv.
pour ainsi dire, à peu près. Il est censément malade.
CHABRENA .s. m.
savetier.
CHACOUDER .v. a.
jouer du coude avec quelqu'un, en signe d'intelligence.
CHARFOUIR, SARFOUIR ou SERFOUIR
.v. a.
bêcher la terre au pied des arbres fruitiers.
CHARRIÈRE .s. f.
côte encavée par l'écoulement des eaux pluviales de la plaine.
CHEMINEAU .s. m.
petit pain fait de pâte passée dans l'eau chaude avant la cuisson, et dont on
ne fait usage que vers le temps du carême.
CHERME, CHERNE ou CHARME
.s. m.
fosse pour planter un arbre, ou la portion de terrain bêchée au pied d'un arbre,
quand on le serfouit.
CHIBOT ou CIBOT .s.m.
ciboule. On dit proverbialement : se tenir droit comme chibot.
CHICON .s. m.
laitue romaine. On dit aussi un chicon de pain, pour un morceau
de pain.
CHIDRER .v. n.
s'affaisser, rompre sous le poids. Cet arbre a tant de fruit qu'il
en chidre.
CHIGNELLB .s. f.
prunelle sauvage.
CHINCHER et SINCHER
.s. m.
fripier. Il y a à Rouen une rue de ce nom, « où ch'est que ces
chinchers étalent leurs habits. » (Muse norm.)
CHIQUETTE .s. f.
linge usé, déchiré. C'est une çhiquette ; il n'est
que couvert de chiquettes. Un petit morceau de pain est appelé,
par extension, une chiquette de pain.
CHOCHONNER .v. n.
posséder, entretenir et utiliser un cheval en commun.
CHOPER .v. a. et . .v. n.
trinquer. On dit indifféremment : chopons, ou chopons nos verres.
L'emploi de ce verbe devient plus rare.
CHOQUER .v. a. et . .v. n.
trinquer.
CHOULER .v. a.
brusquer, mal recevoir.
CHOUQUE .s. f.
grosse racine d'arbre , et aussi tout le pied de l'arbre.
CHOUQUET .s. m.
tronc de bois qui sert de siège et à divers usages de cuisine. – « L'un apportoit
des chouquets de pommier. » (Muse normande.)
CLAFRÉE .s. f.
surabondance. Il y avait une clâfrée de fricot. On
emploie principalement ce mot pour exprimer l'effet produit sur le sol par une
masse plus ou moins liquide qu'on y jette. En voilà une clâfrée
!
CLANCHE .s. f.
loquet de porte.
CLANCHER .v. n.
lever la clanche.
CLAPOT .s. m.
Ce mot s'emploie pour exprimer l'action d'un homme qui fait de l'embarras
pour rien, qui se mêle de tout sans motif et sans utilité.
CLAPOTIER .s. in.
qui cause et se mêle de tout à tort et à travers.
CLAQUE .s. f.
bavard ou bavarde.
CLAQUET .s. m.
nom populaire de la digitale.
CLICHE .s. f.
diarrhée. De cliche on a faitclichard.
CLINQUE .s. f.
coqueluche.
COCHEUX .s. m.
sorte de verger rempli d'arbres fruitiers à couteau qui ne se trouve que dans
les communes du Marais- Vernier et de Bouquelon.
COCOPONETTE .s. m.
homme qui s'occupe du ménage, tâtillon, chauffe-la-couche. On dit
dans le même sens : un metteux de poules couver.
COEURU .adj.
qui a du coeur, de la force, de la consistance. Un homme coeuru.
Du cidre coeuru. Une poire coeurue (celle qui a des qualités
opposées aux qualités de la poire fondante.)
COIMELER .v. n.
pousser des cris plaintifs, pleurer en criant.
COINCHE .adj.
dissimulé, qui regarde de travers ou en dessous.
COQCIDROUILLE, COQCIGRUE
.s. m.
grand dadais.
COTTERET .s. m.
bois de grosseur moyenne, lié en faisceau, pour le chauffage ou la cuisine.
COUCHETTE .s. f.
linge de propreté que l'on met autour des jeunes enfants.
COUPELLE .s. f.
bouquet de branchage qui forme la cime des arbres de haut jet.
COUPET .s. m.
sommet, le point le plus élevé, cime. « Quand nous fûmes sur
le couppet du mont Belon. » (1548.) « Pour grimper au coupeau
du Parnasse françois. » (Regnier.)
COURÉE .s. m.
le coeur et le mou d'une vache, d'un boeuf. Au figuré, une femme
malpropre et délabrée.
COURTIL .s. m.
jardins légumiers du Marais- Vernier. « D'eau notre courtil s'arrose.
» (O. Basselin.)
COUTRE .s. m.
porteurs de morts aux inhumations. En allemand : Kuster.
Dans le moyen- âge, les coutres étaient des officiers ecclésiastiques portant
la mître.
COUVET .s. m.
chauffe- pied en terre cuite, qu'on appelle gueux à Paris.
CRACHINER ou CRASSINERv.
impers.
brouillasser. Il ne pleut pas, il crachine, il crassine.
CRADEAU .s. m.
petit poisson de la Basse- Seine.
CRAÎTURE .s. f.
croissance. Ce jeune homme est d'une belle craîture, c'est- à- dire,
d'une belle venue.
CREIGNASSE ou CREIGNE
.s. f.
les racines des mauvaises herbes que l'on doit enlever des terres labourables.
CREIGNEUX .adj.
envahi par la creigne. Une terre creigneuse.
CRÉTINE .s. f.
eaux qui, dans les moments d'orage, viennent des crêtes des collines envahir les
chemins et grossir les cours d'eau.
CRÊTIR .v. n.
éprouver un frissonnement, une émotion pénible. J'en ai créti.
Cela m'a fait crétir.
CRIQUET .s. m.
grillon.
CULOINER .v. n.
lambiner, aller nonchalamment, agir de mauvaise grâce, chercher à se tirer le
derrière de la presse, comme on dit vulgairement.
DALLE .s. f.
pierre d'évier, lieu où l'on lave la vaisselle.
DÉBRAUDER .v. a.
débarbouiller.
DÉCADUIRE (se)v. pron.
devenir caduc. Il se décaduit ; il est bien décaduit.
DÉCOUTILLER .v. a.
découdre brusquement, en déchirant l'étoffe. D'un homme dont les
vêtements sont en mauvais état, on dit : il est tout découtillé.
DÉGANNER .v. a.
contrefaire pour tourner en ridicule. Je ne veux pas que vous me
déganniez ainsi.
DÉGARILLER .v. a.
dégrader, détériorer.
DÉGOTTER .v. a.
soustraire, dévaliser.
DÉGOUGINER .v. a.
dégourdir, déniaiser.
DÉGREDOUILLER .v. n.
s'écrouler avec bruit. – La muraille vient de dégredouiller.
DÉGUENASSER .v. a.
tirer hors, faire sortir. Il est difficile de lui faire déguenasser
son argent.
DÉJUQUER .v. a. et n.
ôter les poules du juchoir.- Lever le siège, déguerpir.
DÉLURÉ .adj.
expérimenté, difficile à surprendre. C'est un déluré gaillard.
DEMENTER (se)v. pron.
se mêler. Il se démente de tout. « Démente tai
de coudre tan soulier. » (Muse normande.)
DEMIARD .g. m.
mesure d'un décilitre.
DEMION .s. m.
mesure d'un quart de litre.
DÉPÊQUER
Ce verbe a plusieurs significations différentes. On dépêque, quand on marche dans
une boue épaisse, dans un marécage.
Se dépêquer équivaut à se dépêtrer : « Dépêque tai d'là ment-est-che
que tu pourras. »
DÉPICHER .v. a.
dépiécer, déchirer.
DÉPOTAYER .v. a.
qui a une signification restreinte, puisqu'il ne s'applique qu'au commerce des
liquides en détail. Dépotayer du vin ou du cidre, c'est en vendre au litre.
Un dépotayer est l'établissement où l'on débite les liquides.
DEQUOI .s. m.
avoir, propriété. Il a mangé son dequoi.
Autrefois on disait de quoi en deux mots ; on le dit encore maintenant,
au reste. Ainsi : il est parvenu à gagner de quoi.
DESSOTIER .v. a.
Il m'a dessotté , c'est- à- dire : il m'a refait, il m'a volé,
et, par là, il m'a appris de l'esprit.
DÉTOURBER .v. a.
déranger, détourner, empêcher. « A crier les destorboient.
» (Rom. de Rou.)
DÉTOURNER .s. m.
dérangement. Ce mot est aussi ancien que le verbe qui précède.
DEU .s. m.
corruption de deuil ; chagrin, douleur. – « La duchesse s'en dut d'ire et de
duil resver. » (Rom. de Rou.)
DEULER .v. n.
avoir du chagrin, souffrir. C'est principalement dans cette dernière
acception que l'on prend le verbe deuler. Voilà un arbre qui deule
; la santé de cet homme deule depuis quelque temps....
DEVALER .v. n.
descendre, s'en aller. Ce mot, de la langue romane, est surtout
en usage avec la seconde signification.
DEVAUTIAU ou DEVAUTET
.s. m.
tablier.
DEVINADE .s. f.
mot générique qui comprend les énigmes, charades, logogriphes, etc.
DIGOURE, ou DIGUETTE
.s. f.
petit morceau de bois pointu, et plus particulièrement celui dont on se sert pour
accélérer la marche des ânes.
DORÉE .s. f.
tartiné de beurre ou de confiture .
DOSSER (se)v. pron ; lutter
corps à corps.
DOUBLIER .s, ..
grande nappe en double- oeuvre.
DOUET, ou DOULT .s.
m.
ruisseau, cours d'eau.
DRAIN .adj.
dernier. Il est rarement employé.
DUIRE .v. a.
réduire, dompter. C'est un enfant difficile à duire.
EBOUILLIR .v. n.
s'ouvrir, s'épanouir. Les bourgeons commencent à ébouillir.
EBREUILLER .v. a.
broyer, écraser. Ebreuiller quelqu'un, c'est à proprement parler
lui écraserla breuillle, l'éventrer.
ECAILLOTÉ .adj.
éveillé, gaillard.
ECALLOUER .v. a.
Enlever les cailloux d'un champ.
ECHAUDE .s. f.
bateau plat dont on se sert sur la rivière de Risle. Au XIIIe siècle, le nom latin
de ce genre de bateau était escanda. (Olim du Parlement de Paris.)
ECOUCHEUX ou ECOUCHEUR
.s. m.
celui qui broie le lin et le débarrasse de la partie ligneuse de sa tige.
ECOUFLE .s. f.
cerf- volant que les enfants font aller en l'air au moyen d'une ficelle qui le
retient.
ECOURGIS .s. m.
cravache.
ECOUSSE .s. f.
laps, espace de temps.
ECOUSSIN .s. m.
la portion de menue paille, ou balle de blé, que l'on donne à un cheval.
EFFOUCHER .v. a.
effaroucher, effrayer. Ils étaient tout effouchés. On
emploie souvent cette phrase : il n'est pas d'effouche, pour exprimer qu'un homme
nes'effouche pas facilement.
ELINGARD .adj.
long et mince. Un arbre élingard.
ELINGUE .s. f.
fronde avec laquelle les enfants lancent des pierres au loin.
ELUGER .v. a.
ennuyer, étourdir, fatiguer. « Je m'eslugeois de voir telle terreur
panique. » (Muse normande.)
EMOUQUER (pour émoucher)
.v. a.
sabouler, rappeler à l’ordre, souffleter. Tu vas te faire émouquer.
ENCROUER .v. a.
accrocher, suspendre. Il a encroué son chapeau dans un arbre.
On retrouve ce verbe dans le Roman de Rou et autres ouvrages de ce
temps et postérieurs.
ENDEVINER (s')v. pron.
renoncer à deviner, jeter sa langue aux chiens.
ENGE .s. f.
engeance, espèce. Je vous en donnerai de l'enge. Des
volailles de la grande, ou de la petite enge.
ENGER .v. a.
pourvoir, munir. Je vous engerai de telle chose.
ENTINCHER .v. a.
attacher une vache pour limiter son parcours.
ENTINCHER .v. a.
exciter, provoquer. Le mot patois pour désigner l'entincheur est : entinchemélée.
on trouve le verbe entincher dans la Muse normande.
EPLAPOURDIR .v. a.
étonner, stupéfier.
EPOTIR .v. a.
écraser.
EPOUFFER .v. a.
essoufler.
EQUEURCE .s. f.
élan. Prendre son équeurce pour sauter un fossé.
ERCHE .s. f.
étendue de terrain nécessaire pour tourner une charrue, une voiture.
Il y a de l’erche.
ESSAVER (s')v. pron.
s'entamer la peau. Les petits enfants s'essavent ; Il
a la peau essavée.
ESSENTE .s. f.
garniture en ardoise (jadis en petites parcelles de bois) de la charpente ou des
faces d'une maison.
ESSENTER .v. a.
garnir d'essente.
ETIBOQUER .v. a.
tourmenter, taquiner.
ETIBOT .s. m.
esquille de bois, et, par extension, plume naissante des oiseaux.
Il m'est entré un étibot dans les chairs ; cette
volaille est remplie d'étibots.
ETON .s. m.
coup sec, secousse précipitée. Au lieu d'un effort continu, donnez
un coup d'éton, ou faites un éton.
Eton est employé quelquefois aussi pour contre-coup,
ETOQUER .v. a.
soutenir, appuyer avec des cales.
ETORER .v. a.
pourvoir, approvisionner. Je vous étorerai de cette espèce de fleurs.
On dit aussi étorer des noix, et cela signifie les dépouiller de
leur écorce.
ETOUT ou bien ITOUT
.conj.
aussi. – « Je l'attendions tretous et Jéremie étout. » (Muse norm.)
ETRIVER .v. n.
enrager, endiabler. On dit surtoutfaire étriver.
FAIMVALLE .s. f.
fringale, appétit désordonné.
FAINETTE .s. f.
fruit du hêtre.
FALLE .s. f.
estomac des oiseaux, et, par extension, estomac de l'homme, ventre, panse.
Il a la falle pleine, il s'est bien bourré la falle.
FALLU .adj.
qui a une grosse falle, un gros ventre.
FANES .s. f. p.
herbes qui croissent au fond des rivières et flottent à la surface.
FANFAGNER .v. n.
parler du nez et avec difficulté, et, par extension, balbutier, hésiter, ne savoir
que dire.
FERRET .s. m.
tonneau cerclé en fer.
FETON .s. m.
embarras pour peu de chose ; apprêts, précautions, soins exagérés pour des riens.
FETONNER .v. n.
faire du feton.
FETONNIER .s. m.
qui fetonne, qui se mêle de tout.
FEURE .s. m.
paille. « Erent li uns allez au feurre. » (Rom. de Rou.)
FIENT .s. m.
fumier. « Charger en un bannel les fiens... de la ville.
» (Archi.v. de Pont- Aud., XVe siècle.)
FILLAT .s. m.
galette du jour de l'an en forme de bonhomme.
FILLETTE .s. f.
tiges de blé ou de seigle groupées et maintenues debout dans un champ.
FLAMBÉE .s. f.
feu clair et de menu bois. Galette au sel, cuite au milieu de la
flamme du four que l'on chauffe.
FLÊLERv. a ; donner de grands
coups de fléau, et, par extension, donner des coups de bâton, des coups de fouet.
FLÊS .s. m.
fléau pour battre le grain.
FLIPPE .s. m.
liqueur faite de cidre doux, chauffé, avec addition d'eau- de- vie, de sucre et
de citron.
FLONDRE .s. f.
poisson plat de la Risle et de la Basse- Seine.
FLUME .s. f.
flegme, pituite.
FOISI .s. m.
briquet.
FOSSET .s. m.
ouverture dans laquelle on place le cannelle.
FOURQUEFIÈRE .s. f.
fourche à trois branches de fer. « Il a des dents comme une fourquefière.
» (Muse normande.)
FOUTAISE .s. f.
bagatelle, niaiserie.
FOUTINER .v. n.
faire des riens, des futilités.
FOUTINIER .s. m. et f.
qui foutine.
FROUTREAU .s. m.
tapage, querelle et môme orage.
FRAU .s. m.
On désigne par ce mot, dans le canton de Bourgtheroulde, les places
libres qui se trouvent auprès des églises ou ailleurs. Ils se réunirent
sur le frau.
FRICOT .s. m.
mets, ragoût.
FRICOTER .v. n.
faire ripaille.
FRICOTEUR .s. m.
qui fait la ripaille.
FRIPER (se)v. pron.
se frotter dans ses vêtements pour calmer une démangeaison.
FUTER .v. a.
duper, rabrouer, donner une correction. Je le fûterai et il n'y
reviendra pas. Il a été fûté.
Le participe passé de ce verbe, employé séparément, a la signification
de fin, subtil, difficile à surprendre.
GABLE .s. m.
appentis adossé à un bâtiment. En usage dans les cantons de Routot
et de Bourgtheroulde.
GADELLIER .s. m.
arbrisseau qui produit des gadelles.
GADELLES ou GADES
.s. f. pl.
groseilles.
GAFFÉE .s. f.
morsure faite par un animal. San quien m'a baillé eune gaffée.
GAGNE .s. fém.
gain, bénéfice.
GAILLER .v. n.
ne trouver aucune nourriture à son goût, et, par extension, gaspiller.
GAILLEUX .adj.
qui ne trouve rien à son goût. qui gaspille.
GALANDAGE .s. m.
enduit appliqué sur une muraille.
GALAPIAU .s. m.
vagabond, fainéant.
GALLON .s. m.
ancienne mesure de deux pots ou de quatre bouteilles.
« Six gallons de vin clairet, blanc et vermeil. » (Archi.v.
de Pont- Aud., XVe s.)
De nos jours, petite cruche en terre, sans capacité déterminée.
GENCER (se)v. pron.
se poser, se carrer et même se vêtir,
GENÉE .s. f.
race. Il se prend en mauvaise part. Laissez là cet homme et sa genée.
GERQUER (se)v. pron.
se placer plus haut que les autres. Il faut qu'il trouve toujours
à se gerquer. « Il abat ceux qui sont trop haut gerqués.
» (Muse norm.)
GIFFLE .s. f.
tape, soufflet.
GIFFLER .v. a.
souffleter.
GIRIE .s. f.
grimace, fausseté, supercherie.
GLEU .s. m.
botte de paille. On dit un gleu de paille, et quelquefois, tout
simplement, un gleu.
GNOLE .s. f.
homme molasse, sans force physique et sans énergie morale.
GNOLU .adj.
mou et humide. Une terre gnolue.(Dans le Roumois.)
GOGUENÉE .s. f.
grosse toile d'étoupe, étoffes grossières.
GOMION .adj.
gourmand, qui mange en cachette. ou dit, dans le même sens : manger
en mion.
GOUINE .s. f.
femme de mauvaise vie.
GOULE .s. f.
gueule, bouche. « Le cheval la goule basse... » (Chron.
anglo- norm.)
On dit à quelqu'un : « Je ferai taire ta goule. »
Goule est la racine du mot français goulu
GOUZER ou GOUGER .v.
n.
avoir le vice de prononciation, appelé sussement ou zézaiement, et qui consiste
à donner au j le son du z et au ch le son du c.
GRÉGIR .v. a.
froncer, plisser. Grégir une robe, c'est y faire le grégi nécessaire
au jupon, aux manches,
c'est aussi y faire accidentellement des plis confus, comme lorsque
l'on est trop pressé dans une voiture.
Le front commence à lui grégir,
GRÉMIR .v. n.
frissonner. On dit aussi dégrémir, dans le même sens.
GRIGNE .s. f.
moue, grimace, Pourquoi nous fais- tu la grigne ?
GRILLER .v. n.
glisser. Il s'est blessé en grillant sur la glace.
GRIMER .v. a.
égratigner. Le chat lui a grimé la main.
GRIVOTÉ .adj.
grivelé, tacheté de gris et de blanc, comme la grive.
GROUÉE .s. f.
fruits tombés des arbres pendant la nuit et qu'on ramasse le matin.
GRUGEON .s. m.
C'est ce qu'on appelle la basse farine, celle dans laquelle il reste encore un
certain mélange de son.
GUEDÉ .adj.
nourri, rassasié outre mesure.
GUENONNER .v. n.
avoir l'air piteux, morfondu ; ce que l'on exprime encore par ces
mots : faire le guenon (en patois, guenon est du masculin).
GUETTER .v. a.
attendre. Je l'ai guetté long-temps, il n'est pas venu.
Il signifie aussi regarder.
GUIGNEUX .adj.
moqueur, rieur.
GUILLE .s. f.
diarrhée.
GUILLER .v. n.
avoir la guille. En français, guiller se dit de la bière qui fermente
et jette sa levure.
HAGUE .s. f.
morceau de bois long et de médiocre grosseur. On appelle hagues principalement
les plus gros morceaux d'un fagot. « J'allai quérir la hague
d'un fagot. » (Muse norm.)
HAITER .v. n.
plaire, convenir. – « La fin me plaist et me haite. » (Rom. de Rou.)
HALITRE .s. m.
légère gerçure des lèvres, des mains, produite par l'impression de l'air trop
vif. Sa racine est le mot hâle.
HANÉ .adj.
brûlé, noirci par le soleil. Il y a plusieurs jours que ce blé est
hané.
HANNEQUINER .v. n.
marcher avec effort, faire une chose avec peine, tergiverser, répondre avec embarras.
HANSART .s. m.
couperet.
HANT .s. m.
fréquentation des bestiaux, volailles, etc. On dit proverbialement
: le plant aime le hant.
HAQUER .v. a.
dégoûter d'une chose par l'excès ou par un usage trop prolongé. Il
est parvenu à le hâquer de pâtisseries. Je suis hâqué de viande.
Ce verbe ne viendrait- il pas du mot hâque, dont on se sert pour
désigner les harengs préparés pour la pêche ?
HARÉE .s. f.
grande pluie.
HARÊQUE .s. f.
paille de lin brisée et détachée par le travail de l'écoucheur.
HARICOTER .v. n.
marchander sans mesure.
HARICOTIER .s. m. et f.
homme ou femme difficile en affaire.
HARLAND et HARLANDER
présentent à peu près le même sens que haricotier et haricoter.
HERCHÉ ou HERCÉ (OEUF),
c'est- à- dire pondu sans avoir de coquille.
HAIRE .s. f.
animal fantastique qui est censé faire ses apparitions nocturnes pendant l'Avent.
HEUNE ou HUNE .s.
f.
tête.
HEURIBLE .adj.
précoce, qui vient de bonne heure.
HOCSONNER ou LOCSONNER
.v. a.
ébranler, secouer, agiter. J'entends hocsonner la porte.
HOUSTE .s. m.
mouvement. On ne l'emploie que dans cette phrase : être toujours
en houste.
Ce mot parait être une altération de la vieille expressionhost,
armée, expédition.
HUE .s. f.
huis, porte. On frappe à l'hue.
HUPET .s. m.
petit bout de chemin. Il n'y a plus qu'un hupet pour arriver.
IAUVEUX .adj.
aquatique et aqueux.
ICHITTE .adv. de lieu ; ici.
ILAU ou ILEU, id.
là. « Eloignons- nous d'ilau à kanke nous pourrons. » (Rom.
de Rou.)
JAFFE .s. f.
tape, soufflet.
JASTOISER .v. n.
jaser, babiller.
JAUNET .s. m.
renoncule des prés. Et aussi : pièce d'or.
JUMENTIER.
Ne se dit que des chevaux. Un cheval jumentier est un cheval vicieux.
LANDON .s. m.
bavardage, rabachage.
LANDONNIER .s. m. et f.
bavard, rabacheur.
LANDORE .s. f.
une femme molle, nonchalante.
LENDREIT .adv.
là, à cet endroit. – « Il voleit repeirier tost de là en dreit. » (Rom.du
M.- St- Michel.) Que faites- vous l'endreit ?...
LEUMER .v. n.
attendre en vain, faire le pied de grue. Vous m'avez fait assez
leumer.
LICOUETTE .s. f.
mèche de cheveux.
LINCHOIRE .s. f.
morceau, fragment long et mince. Une linchoire d'étoffe,
une linchoire de chai (de viande).
LIVARAIS.
Ce mot ne s'emploie qu'avec la préposition en. En
livarais, qui veut dire : en désordre, sens dessus dessous.
LOCHER .v. a.
ébranler, secouer. Allez locher les pommes. On loche
un arbre pour en faire tomber les fruits.
Passant au neutre, ce verbe, signifie : chanceler, tituber.
LONGRINES .s. f.
pièce de bois placée horizontalement dans un mur.
LOQUETU .adj.
couvert de loques, réduit à l'état de loques.
LOURRE .s. f.
tige de poireau qui donne des sons graves et plaintifs quand on souffle dedans.
Proverbe : il pleure comme une loure.
LUQUER .v. a.
regarder. « Je m'y trainis pour y luquer. » (Muse Norm.)
On dit plus souvent reluquer. To look, en anglais, signifie
regarder.
MACHOQUE .s. f., ou TÊTE
DE MACHOQUE
tête dure, homme entêté.
MAGNAN .s. m.; chaudronnier.
Ancien mot.
MAGUE .s. f.
estomac des volatiles.
MAIRER ou MÉRER .v.
a.
laver en pressurant. Ayez soin de bien mairer le beurre, avant de
le saler.
MANJURIAU .s. m.
mangeur de bien, ou plutôt, en patois : mâqueux de bien. Jadis on
appliquait ce mot aux agents du fisc, gens qui mangeaient les contribuables.
MALE ou MARLE .s.
m.
marne.
MALIÈRE ou MARLIÈRE
.s. f.
marnière. « Ce n'est marlière viez. » (Rom. de Rou.)
MAN .s. m.
ver blanc, larve du hanneton.
MANNE .s. f.
corbeille.
MAQUAILLE .s. f.
aliments grossiers, nourriture que l'on donne aux pourceaux, et,
en même temps, nourriture abondante. « Y avais, d'la mâquaille
pour vingt- chinq personnes, et j'étions dix. »
MAQUER .v. a.
manger en gourmand, ou avec un grand mouvement de mâchoire.
Mâquer de has (de haut), c'est-à-dire comme un homme qui n'a pas
d'appétit.
MAREYEUR .s. m.
qui transporte la marée.
MARTIÈRE .s. f.
lieu où l'on dépose le marc des pommes brassées.
MARUBLER .v. a.
meurtrir, contusionner.
MASURE .s. f.
cour plantée de pommiers et édifiée de bâtiments.
MATES .s. f. pl.
lait caillé, appelé vulgairement lait sûr.
MAUTURE .s. f.
mal, plaie, etc. Il est tourmenté de toutes les mautures possibles.
On dit dans le même sens : c'est une mauture.
MÈGUE .s. f.
caillette pour faire le fromage.
MÉLE .s. f.
nèfle.
MÉLÉ .adj.
qui commence à se décomposer, à se marquer de taches jaunâtres, comme la chair
de la méle qui mûrit. Une pomme mélée.
MÉLIER .s. m.
néflier.
MENT .adv.
comme, comment. – Ment ! vous paritiriez sitôt ! Ment est-che qu'ous
dites ? Elle est grande ment san frère.
MENTE .s. f.
mensonge.- On dit aussi : Menterie.
MÉSIRETTE .s. f.
musaraigne.
MESSIER .s. m.
garde-champêtre. Dans la basse latinité, le messiarius était le
gardien de la récolte.
MIET .s. m.
peu. Le miet de bien que j'ai. Baillez m'en un miet.
– Avec une négation, il équivaut à rien : Il n'en est resté miet.
MIGÔT .s. m.
amas. Il fait un migôt d'écus. Des poires, des pommes
de migôt (qu'on garde pour les conserver, pour l'approvisionnement).- On dit aussi
amigôt. Peut-être faut-il écrire : migaut, amigaut.
MILET .s. m.
muguet, plante des bois ou des jardins.
MIRETTE .s. f., et MIREUX
.s. m.
petit miroir.
MIROUDER (se)v. pron.
soigner sa toilette, se tirer à quatre épingles. Elle ne fait que
se mirouder. Elle est miroudée comme une châsse.
MITAN .s. m.
milieu. Anciennement, ce mot était d'un usage général.
MOISSON .s. m.
moineau, passereau.
MOITER .v. a. et n.
manger entre les repas, sans besoin. Il moite toujours quelque chose,
on le voit toujours moiter.
MONNÉE ou MOUNÉE .s.
f.
le blé qu'on porte au moulin, et la farine qu'on en rapporte.
MONTÉE .s. f.
escalier, côte. « Cestui estimant que la maison deust tomber,
se retira au haut de la montée., » (Hist. mém. du vain effort des huguenots
au prieuré de Saint-Philbert en Norm ... XVIe siècle.) Vous trouverez
l'église au pied de la montée.
MORNIFLE ou MORNINFLE
.s. f.
soufflet sur le visage.
MOULÉE .s. f.
sciure de bois, et aussi la farine moulue qui revient du moulin.
MOULETTE, s. f.
moule. (Coquillage bivalve.)
MOULETTE (à) .adv.
sur le dos. Elle portait son enfant à moulette, c'est- à- dire,
comme on porte généralement les moules.
MOUQUETTE, s. m.
Mèche d'un fouet, et, par extension, mèche d'un bonnet de coton.
MOUVETTE .s. f.
cuillère en bois avec laquelle on remue les sauces. Au figuré, enfant
mâle ou femelle qui est toujours en mouvement.
On a conservé aussi le verbemouver (remuer, s'agiter), que l'on
rencontre chez les anciens trouvères : « Voissiez mouver conreis et chevetagne.
» (Rom. de Rou.)
MUCHE, MUCHETTE .s. f.
cachette.
MUCHER .v. a.
cacher. « En terre muchent et enfoent. » (Rom. de Rou.)
La véritable orthographe est musser.
MUCHE-TAN-POT .s. m.; détail
de boissons non autorisé. – C’est un scandaleux muche-tan-pot. – Ad.v.; à la muche-tan-pot,
en cachette.
MUCRE .adj.; humide.
MUCREUR .s. f.; humidité.
MULON .s. m.; meule de foin.-
On trouve ce mot dans le Roman de Rou.
NE N'TOUT . adv.
non plus. Je n'irai pas ne n'tout.
NEUTÉ, NOTU, NOUTU .adj.
noueux, qui a des noeuds. (ou des nouds, comme on dit vernaculairement.)
voici une devinade populaire dans laquelle figure cet adjectif : « Sagan
faisait des fagots nouyus, sa femme faisait des balais feuillus : écririez- vous
bien cela en quatre lettres ? »
NIANT .adj.
apathique, propre à rien, paresseux. Il est aussi actif que sa femme
est niante.
NIF .adj.
clair, limpide.
NIGDOUILLE .s. m.
niais, sot. C'est un grand nigdouille.
NIGONNER .v. n.
tâtillonner.
NIQUER .v. a.
moucher. Niquez vot'effant. Il s'est niqué avec ses
daigts.
NOUGER .s. m.
noyer.
NOUROLLE ou NOROLLE
.s. f.
brioche.
NUILE .s. f.
nielle (la carie des blés).
NUILÉ .adj.
attaqué par la nuile.
OHIN .s. m
défaut, entrave, embarras. Il a tous l's ohins. Il
y trouvera de l'ohin.
ORGERIE .s. f.
champ ensemencé d'orge.
OYOU .adv. de lieu
où. Oyoù qu'il est ?
PAGÉE .a. f.
fragment, morceau, parcelle. Il s'est écroulé une pagée de muraille,
une pagée de terre.
PAINTER ou PAITER
.v. n.
mesurer les distances pour savoir qui s'est le plus approché du but.
PAIRER .v. a.
égaliser, dresser, niveler.
PAIROTTER (se), v, pron.
soigner sa toilette, se tirer à quatre épingles.
PALER .v. a.
imprimer une salissure, au contact d'un poêle, d'une marmite. Elle
a pâlé sa robe ;- il s'est pâlé le visage.
PALETTE .s. f.
pelle de cheminée.
PALIER .s. m.
dressoir, étagère pour la vaisselle.
PALURE .s. f.
salissure superficielle.
PANNEAU .s. m.
sorte de selle longue composée de deux coussinets réunis, avec ou sans dossier.
PANNÉE .s. f.
pan d'habit, de redingote.
PANTALON .s.m.
violette sans odeur (viola canina, la violette des chiens ) .
PARAVIRÉ .s. f.
soufflet, coup du plat ou du revers de la main.
PARÉ, part.
exempté du service militaire, hors du danger de mort,
devenu limpide après le travail de la fermentation.
PARÉS .s. f.
muraille, paroi.
PAR-EN-SON .adv. et prép.
par dessus, au- delà. Il a sauté par-en-son le mur.- « Pus de
chent lieues par- en- sont la Bouille. » (Coup d'oeil purin.) On trouve par-en-son
dans le roman du Mont-St-Michel, ainsi que la simple préposition en-son (sur)
: « En son le Mont demain iras. »
PARPAILLE (à la) .ad.v.
à l'aventure, au hasard.
PECQ .s. m.
endroit convenu où l'on se place pour jouer aux quilles, au bouchon, etc.
PECQUER (se)v. pron.
se placer au pecq. Au figuré : se dresser, se tenir guindé, faire
l'important. « Tu te péquois si bien avec ta hallebarde.
» (Muse normande.)
PÊQUE .s. f.
toute chose sale et délabrée.- Au figuré : une femme malpropre. Pêque
doit être un objet pêqué, c.- à.- d. pêché, retiré de l'eau.
PERCHE .s. f.
mesure agraire, subdivision de l'acre.
PESOU .s. m.
paysan lourdaud et grossier. On dit aussi pétras, dans le même sens.
PICANE .s. f.
Portion de lande, de bruyère, de terre inculte.
PICOT .s. m.
le mâle de la poule d'Inde.
PIÈCHE, PIÈCE, A PIÈCE .s.
f., qui, avec une négation, équivaut à aucun, accompagné aussi d'une négation.
Il n'en reste plus pièce ; nous n'irons à pièche.
PIERROT .s. m.
grand bonnet à ailes des villageoises.
PIGNETTE .s. f.
cheville, que l'on fait avec un morceau de branche d'arbre.
PIGNOTEB .v. n.
manger comme quelqu'un qui n'a pas d'appétit, par petits morceaux et en faisant
son choix.
PIHOU .s. f.
femme de mauvaise vie.
PILE .s. f.- On dit dans
le même sens : brossée, raclée, rossée, tournée.
PINELLES .s. f. p.
brayes, culottes. Elle ferait mieux de racc'moder les vieilles pinelles
de s'n homme.
PIOTTE .s. f.
poule d'Inde. C'est une onomatopée inspirée par le cri de ce volatile.
PIPE .s. f.
petit fût à cidre. « Une demi- pipe de vin clairet d'Orléans...
une demi- pipe de vin de Beaune. » (Archi.v. de Pont- Aud., XVIe siècle.)
PIPET .s. m.
chalumeau de paille avec lequel on aspire un liquide, et voix criarde.
Elle nous étourdit avec son pipet.
PIROUE .s. f.
toupie, jouet de bois que l'on fait pirouetter sur lui- même.
PIVAT .s. m
boue délayée par les pas de la foule. J'sommes restés une heure
les pieds dans l'pivat.
PLAUDE ou BLAUDE
.s. f.
blouse, souquenille.
PLAUDER .v. a. et . .v. n.
battre le sol pour faire une aire.- Marcher lourdement.
PLEIGER .v. a.
soutenir, protéger.
PLEU- PLEU .s. m.
pivert. Onomatopée basée sur le chant de cet oiseau.
PLION .s. m.
baguette flexible, la partie extrême d'une ligne de pêcheur.
PLOMMÉE .s. f.
romaine, instrument à peser qui vient des Romains.
Ce mot signifie également pesée, pression : j'ai fait une plommée
et la porte a cédé.
Plommée vient de plomb. L'extrémité de la plommée était généralement
garnie d'une boule de ce métal.
PLUCOTTER .v. n.
qui exprime le travail des oiseaux de basse- cour cherchant leur nourriture sur
le sol.
PLUQUETTES .s. f. pl.
toutes sortes d'épluchures, petits morceaux qui se détachent du bois quand on
le casse.
POGNAFLER .v. a.
manier, palper, tâter.
POGNE .s. f.
main, poignet. Il a une bonne pogne (il serre- bien).
PONNELÉ .s. f.
fiente de la poule.
PONNELER .v. n.
mettre bas. Se dit d'une jument.- Ne devrait- on pas dire plutôt
: pollener, de pullus, poulain ?
PONNER .v. a. et . .v. n.
pondre. Notre poule va ponner. A la terminaison du participe passé
(ponnu), il semblerait que ce verbe dût être en ir.
PONNEUSE .s. f.
pondeuse.
POST .s. m.
poteau, pied- droit de porte. « L'animal fut pendu à un des posts
de la justice du Vaudreuil. » (Pièce du XVe siècle.)
POT .s. m.
mesure qui équivaut à deux litres environ.
POTE .s. f.
pot de terre garni d'une anse qui se développe au- dessus de son ouverture.
POTIN .s. m.
cancan. On en a fait le verbe potiner et le substantif potinier.
POUQUE ou POUCHE
.s. f.
sac, cousu par le bas et les côtés et n'ayant que le haut ouvert. « Pour deux
pouches de querbon. » (Compte de l'hôpital de Bayeux, 1466).- Au figuré le
mot pouque est employé pour désigner une femme de mauvaise vie.
POUQUETTE .s. f.
poche, gousset.
PRAS .s. f.
femme de mauvaise vie.
PRÉ .s. m.
poiré. « L'aide de l'estape à prendre sur le vin, le sildre et
le peray. » (Archives de Pont- Audemer, 1485.)
PREMIER QUE...
pour avant que. Premier que Paul épouse Marie, il passera de l'eau
sous le pont.
PRINSSEU .s. m.
pressoir.
PROMENOLLE .s. f.
primevère ces bois.
PUCHER .v. a.
puiser.
PUCHEUX et PUCHOIR .s. m.
ustensile pour puiser.
QUAIRE, s.f.
chaise.
QUAIRER (se)v. pron.
s'asseoir.
QUALITEUX .adj.
qui a des qualités.
QUÊCHER .v. n.
gronder, quereller.- On l'entend toujours quêcher.
QUÉMAND .adj.
mendiant.
QUÉMANDIER .v. n.
mendier.- Est- ce bien là l'orthographe de ces deux mots ? Dans sa deuxième satire,
Regnier a dit : « Puisque pauvre et quaymande on voit la poésie... »
QUÉRIR .v. a.
chercher. « Les terres iront quérant. » (Rom. de Rou.)
QUERMEINE ou QUERMINE
.s. f.
mauvaise viande, chair corrompue. On l'emploie aussi comme injure
: Vos êtes eune quermeine.
QUIACHE .s. f., ou QUIACHIN
.s. m.
scories de fer, de charbon de terre... la véritable orthographe
serait Chiasse.
QUIOLARD .adj.
qui a la quiole.
QUIOLE .s. f.
diarrhée.
QUIORON .s. m.
un être chétif, rachitique. C'est un quioron.
QUEUX .prép.
chez.- Voyez Cheux.
RACRAMACHI .adj.
rabougri, ratatiné, contracté.
RACROC .s. m.
repas d'un lendemain de noces.- « C'est la noce aujourd'hui, c'est demain le
racrot. » (Lalleman, la Campênade.)
RAGACHE .adj.
revêche, qui contrarie et contredit sur tout.
RAGUCHER .v. a.
aiguiser, exciter l'appétit. Voilà un fricot qui va me ragucher.
RAILER .v. a.
assortir. Je vous acheterai des fruits, mais vous les railerez.
RANDON, RANDONNER- Autre
forme des mots Landon, Landonner.
RANTER, ou RENTER
.v. a.
Ranter des bas c'est leur mettre une doublure au talon ;
ranter une pièce de bois, c'est lui ajuster, pour la rallonger,
une autre pièce de bois, au moyen d'une entaille et d'un tenon à angles inégaux;
c'est aussi refaire, par le tricot, une partie usée de vêtement.
RAPATA .s. m.
ramoneur de cheminées.
RASIÈRE .s. f.
mesure équivalant à un demi- hectolitre.
RATOURS .s. m.
détours. Il y a toujours à craindre des ratours avec lui.
RAYRES .s. f. p.
linges de couleur que l'on retire de la lessive avant les autres.
RÉAGE .s. m.
sillons ou raies tracées sur une pièce de terre.
RÉBETTIN .s. m.
troglodyte, roitelet, appelé aussi poule du bon dieu.
REBINDER .v. n.
recommencer une chose.
REBOUQUER .v. n.
renoncer à, avoir du dégoût. Il a tant mâqué qu'il rebouque sur
le fricot ; c'est un caleux qui rebouque sur l'ouvrage ;- je le
ferai bien rebouquer.
C'est une altération de l'ancien verbe reboucher ; « Le respect
d'une si notable vertu reboucha sa colère ; le fer n'y peut mordre
et rebouche contre. »
REBUTER .v. n.
baisser de prix.- Le blé a rebuté.
RÉCOPI .adj.
ressemblant. C'est son portrait tout récopi.
RECRUE .s. f.
rejeton .
REFORCER .v. a.
exciter, inviter avec instance.- Vous ne mangez pas ; faut- il vous réforcer ?
RELAI .s. m.
partie d'herbe à paître négligée par les bestiaux.
REMEUIL .s. m.
dégel.
REMEUILLEE .v. n.
dégeler.
REMUCRE .s. m.
remugle. Cet appartement sent le remucre. voir le
mot Mucre.
RENARÉ .adj.
rusé comme un renard, finasseur (que l'on dit Finassier, dans notre contrée).
RENCRUES .s. f. p.
alluvion, et aussi : herbes qui recroissent après une première coupe.
RENGRULI .adj.
rabougri.
REPAIRER .v. n.
rentrer, revenir. Il est absent ; mais il repairera ce soir.- On
retrouve ce verbe dans les vieux écrivains.
RÊQUER .v. a.
abattre (des fruits) avec un rêquet, et, par extension, donner des coups de bâton.
RÊQUET .s. m.
gaule pour abattre des fruits.- Par analogie : chandelle longue et mince.
RESSOUDRE .v. n.
sourdre.- L'eau ressourd à cet endroit ; il s'est ressourt, c.-à.-d.
: il s'est relevé (après une chute, une déconfiture, une maladie). _
REVIF .s. m.
nouvelle vigueur. II a pris du revif ;- voilà le revif qui arrive,
c'est-à-dire : voilà le temps des fortes marées qui arrive.
REVOINER .v. n.
reverdir. Cet arbre revoine. Voyez Voin.
ROGUE .s. f.
les oeufs du poisson avant le frai.
ROGUÉ .adj.
qui a de la rogue. Du poisson rogué. Par extension
: marqué de petite-vérole. (La rogue d'un poisson est un peu l'image d'un visage
Grêlé, comme on dit quelquefois.)
ROMACHER .v. a. et . .v.
n.
quereller. Il faut qu'il ait toujours quelqu'un à romacher ; il
romache sans cesse.
ROUINGER .v. n.
ruminer, mâcher à vide.
ROUVENTS .s. m. p.
vents qui altèrent les jeunes pousses des arbres.- La lune rousse amènera les
rouvents.
RUFLE .adj.
bien portant, vigoureux.
RUQUER .v. n.
roupiller, dormir à demi .
SAFRERIE .s. f.
gloutonnerie.
SAPAS .s. m.
sale, malpropre. Il est fait comme un sapas ;- c' est un sapas.
SAPAUDER (se)v. pron.
se salir.
SAQUER .v. a.
tirer hors, extraire. Aindez mai à saquer man blé d'la pouque.
L'usage de ce mot est ancien.
SEIGLERIE .s. f.
terre ensemencée en seigle.
SEIZAIN .s. m.
mesure pour les grains équivalant à dix litres.
SÉPARTAGER .v. a.
partager, séparer.
SOMMES .s. f.
mesure de deux hectolitres pour les grains.- On appelle panier à somme un grand
panier à deux anses qui sert principalement à porter le linge.
Porter à somme, c'est, ou plutôt c'était porter dans de grands paniers
placés sur le dos d'un cheval, l'un d'un côté et l'autre du côté opposé. On voyageait
quelquefois ainsi. Le père, la mère ou un domestique conduisait, à pied, à côté
du cheval ou monté dessus, et les enfants étaient debout ou accroupis dans les
paniers.
SONGEARD .adj.
rêveur. Il a l'air songeard .
SOURCIN .s. m.
petite source.
SOURCINEUX .adj.
rempli de sources.
SOUTEUR .s. f.
émotion de saisissement, de surprise ; frémissement. Ça m'a fait
souteur.
STICHI, ou STICHITE
.pron.
celui- ci. STILA, id. celui- là.- « J'demande à stichitte, à
stila . » (Coup d'oeil purin.)
SUPER .v. a.
aspirer avec la bouche, boire en aspirant.- Super un oeuf.
SURELLE .s. f.
oseille.
SUS, ou SAS .s.
m.
sureau.
TAICLER, TAIGLER, TAIQUER
ou TOUTRE .v. n.
tousser.
TANCHER .v. a.
arrêter un écoulement de liquide, ou détourner momentanément un cours d'eau au
moyen d'un barrage.
C'est demain que l'on doit tancher les rivières pour les curer .
TANVE .adj.
mince.
TANVETTE .s. f.
tranche de pain très- mince.
TAQUET .s. m.
verrou.
TARABONDIN, TARABONDINE
.s. m. et f .
une personne grosse et trapue.
TAROUFFE ou TAROUFLE
.s. f.
rapprochement des sourcils au point qu'ils semblent se confondrent.
Il a la tarouffe.
TARTIVELLE ou TERTIVELLE
.s. f.
crécelle.
TAUPETTE .s. f.
courtillière ou taupe-grillon.
TERTOUS ou TRETOUS
.adj. plur.
tous.- Dans le moyen âge : très-tous.
TÊTARD .s. m.
arbre arrêté dans sa croissance à une faible hauteur et que l'on ébranche complètement
de temps en temps.
TEUNE .s. f.
coup à la tête.
TEURQUE ou TORQUE
.s. f.
lien de paille ou de foin.
TEURQUER ou TORQUER
.v. a.
tordre.
THÉRÈSE .s. f.
fourreau noir en soie ou en laine, dont les villageoises en deuil recouvrent leur
coiffure.
TIERRE .s. m.
petit pieu qu'on fixe en terre et auquel tient une corde, pour y attacher une
vache et limiter son parcours.
TILLETTE .s. f.
morceau de porc mélangé de gras et de maigre.
TINT .s. m.
son de la cloche.
TINTENELLE .s. f.
petite cloche à main que fait sonner celui qui marche en tête d'une procession
rurale.
TORGNOLLE .s. f.
sorte de panaris.- On l'emploie également dans le sens de soufflet.
TOUCHE s. f.
mèche de fouet.
TOUPIE .s. f.
femme de mauvaise vie.
TOUPILLON .s. f.
diminutif de toupie.
TOURTE DE PAIN .s. f.
pain de 6 ou 9 kilogrammes.
TOURTE .s. f.
pâte faite avec les résidus de la graine des plantes oléagineuses. On l'emploie
pour engraisser l'espèce bovine.
TOUSER .v. a.
tondre.
TRACHER .v. a.
chercher. « Pendant le tempe qu'ils trâchaient leur logis...
» (Archi.v. de Pont- Aud. , XVe sc.)
TRALÉE ou TRALINÉE
.s. f.
multiplicité, grand nombre. Il a une tralée, une tralinée d'enfants.
TRALLE .s. f.
jambes.- Rangez vos tralles pour que je puisse passer.
TRAS .s. m.
tracanoir, treuil pour mettre le fil en écheveau.
TRAUILLER .v. a.
dévider, mettre en écheveau ou en peloton .
Par allusion au bruit continu qui résulte de l'action de trauiller,
on dit également trauiller, pour babiller, bavarder.
TRAUILLETTE .s. f.
petit instrument armé d'une broche de fer sur laquelle on place le fuseau chargé
de fil, pour l'enrouler sur le tras.
TRÉFLERIE .s. f.
terre qui a été chargée en trèfle.
TRELOTER .v. n.
s'agiter beaucoup pour faire peu de besogne.
TREUE ou TRUE .s.
f.
truie, femelle du porc.
TRIMBOUELLE .s. f.
cabriole.- Il a fait la trimbouelle.
TROUILLE .s. f.
grosse femme mal tournée.
TRUC .s. m.
chique, subtilité, finesse. On emploie le plus souvent ce mot avec
le verbe avoir : il a le truc.
TRUTÉ .adj.
caillé.- Lait truté. On dit plus souvent encore : lait sûr.
TUER (se)v. pron.
se ternir, prendre une couleur brunâtre. C'est un cidre qui se tue,
c'est- à- dire qui, aussitôt tiré, perd sa couleur dorée et noircit.
TUET .s. m.
tuyau long et étroit pour soutirer les liquides.
TUMBE ou TOMBE .s.
f.
chute.
TURNE .s. f.
sale bicoque.
TUTER .v. n.
boire en tirant le liquide avec les lèvres et la langue, comme les chevaux, les
vaches.
VAROU .s. m.- Nous croyons
que c'est la même chose que loup- garou.- D'une personne souillée par la boue,
on dit : elle est crottée, elle est faite comme un varou ;- C'est un varou.
VAROUILLER (se)v. pron.
se crotter, se couvrir de boue.
VAULE .s. f.
gaule.
VAULER .v. a.
gauler.
VENDUE .s. f.
vente de meubles à l'encan.
VERGÉE .s. f.
le quart de l'acre.
VERMÉE .s. f.
appât de vers enfilés dans leur longueur et repliés sur eux- mêmes, pour prendre
les anguilles à la ligne.- Pêcher à la vermée.
VERSIÈRE .s. f.
le bout d'une pièce de terre sur lequel on tourne la charrue.
VÉSON .s. m.
mouvement, agitation. Voilà bien du véson pour peu de chose.
VESON ou VESÉE .s.
f.
force, du latin vis. Veson signifie ainsi femme de mauvaise vie.
VEULE .adj.
léger.- C'est une terre veule.
VIAGE .s. m.
contraction de voyage, est synonyme de fois.- Je vous le dis pour le dernier viage.
VIEUX .s. m.
gué.
VILLOTTE .s. f.
petits tas de foin ou de blé.
VIONDIR .v. n., qui exprime
le bruissement ou ronflement de la toupie.
VIPILLON .s. m.
goupillon.
VIQUELIN ou VITELIN
.s. m.
bois de branches non fendu destiné au chauffage.
VLIN, altération du substantif
venin ; ordure, saleté. Ne touche pas à cela, c'est du vlin ;
il a du vlin dans l'oeil.
Ce mot signifie mauvais sujet, au figuré; c'est un vlin.
VOIN .s. m.
regain ou seconde coupe d'herbe.
VORET .s. m.
terre laissée sans ensemencement.
VULIER .adj.
visible, qui saute aux yeux.
PROVERBES
Beaucoup de proverbes
ont cours dans l'arrondissement de Pont Audemer. Nous ne citerons
ici que ceux que nous n'avons pas entendus ailleurs.
PROVERBES EMPRUNTÉS
À LA VIE DES CHAMPS
Quand il aura hersé ce que j'ai
labouré. C'est-à-dire : quand il aura travaillé autant
que moi.
Les petits sillons produisent plus que les grands. Une
affaire médiocre bien conduite rapporte souvent plus qu'une affaire importante
mal dirigée.
Être échauffé comme un flés (un fléau) qui n'a battu de six semaines.
Être froid et glacé.
Être sâs (saoul) comme une beine. La bine est
un réservoir en fortes tresses de paille, ayant la forme d'une barrique et
qui servait principalement autrefois pour conserver le blé.
Il y a du déchet dans la filasse. La chose n'est pas ce
qu'elle paraissait être d'abord.
Avoir d'autres pois à lier. Avoir quelque chose de plus
pressé à faire que ce qui est proposé.
N'entendre ni à dia ni à hue. Être entêté ou ne rien
comprendre.
C'est un sac à tout grain. C'est un mangeur peu difficile
ou un homme qui prend de toute main.
Le plant aime le hant. La fréquentation du bétail favorise
la végétation.
Manger comme un batteur en grange. Avoir grand appétit.
Faut pas tant de beurre pour faire un quarteron. Il ne faut
faire d'embarras pour une chose de peu d'importance.
Il sont camarades fauqueux, ils trempent dans le même buhot.
Ils ont la même maîtresse. Allusion au récipient en corne dans lequel les
faucheurs humectent leur pierre à aiguiser.
Faire une chose mais que (lorsque) les poules pisseront.
C'est-à-dire : jamais.
Pain tendre, beurre frais, cidre doux et jeune femme, c'est le bonheur de la
vie.
Manger pain chaud, boire cidre doux, brûler bois vert, c'est mettre la maison
au désert.
Pour filer, faut mouiller. Pour travailler fort, il faut
boire.
Retrousser la queue sans feurre. Donner un coup de fouet,
une correction. Allusion à l'usage de retrousser la queue des chevaux avec une
tresse de paille, lorsqu'on les conduit à la foire.
Bourgeon n'est pas fleur, fleur n'est pas pomme, pomme n'est pas beire (cidre).
Il ne faut pas se fier aux apparences.
PROVERBES TIRÉS DU
RÈGNE ANIMAL
Sérieux comme un âne qu'on étrille,
comme un âne qui péte, comme un
chat qui pisse dans du son.
Tirer une chose comme des mésangles de dans un creux. La
mésange fait son nid dans le creux d'un pommier et l'on a beaucoup de peine à
dénicher ses petits. On applique le proverbe principalement aux personnes qui
semblent tirer à regret leur argent de leur poche.
D'un homme et d'un cheval ne faire que deux morceaux. Faire
beaucoup de bruit pour rien..
Épouser la vaque et le viau. Prendre une femme enceinte
ou déjà mère.
Faire un collier au viau avant qu'il soit né. Faire
prématurément une chose.
Vendre chat en pouque. Vendre une chose sans la montrer,
ou en dissimulant ses défauts.
Avoir une fièvre de renard. Être affamé. On dit souvent
: il a une fièvre de renard, il mangerait bien une poule.
Vendre du lait de boeuf. Tromper.
Se tenir comme des crottes de mouton. Former une étroite
association, se tenir unis, se défendre envers et contre tous.
Reprendre du poil de la bête. Passer de l'état maladif
à l'état de santé. C'est une allusion à cette croyance que la morsure faite par
un chien enragé peut être guérie au moyen de l'application d'une partie du poil
de l'animal sur la plaie.
Ne pas valoir les quatre fers d'un chien. N'avoir
aucune valeur, aucune qualité.
Aller débrider un chien. Faire une démarche inutile.
Noble comme les quatre quartiers d'un chien.
Si on savait les trous, on prendrait les loups. Si l'on
connaissait le côté faible d'une chose, on en viendrait aisément à bout.
Être plus embarrassé qu'une poule qui n'a qu'un poussin.
Se donner pour une affaire plus d'embarras qu'elle ne comporte.
Faute de poisson, on mange des moules. Quand on n'a pas ce
qu'on désire, il faut se contenter de ce qu'on a.
Être comme quien et cat. Être en état d'hostilité.
A l'épine fleurie, adieu alose, ma mie. La présence de
l'alose dans les eaux de la Seine cesse lors de la floraison de l'aubépine.
Il est capé comme le cul d'un singe. Equivalent de la locution
moderne : « Il est pané. ».
Être adroit de sa main, comme un cochon de sa queue.
N'avoir aucune dextérité.
PROVERBES SE
RAPPORTANT AUX SAISONS, AUX MOIS, AUX JOURS
A la saint Vincent,
Tout gèle et tout fend
A la Chandeleur,
les grandes douleurs ;
Les jours sont rallongés d'une heure
Février remplit
les fossés, mars les vide
L'hiver n'est
jamais bâtard ;
S'il ne vient tôt, il viendra tard
Sil pleut le
jour saint Marc,
Il ne faut ni pouque ni sac
Quand il pleut
en avril,
Apprête ton baril
Jamais le mois
d'avril
Ne s'en va sans épi,
Et le mois de mai
Sans épi de blé
A l'Ascension,
mâque de la chai tout tan saoul,
Pour étre plus fort au mois d'août
S'il pleut le
jour de saint Médard,
Il pleut quarante jours plus tard
A la Madeleine,
Les noix seront pleines ;
A la Saint-Laurent,
Regarde dedans
A la fête de
sainte Luce,
Le jour croît du saut d'une puce
Aujourd'hui jour
de saint Thomas,
Cuis ton pain et lave tes draps ;
Dans huit jours Noël tu auras
Il n'y a point
de samedi,
Où le soleil ne luit.
PROVERBES DIVERS
La centaine est mêlée.
Les affaires s'embrouillent. La centaine est un petit faisceau de
fil qui fait partie d'un écheveau et sert à l'attacher.
Brailler comme une brouette mal graissée. Pousser
de grands cri.
Il est comme mon bonnet ; il a plus de goule que d'effet.
Il parle plus qu'il n'agit.
Liard à liard la coutume se ramasse. Avec de l'économie,
petit à petit, on acquiert de l'aisance.
N'être jamais du premier bateau. Se trouver toujours en
retard. Allusion aux divers départs des bateaux de la Bouille à Rouen.
N'y voir que du brouillard. Ne rien comprendre à une affaire.
Mettre le grapin sur quelqu'un. Le tenir sous sa dépendance.
Être comme le cul et la chemise. Se suivre comme
m... en chemise. Être inséparables.
Ils sont comme St Roch et son chien ; qui voit l'un voit l'autre.
Il beirait la mé et les peissons. Pour exprimer un grand
buveur, ou un homme très-altéré.
Il vaut mieux le charger que le saouler. Pour qualifier un grand mangeur.
Être à pain et à pot avec quelqu'un. Vivre en grande
familiarité avec lui.
Vivre à hache et à mache (masse) avec quelqu'un.
Être toujours en querelle avec lui.
Peter plus haut qu'on n'a le cul. S'élever plus haut que
sa condition, dépenser plus que ses moyens ne le permettent.
Avoir les yeux plus grands que le ventre. Vouloir plus
de nourriture qu'on n'en peut manger.
Une épingle, c'est la journée d'une femme. Allusion à l'insuffisance du
salaire des femmes, principalement dans le passé.
Ne pas se laisser mâquer le cul par les mouques (mouches) faute d'un
coup de queue. Se dit de certaines femmes, par allusion
à l'habitude des animaux de basse-cour de s'émoucher avec leur queue.
Elle tirerait mieux sans qu'minze (chemise) que notre jument sans collier.
Jeu de mots proverbial que l'on applique aux femmes suspectes.
Elle est couverte en ardoises, les crapauds ne montent pas dessus.
C'est la contre partie des deux proverbes précédente.
C'est la famille à Riquiqui, tant plus il y en a, tant moins ils valent.
C'est un compliment de matelot, il est court et sot. Une
injure, une brutalité en peu de paroles.
Ses rentes sont hypothéquées sur les brouillards de la Seine.
Il ne possède rien.
Brûler sa chandelle par les deux bouts. Faire des dépenses
exagérées.
Les conseilleurs ne sont pas les payeurs. Réponse proverbiale
à des conseils dont les avantages sont douteux.
De voleur à voleur, le diable s'en rit. Qu'importe qu'un
fripon dupe un autre fripon !
Foure de quien (chien) qui s'alause ne vaut pas grand' chose.
Un homme sans valeur qui fait son éloge n'en est pas moins un homme
sans valeur.
Il est comme Barrabas et la Passion, on le trouve partout.
Ou. bien : il est comme gloria patri, il est fourré partout.
PARABOLE DE L'ENFANT
PRODIGUE
Un père avait deux effants ; l'cadet
li dit ment cha : Man père, baillez mai ce qui deit m'erveni d'vot'bien.
Et le bonhomme déguenassit s'n'ergent et leux sépartagit san de quoi.
Après que le pus jeune eut hallé
à san père le pus qu'il put, il s'ensauvit dans un endreit oyoù qu'il mâquit tout
ce qu'il avait, dans des dépotayers et des much'-tan-pot, avec un tas de braudées,
de quaimands, et autres genées.
Drès qu'il eut tout envalé ment
un saffre, et qu'il en fut hâqué au point de rebouquer dessus, il arrivit eune
grande fameine ; et comme i n'avait point eune crôte à se fourrer dans la goule,
il eut quasiment la faimvalle.
I dévala devers la ville, et trouvit
à se placher cheux un moussieu, qui l'envéyit ava lés camps pour garder lés pourcias
et lés treues.
Il eût bien voulu, ilau, pûcher
à même les claffrées d'écales, de peires blèques et de pluquettes que les cochons
baffraient, pour remplir sa falle ; mais pièches ne li en baillaient. Et pis sa
pannée était en loques, il était nu-gambes ; il avait bein freid.
Il s'dit en tout par li : J'sieux
un blot, un vrai atot ; y a dans la maison de nos gens des garchons de querrue
et des batteux en grange qui mangent des pies et des flambées quand no cuit, tandis
que mai, ichit j'nai tant seulement pas un miet de d'qui à me mettre dans le gavion.
Faut que j'prenne m'n'équeurce,
et que j'men voige cheux nos gens. J'dirai à man père : J'sieux
un sotas, un piant ; j'ai tout mâqué ; j'en ai ben deu, allez, et je n'sis pus
deigne d'être appelé vot' fils. Traitez mai ment le drenier des journaliers qu'os
avez l'endreit.
I se levit et s'n'allit après san
père, mais quand stichitte le vit si pitiable et si loquetu, il en crétit, et
courant à li, i se j ettit à sen cô et l'embrachit.
L'éffant, qu'était pas mal coinche,
li dit : Man père, j'ai bigrement mal agi envers vous ; j'en bisque
assez, marchez ; mais annuit j'sieux bien duit.
Le bonhomme li réponnit :
Pisque te v'là, n'causons pus de cha. Et i dit à ses gens :
Baillez li une plaude toute risant neuve et un capet ; mettez li des cauches
aux gambes et des galoches ès pieds ; fourrez li le deit dans un annet.
Allez étout quérir un viau gras
; tuez le ; mêlez y le salé qu'est dans la tinette ; tirez de la meilleure bêchon
et du pré ; faut que j'fachions eune fière boustifaille.
Pa'ce que man garchon, que v'la,
avait mouru et il est ersuscité ; il était adiré et il est artrouvé. Et on c'menchit
à bouffer le fricot d'eune rude fachon.
Pendant cha, l'ainné fils qu'était
ava la campagne à réquer des pommes à beire, ervint cheux ses gens. Quand il approchit,
il fut bein surprins de veir de la mâquaille comme si c'était dans les gras-jours.
Et il app'lit un des gens pour
saveir qui que c'était que tout cha, et pour qui tout su feton là .
Stichitt li réponnit :
C'est vot' besot qu'avait fiché le camp et qu'est arvenu dans la débine ;
et vot' père, au lieur de quêcher, l'a débraudé et requinqué , et pis il a c'mandé
de tuer le viau gras .
Ah ! c'est ment cha ! qu'i dit
; i faut se dejuquer de la turne et mâquer san de quoi pour qu'on vous fasse des
repas de Lisieux ! c'est de la gabegie; j'veux pas être témoin d'ces giries là.
Mais san père l' aperchut et li
dit : Vi t'en aveu nous, fieu.
Et stichitte li réponnit :
Man ch'pére, v'la tout plein des années que j'vos sers sans rebouquer
sus ce que vous m'avez c' mandé ; malégré cha, vous ne m'avez jamais baillé ni
chai, ni béchon, ni ergent, pour me régaler aveu d's amis ;
Mais vot' aut' effant s'ensauve
; i va mâquer tout san de quoi avec d'autres manjurias et des gouines ; il revient
tout décaduit, et vous vous baillez n'sai cobein d'détourbier à s'n égard !
Le père li dit :
V'la ben du bagout, et su potin là c'menche à m'éluger. N'sais tu pas bein qu'tout
ce que j'ai est à tai et qu' tu seras aussi bein étoré qu' là été tan frère ?
Mais quand le mauvais gas qu'était
adiré est ertrouvé ; quand stila qu'avait mouru est ersuscité, fallait pas l'effoucher
ni l'erbuter ; au contraire, fallait choquer pour fêter san retour.
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